L'Algérie est classée à la 46e place sur les 146 pays figurant sur la liste de Transparency International. La corruption en Algérie prend des proportions alarmantes. Jamais depuis l'indépendance, le sujet n'a été aussi abordé dans les discours officiels. L'annonce par le chef de l'Etat, lors de l'ouverture de l'année judiciaire 2004-2005 de l'installation d'un groupe de travail chargé d'élaborer un projet de loi sur la prévention et la lutte contre la corruption et de mettre en place les mécanismes de suivi, ouvre une nouvelle étape dans la lutte contre ce phénomène. L'objectif, à travers cette initiative, est d'élaborer un code qui facilitera la lutte contre la corruption, de sorte à se conformer à la convention internationale de lutte contre ce phénomène, que l'Algérie vient juste de parapher. Il est utile de rappeler que c'est feu Mohamed Boudiaf, qui, en pointant du doigt la mafia politico-financière, avait donné un coup de pied dans la fourmilière et suscité des grincements de dents. Une opération spectaculaire a été lancée au début de la dernière décennie contre les cercles mafieux. Maintenant que l'Algérie s'est ouverte à l'économie de marché, le fléau de la corruption a étendu ses tentacules à tous les domaines d'activité. Une situation asphyxiante pour l'économie nationale et favorisée par l'insécurité qu'a connue le pays au cours des années de terrorisme. Un état de fait relevé par des organisations et des institutions financières internationales dans leurs rapports respectifs. Après le rapport de la Banque mondiale attestant que 75% des entreprises algériennes reconnaissent verser des pots de vin, c'est au tour de l'ONG, Transparency International de confirmer l'ampleur du phénomène qui n'a pratiquement épargné aucun secteur d'activité. Ainsi, l'Algérie est classée à la 46e place sur les 146 pays figurant sur la liste de Transparency International, en compagnie de quatre autres pays (Serbie-et-Monténégro, Nicaragua, Macédoine, Liban). Parmi les 146 pays figurant dans le classement 2004, soixante d'entre eux obtiennent moins de 3 sur 10, ce qui indique que la corruption y est endémique et les «dépouille de leur potentiel», relève le rapport. L'indice d'évaluation du degré de corruption a été établi à partir de 18 enquêtes et analyses d'experts fournies à Transparency International entre 2002 et 2004 et réalisées par 12 organismes indépendants. Selon la même organisation, la corruption touche en premier lieu, les marchés publics, ce qui occasionne une perte importante de fonds publics dont ont besoin les pays en développement et ceux en voie de développement. Selon un communiqué de l'organisation, la corruption entraîne «une perte importante de fonds publics dont ont besoin aussi bien les pays développés que les pays en développement pour l'éducation, la santé et la réduction de la pauvreté». «La passation des marchés publics est corrodée par la disparition des revenus qui aboutissent dans les poches de dirigeants de sociétés pétrolières occidentales, d'intermédiaires et de fonctionnaires locaux», déplore Transparency International. Ainsi donc, l'Algérie qui figure parmi les pays «riches en pétrole» est paradoxalement frappée de plein fouet par la pauvreté. Une manne pétrolière en perpétuelle augmentation, en raison de la hausse spectaculaire des prix du pétrole n'a pas suffi pour améliorer les conditions de vie de la population. D'après le dernier rapport du Conseil national économique et social(Cnes), près de la moitié des Algériens sont pauvres et près du quart vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le manque de transparence dans la passation des marchés, le trafic d'influence et l'atteinte aux deniers publics sont les principales facettes de la corruption, qui ronge les circuits informels de l'économie nationale. Même les fonds alloués par les institutions financières internationales pour l'aide des pays sous-développés n'arrivent pas à bon port. En effet, le Sénat américain a fait état de malversations, indiquant que la corruption a coûté quelque 100 milliards de dollars à la Banque mondiale qui finance des projets d'aide au développement dans les pays pauvres. Selon d'autres experts, quelque 5 à 25% des 525 milliards de dollars prêtés par la Banque mondiale depuis 1946 ont été détournés, ce qui «équivaut à une somme entre 26 et 130 milliards de dollars». Le classement de l'Algérie sur la liste de Transparency international est on ne peut plus préoccupant. Il appelle à une mobilisation aussi bien de la part des pouvoirs publics que de la société civile, qui, en luttant contre ce phénomène, doivent conférer au concept d'Etat de droit toute sa signification.