Il fait bon flâner au coeur de Washington. Le détour en vaut la peine, ne serait-ce que pour se rendre compte que l'oncle Sam est jaloux de son histoire relativement courte mais riche. La tête pleine de clichés imprimés par les médias, nous débarquons de nuit dans la capitale des Etats-Unis après huit heures de vol depuis l'aéroport Charles-de-Gaulle de Paris. Washington surprend, déroute et étonne son visiteur. On s'attendait à une cadence infernale, à une ambiance festive, à des images comme celles des séries de télévision montrant des James américains qui dégainent à tout-va et défiant le monde dans la rue, à des scènes de course-poursuite et des fusillades exaltantes dans les avenues bordées d'immenses gratte-ciel. Rien de tout cela. Nos a-priori sont vites réduits à néant. Partagés entre nos clichés et la curiosité insatiable de voir le nombril du Nouveau Monde, nous restons dans une totale expectative. On s'aperçoit, en définitive, que la capitale des Etats-Unis ne colle pas du tout à l'image que l'on s'est faite. Le premier étonnement et d'autres suivront à Chicago et à New York, a été de réaliser que les Américains sont simples. Quel étonnement d'apprendre également que les constructions, selon la loi, ne doivent pas dépasser la hauteur du Capitole. A première vue, l'idée d'une vie purement matérielle, harcelée par la pression de l'urgence du quotidien n'est pas tout à fait exacte. On découvre, en fait, une ville américaine morne, paisible, calme sans building et qui dort la nuit. Elle dort pour mieux gouverner le monde. A 19 heures, Washington sombre dans un calme aussi pesant que le poids politique qu'elle imprime à la planète Terre. Les magasins ferment les portes, ils n'ont pas de rideaux. A travers les vitrines qui ne portent pas de barreaudages, les marchandises sont exhibées sous les lumières. Certains lampadaires font défaut à éclairer les grandes avenues, excessivement larges. Les derniers passants, accrochés à leurs téléphones portables pressent le pas. Les véhicules, pour la plupart des taxis conduits par des Ethiopiens, s'impatientent devant les innombrables feux rouges. Des SDF, oui même à Washington ! trimbalent leurs cabas, se traînent dans la pénombre des arbres luxuriants qui peuplent les avenues, ils retrouvent la quiétude sur les bancs publics. «A partir de cette heure, il est rare de trouver un magasin ou un restaurant ouvert, les Américains rentrent chez eux et se mettent face à leur téléviseur», indique le concierge de l'hôtel Hilton Garden où nous résidons, il enchaîne: «Il faut plutôt aller du côté de George Town.» A la résidence de J.F.K. George Town, est l'un des quartiers les plus huppés et les plus animés à Washington. La nuit, il prend le relais de la vie. Construit en brique rouge, ses façades sont de couleurs vives et ses toits sont pointus. Ce quartier est le haut lieu de la vie nocturne washingtonienne. Une multitude de cafés, restaurants et pubs très animés, le quartier vibre la nuit. C'est dans ces belles demeures du XIXe siècle que vit le gratin politico-mondain de Washington. C'est également le lieu de prédilection des membres du gouvernement, des sénateurs, des étudiants, des diplomates et des lobbyistes. Il est surtout renommé pour son exotisme et sa sélection de restaurants raffinés. Par ses vestiges relativement récents, il représente «un quartier mémoire» très nostalgique pour les Américains. Par exemple, au 3017 N Street, se trouve la résidence John F.Kennedy. Dans les années 1950, le jeune sénateur a élu résidence dans cette rue avant de devenir président. Une autre bâtisse de renom se situe au 2920 R Street. C'est Katharine Graham qui l'occupait. Journaliste de renom, elle a dirigé le Washington Post de 1963 à 2001. C'est sous sa direction qu'a été révélé, en 1972, le scandale du Watergate. Dans la même rue - 31st Street -, on retrouve la propriété de Dumbarton Oaks. C'est là qu'a eu lieu, en 1944, la conférence du même nom au cours de laquelle les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l'ex-URSS et la Chine ont initié la création de l'Organisation des Nations unies. Plus loin, à Prospect Street, c'est la prestigieuse université de George Town. Fondé en 1789, cet établissement est l'un des plus anciens des Etats-Unis. L'ex-président Bill Clinton y a fait ses classes. Quel étonnement de constater aussi que les Américains sont pour la plupart obèses. En revanche, ils font tous du sport. Ils fument dans la rue. Personne ne fume sous un toit. Dans les restaurant, les cafés, le métro, les bus, les bars, les magasins et dans les bureaux, il est interdit de fumer. Ils respectent d'ailleurs, avec une incroyable rigueur, cette recommandation. Dans le métro et dans les bus, point de brouhaha. Qui d'un livre, d'un journal, d'une revue, tout le monde lit ou, à défaut, absent, se noit dans un univers musical diffusé par les écouteurs du baladeur. Les Américains s'habillent d'une manière simple. Cravate, chaussures classiques et être tiré à quatre épingles sonne plutôt français. Jeans, baskets et tee-shirts, voilà l'accoutrement simple des Américains. L'écrivain pied-noir, Albert Camus, a résumé cet état de fait : «A chaque fois que j'ai essayé de comprendre le monde dans sa complexité c'est sa simplicité qui m'étonne.» Et c'est cette simplicité justement qui brusque nos idées préconçues. Washington offre un mélange détonnant de simplicité et joie de vivre avec la paix en plus. Une joie de vivre qui transparaît parfaitement quand on sillonne Washington durant la journée. Le drapeau américain flotte partout. Comme par enchantement, on est tout de suite pris par les charmes de la bannière étoilée. Notre guide raconte qu'en 1790, le président Washington engagea un ingénieur français, Pierre l'Enfant, pour la concevoir à l'image de Paris. Traversé par la rivière Potomac, entre les Etats de Virginie et du Maryland, cette région a été appelée District of Columbia. Columbia et la nouvelle capitale qui devait y être construite fut nommée Washington, en l'honneur du premier président américain George Washington. Washington DC est une ville à contrastes. La partie centrale est conçue avec de larges avenues bordées de bâtiments et de monuments magnifiques. Certains des quartiers d'alentour sont pauvres. Les quartiers de banlieue en Virginie et au Maryland sont habités par beaucoup de politiciens, diplomates étrangers, fonctionnaires d'Etat et des hommes d'affaires de différentes nationalités. En plus des autochtones, y résident de nombreux immigrés. C'est une des villes les plus cosmopolites des Etats-Unis avec New York. Elle allie à la fois le caractère d'une ville administrative et touristique. Les écureuils de la Maison-Blanche Notre visite commence par le Foreign Press Center, un centre pour les journalistes étrangers. C'est là que les responsables US tiennent leurs conférences de presse. Le centre est doté de micro-ordinateurs, d'une bibliothèque, d'archives et d'autres moyens d'accès aux sources d'information. Il y a même le bureau d'un officier de l'armée pour des compléments d'information. Le siège appartenait à la CIA avant d'être récupéré par le département des Affaires étrangères. Nous approchons ensuite la Maison-Blanche ou White House. Deux écureuils musardent sur la pelouse de la White House ; ils effarouchent une volée d'oiseaux, juste en face de la fenêtre du président Bush. Du jardin La Fayette Park, lieu de manifestations publiques contre la politique du gouvernement, on voit la résidence du président. Bush et sa femme habitent au second étage. Impossible de s'en approcher davantage. La 1600 avenue Pennsylvania sépare le jardin de la Maison-Blanche. A longueur de journée, des milliers de touristes s'y attardent. Rivées au sol, les caméras de plusieurs chaînes de télévision guettent H24 le moindre mouvement à environ 1 km du côté ouest de la résidence du président. En allant toujours du côté ouest, à quelque deux kilomètres, la I Street sépare la Maison-Blanche du mémorial Jefferson. Hotel Willer, une autre merveille architecturale de la ville. Abraham Lincoln y séjournait. C'est dans cet hôtel que Julia Word Haw a écrit l'hymne national américain. Le président Ulysse S. Grant aimait l'hôtel et marchait à pied depuis la Maison-Blanche pour y prendre un verre de brandy, raconte encore notre guide. Tous les lobbies américains ont des bureaux dans cet hôtel. Largement à la portée des émirs du Golfe, à 25.000 dollars la nuitée, ils en font leur lieu de rendez-vous. A l'ouest de la ville, se dresse le Capitole (le siège du Congrès des Etats-Unis). C'est le plus haut bâtiment de Washington. La première pierre a été posée par George Washington en 1793 et sa construction fut terminée en 1810. Depuis les attentats du 11 septembre, on ne peut aller au-delà de l'imposante statut du général Grant qui trône sur son cheval préféré. Le bâtiment du Capitole porte en sa hauteur la statue d'une femme armée, mais qui a les mains libres. Le mémorial de la Seconde Guerre mondiale est le poumon de la ville. A peine inauguré en mars 2004 qu'il est devenu le lieu de pèlerinage des touristes. Tous les Etats d'Amérique qui ont pris part à la guerre y sont représentés de même l'Europe. «This is the price of liberty», lit-on sur l'une des gravures ; sur l'autre, 4000 étoiles dorées représentent chacune 10 soldats US qui se sont sacrifiés pour combattre le fascisme. Mémoire à ciel ouvert, le mémorial fait face au monument du président Abraham Lincoln. Beaucoup d'autres sites s'offrent au visiteur: la Cour suprême, le Bureau des Gravures et Impressions où les billets de dollars sont imprimés (Bureau of Engraving and Printing), le Bureau Fédéral d'Investigation (FBI), les monuments à la mémoire de Washington, de Jefferson et de Roosevelt, le Cimetière national d'Arlington, le Mémorial de la guerre du Vietnam, celui de la guerre de Corée et celui de la bataille d'Iwo Jima. Pour l'Institut Smithsonian, il faut passer des journées entières pour visiter ses différentes parties qui regroupent une des collections de musée les plus riches au monde. Il fait vraiment bon flâner au coeur du Nouveau Monde.