La situation confuse est exploitée par des milieux spécialisés dans le trafic des migrants qui se pressent par dizaines de milliers sur les côtes italiennes, en provenance des rives de la Libye. C'est ce qui a poussé l'Italie à réagir hier avec force... Il aura fallu attendre samedi pour que le porte-parole du ministère des Affaires étrangères «condamne avec force l'enlèvement des fonctionnaires du consulat général de Tunisie» à Tripoli (Libye), qualifiant cet acte de «violation flagrante et inacceptable» des lois et usages internationaux. Considérant que «cet acte est une violation flagrante et inacceptable des lois et coutumes internationales qui garantissent l'inviolabilité des locaux diplomatiques et consulaires», Benali Cherif a souligné par la même occasion «le rejet total de ces actes répréhensibles», avant d'exprimer «la solidarité de l'Algérie avec le gouvernement de la Tunisie soeur et avec son peuple» et d' «assurer les familles des fonctionnaires enlevés» d'un soutien total. Surtout, un appel pressant a été adressé aux milices concernées de «ne pas attenter à la vie de ces innocents et procéder à leur libération sans entraves ni conditions». Cette réaction prend tout son sens, aussi bien par la condamnation sans équivoque de tous les actes visant à terroriser des innocents, que par l'appel exhortant «nos frères Libyens quelles que soient leurs appartenances et obédiences, à rejeter la violence et à persévérer sur la voie du dialogue pour aboutir à une solution politique et pacifique à la crise et pour permettre la mise en place rapide d'un gouvernement d'union nationale consensuel capable d'édifier des institutions démocratiques fortes et de relever l'ensemble des défis, notamment le défi sécuritaire». En Tunisie, l'émotion est considérable depuis plusieurs jours et une cellule de crise suit avec beaucoup d'attention les développements de la situation. Hier, le secrétaire d'Etat aux affaires arabes et africaines, Touhami Abdoulli, se montrait rassurant, affirmant que les négociations avec les ravisseurs avaient considérablement progressé et qu'il se pourrait même que les 10 fonctionnaires et agents du consulat tunisien à Tripoli soient libérés dans le courant de la nuit du dimanche au lundi 15 juin. Posée comme préalable à toute réponse aux exigences formulées par les auteurs du rapt, cette libération entraînerait de la part de la Tunisie la libération de Walid Klib, un des dirigeants de Fajr Libya, arrêté dernièrement à Tunis et incarcéré à la prison d'al Mornaguia, non loin de la capitale. L'assaut contre le consulat de Tunisie lancé vendredi dernier par un groupe de cette importante milice qui contrôle Tripoli a entraîné la détention du vice-consul et de neuf autres fonctionnaires par le groupe armé qui, selon les assurances de Touhami Abdoulli, aurait accepté de s'en remettre aux «voies légales». Comme si cela ne suffisait pas, dans le contexte libyen actuel, la situation confuse est exploitée par des milieux spécialisés dans le trafic des migrants qui se pressent par dizaines de milliers sur les côtes italiennes, en provenance, pour bon nombre d'entre eux, des rives de la Libye. C'est ce qui a poussé l'Italie à réagir hier avec force, le Premier ministre Matteo Renzi menaçant l'Union européenne de mettre en place un «plan B» si son pays n'est pas mieux soutenu par l'UE pour faire face à l'afflux de migrants. L'Italie se débat depuis des mois pour accueillir des vagues successives de migrants et la situation s'est envenimée avec ses voisins européens au cours des derniers jours lorsque des migrants ont été refoulés aux frontières avec la France et l'Autriche. L'UE a du mal à obtenir un consensus autour de son programme d'affectation des migrants - 24.000 réfugiés par pays membre autre que l'Italie et la Grèce - alors que Rome et Athènes réclament davantage du sommet européen du 25 juin prochain. Qualifiant ce plan, déjà rejeté par la plupart des pays qui se considèrent non concernés par le problème, de «provocation», Matteo Renzi se dit résolu à mettre en oeuvre le plan B qui «frapperait surtout l'Europe en premier», sans autres précisions. La perspective d'une solution au conflit libyen est donc un impératif attendu avec une impatience et un espoir considérables, surtout que l'Italie a accueilli depuis janvier 2015 plus de 57.000 migrants et demandeurs d'asile secourus en mer auxquels il faut prêter aide et assistance dans un contexte économique on ne peut plus morose. C'est ce qui fait dire au Premier ministre italien que «la convention de Dublin devrait être modifiée», dès lors que «le chaos qui règne actuellement en Libye relève de la responsabilité de l'Europe» dans «l'intervention militaire il y a quatre ans» par l'Otan contre le régime d'El Gueddafi.