Alors que le Festival international du film arabe d'Oran devait être lancé dans la soirée d'hier, une mauvaise nouvelle est venue assombrir l'ambiance, pas assez reluisante déjà... Cinéma chkoupi! Serions-nous tenté d'affirmer sans se tromper, tant cette année le Festival d'Oran du film arabe se noie dans la désorganisation et le bricolage, la veille même avant son lancement. Le Fofa a atteint le fond. La politique de la dernière minute est érigée en roi ici, pire que les autres années faut croire. On supprime tout et on recommence. Si le nouveau ministre de la Culture «rêve» d'ériger une cité du cinéma en Algérie, encore faut-il sav oir gérer la poignée de journalistes accrédités et que le festival se targue d'inviter en prétendant être «le premier festival de cinéma arabe au monde»! Une belle arnaque devant tous les problèmes survenus depuis l'arrivée des journalistes et même des réalisateurs, dont certains n'ont pas pu récupérer leurs bagages, sans parler de la débandade administrative et les points de presse vite annoncés, vite annulés devant la stupeur des journalistes ballottés d'un endroit à l'autre. Comme d'habitude, les invités arabes d'abord, les Algériens soi-disant «moule dar», après! Même les excuses du commissaire du festival, Brahim Sediki, ne nous feront pas changer d'avis. Devant ce capharnaüm indescriptible une triste nouvelle est tombée en cette matinée de mercredi où devait s'ouvrir en soirée le Festival international d'Oran du film arabe, à savoir le décès du réalisateur Benamar Bakhti. Signe de mauvais augure pour le festival peut-être que ça ne m'étonnerait guère! En effet, le réalisateur algérien Benamar Bakhti est décédé dans la nuit de mardi à mercredi à Alger des suites d'une longue maladie. Né en 1941 à Tlemcen, le défunt a été formé à l'Institut des hautes études cinématographiques de Paris (Idhec) avant de travailler en tant qu'assistant de télévision en France et aux côtés de cinéastes français comme Claude Lelouch et Jean-Paul Sassy. Réalisateur de téléfilms pour la RTA (Radio et Télévision algériennes) à son retour en Algérie, il est l'auteur de longs-métrages au succès populaire comme L'épopée du Cheikh Bouamama (1983) et Taxi el Makhfi (Le clandestin, 1) un film historique et une comédie dans lesquels l'acteur Athmane Ariouet campait les premiers rôles. Le défunt devrait être inhumé cet après-midi au cimetière d'El Alia à Alger. Devant cette triste nouvelle, certains artistes et professionnels du cinéma algérien nous ont témoigné leur sympathie quant à cette perte «cruelle» du cinéma algérien, à l'exception du réalisateur Djamel Bendedouche qui nous a insultés devant tout le monde en raison d'une critique d'un de ses films, qui date de Mathusalem et qui vraisemblablement lui est restée au travers de la gorge. Pour rencontrer les réalisateurs il faut se déplacer à l'hôtel Méridien, l'équivalent zaâma du Carlton ou Martinez de Cannes, pour espérer rencontrer les «stars» arabes. Peine perdue, ces dernières dont certaines se cachent à l'hôtel Royal, ne parlent pas trop aux journalistes. Pour en revenir à la disparition de Benamar Bakhti, au gré des rencontres, au lobby du Méridien donc, nous accostons Djamel Azizi qui participe au festival avec un film. «Ce matin nous étions touchés, émus par cette mauvaise nouvelle... l'année commence mal entre Laskri, Bakhti sans oublier Sid Ali Kouiret. On vient d'apprendre la mort d'un grand cinéaste algérien, il a donné au cinéma des films très intéressants. C'est vraiment une grosse perte...» nous a-t-il confié. Pour sa part, Brahim Sediki a tenu à faire ses condoléances à la famille du défunt, proches, amis et tous ceux qui l'ont connu et a tenu à dire: «C'est une triste nouvelle, catastrophique, que de perdre ce grand nom du cinéma algérien qui a fait de grands films, ce combattant du cinéma. Une absence remarquée. Il était généreux, fidèle et modeste malgré ses grandes participations au cinéma algérien. Il était doué d'une grande ouverture d'esprit et altruiste...» Le comédien Mustapha Laribi dira pour sa part: «Je l'ai croisé peut-être une fois dans ma vie. Je connaissais sa femme, ses nièces, sa petite famille. ses amis. Dieu ait son âme! Une perte. C'était un visionnaire. Un artiste et un poète qui voyait au-delà des ans. C'était un cordon bleu. Sa femme et ses filles, ne touchaient pas à la cuisine quand il est à la maison. On savait qu'il était malade, c'était un grand homme. Moi qui ne l'ai pas connu, c'était un grand homme...» Très attristée, Mme Baya Hachemi a vraiment tenu à témoigner de sa profonde affliction: «Je veux bien faire une déclaration. Ce qui me rend malade, c'est que Bakhti a toujours rêvé de faire le film sur l'Emir Abdelkader et il est parti sans le faire, ça me reste sur le coeur. Si on veut honorer un artiste, technicien, un réalisateur, un comédien ce n'est pas en lui rendant hommage quand il est mort. Ce n'est pas en lui donnant un prix ou une médaille. C'est de lui donner du travail. Si vous lui enlevez le travail, il meurt c'est comme le poisson, si on le sort de l'eau il meurt. Si on lui avait donné de l'argent, si on lui avait donné la possibilité, il nous aurait donné une oeuvre quelle qu'elle soit, mais une oeuvre à cent pour cent algérienne, tellement il voulait faire revivre ce personnage. On a besoin d'un artiste. Ça me rappelle Fatiha Berber, Farida Saboundji quand elle me dit si tu veux me rendre service donne-moi un rôle. Je lui dis je n'ai pas d'argent, avec quoi je vais te payer? L'artiste a besoin qu'on lui donne à travailler et il y a de l'argent. Quand on veut, on peut.» Triste réalité et toutes les stars et paillettes du Fofa ne sauront couvrir cette amère réalité.