A l'invitation du ministre tunisien de la Défense, Dali El-Djazi, le chef d'état-major de l'ANP, le général de corps d'armée, Mohamed Lamari se trouve à Tunis pour parapher un accord de coopération militaire avec la Tunisie. Dans le cadre de la politique d'ouverture stratégique menée par l'armée algérienne vers ses partenaires étrangers, le général Lamari est, depuis hier, à Tunis, pour évoquer la coopération militaire bilatérale et signer avec les militaires tunisiens un accord de coopération militaire. Même si les termes de cet accord ne sont pas connus, il devrait beaucoup s'agir, avec ce voisin maghrébin, de coopération antiterroiste. Si l'ANP a développé avec ses partenaires africains (Afrique du Sud), européen (Russie), asiatiques (Inde et Chine) et arabe (Qatar) des relations privilégiées en termes d'achat d'équipements militaires, de formation de cadres officiers et de renforcement d'alliances stratégiques, elle a néanmoins quelque peu négligé ses voisins maghrébins. Si le courant ne passe pas du tout entre les armées algérienne et marocaine, souvenir de la guerre des sables en 1963 et du conflit du Sahara occidental, il en est tout autrement avec l'armée tunisienne. C'est cette dernière qui a assuré la protection des frontières, renforçant son dispositif, et permettant à l'ANP de se consacrer pleinement à l'éradication des maquis terroristes dans l'Est algérien sans trop se soucier des infiltrations des terroristes depuis la Tunisie. Mais cette entente devrait être revue sous le prisme des nouvelles menaces qui ont surgi le long des frontières algéro-tunisiennes. Une menace terroriste d'abord, puisque les groupes de l'émir Hattab, dans ce qu'ils appellent la zone 6, ont redoublé d'activisme, multipliant attentats, faux barrages, mais surtout incursions en territoire tunisien. L'accrochage avec les gardes frontières tunisiens à l'armement semi-lourd, l'année dernière, témoigne de la présence, de plus en plus importante, des terroristes dans cette partie de la région. Les gardes frontières sont aux aguets des deux côtés de la frontière, surtout sur les axes de Tébessa qui connaît une concentration terroriste de plus en plus importante. Il est devenu, dès lors, impératif de renforcer le dispositif aux frontières communes pour éviter que des attentats, comme celui de septembre dernier, lorsque un groupe du GIA a tenté d'encercler un village frontalier tunisien, ne se répètent. Depuis l'émergence du terrorisme en Algérie, la Tunisie a toujours représenté un voisin fiable et solide au flanc Est. Le gouvernement tunisien avait étouffé dans l'oeuf la contestation islamiste qui allait se radicaliser lorsqu'un groupe dissident de la Nahda tunisienne de Rached Ghannouchi, réfugié à Londres, allait créer un noyau terroriste semblable au GIA. Les connexions entre islamistes tunisiens et algériens se sont avérées fonctionnelles lorsqu'a surgi l'attaque contre un contingent militaire à Guemmar, à El-Oued, en 1989. Le groupe dirigé par l'émir Dahane et Tayeb El-Afghani avait prévu de se replier en territoire tunisien avant d'être rattrapé par les unités d'élite de l'ANP à une encablure de la Tunisie qui avait alors fourni une assistance appréciée à Alger. Cette assistance n'a pas cessé et la réciprocité est également valable du côté algérien lorsque le GIA en Europe utilisait des islamistes tunisiens. C'est d'ailleurs les Algériens qui avaient appuyé la Tunisie dans les organisations internationales de sécurité, comme à Interpol. Les relations déjà au beau fixe entre le Président Bouteflika et Ben Ali vont trouver, dans cet accord de coopération militaire, une opportunité de se renforcer davantage. Une relation privilégiée entre deux voisins maghrébins qui ont de tout temps développé une vision assez similaire sur les risques du terrorisme et dont les récents événements du 11 septembre aux Etats-Unis sont venus confirmer la vision pertinente.