L'image que s'offrent les Etats-Unis à travers Barack Obama est de taille à occulter tout le reste. Voire effacer les grosses et nombreuses éclaboussures dues à l'administration Bush. L'année 2009 a incontestablement offert aux Américains un superbe cadeau. Le plus inattendu de leur histoire. Un président noir, plutôt métis (de mère blanche), mais tout de même, un cadeau inespéré en ces heures bien alarmantes pour un empire contraint au repli pour surdose d'arrogance et de mépris. Vu sous cet angle, l'avènement Obama arrive à point nommé pour «redorer le blason» terni des Etats-Unis en mal d'image et de leadership. Une véritable bouffée d'oxygène donc que cette élection historique autant sur le plan interne que dans le reste du monde. Permettre à un homme de couleur d'accéder à la Maison-Blanche, occuper le bureau Ovale et présider aux destinées des Etats-Unis, c'est tout un exploit au pays de l'Oncle Sam! Il suffit de jeter un bref regard dans le rétroviseur de l'histoire interne et toute récente de ce pays pour oser parler d'un véritable événement révolutionnaire. En effet, qui aurait cru à une remise en cause aussi spectaculaire de la ségrégation raciale au pays du Ku Klux Klan où, il y a à peine 50 ans, l'Américain noir était tout, sauf l'égal de l'homme blanc. En faire le président des Etats-Unis? Du blasphème pour les uns au rêve des autres, le chemin s'est poursuivi après Rosa Park et Martin Luther King dans les rues de l'Alabama...Jusqu'à Washington pour Barack Obama. Ce résultat est en soi un grand pas dans l'histoire de l'humanité. Ce qui confère à cette élection son cachet révolutionnaire. On dit que l'image vaut mille mots, et celle que s'offrent les Etats-Unis à travers Barack Obama est de taille à occulter tout le reste, du moins le pensent-ils. Voire effacer les grosses éclaboussures, plutôt nombreuses, dues à l'administration Bush. Parmi celles-ci, on y recense l'hydre de la torture et la violation des droits humains, l'enfer des hommes sous l'intitulé de Guantanamo ou d'Abou Ghraïb, les déclarations frauduleuses qui ont permis l'invasion de l'Irak et le chaos infligé aux populations, la guerre dévastatrice en Afghanistan, la sous-traitance et le partenariat dans la violence avec des régimes corrompus et répressifs, les actes de piraterie et d'enlèvement de la CIA et, bien sûr, la fronde sociale générée par la crise économique et le coût des guerres, sans oublier la honte laissée par l'ouragan Katrina dans le coeur de beaucoup d'Américains. Comme on le voit, le tableau est plutôt chargé et le nouveau président n'est sûrement pas le faiseur de miracles proclamé un peu partout. Si «l'Obamanie» n'est qu'affaire de stratèges pour secourir l'empire comme le diraient les spécialistes de la géopolitique, l'opinion mondiale n'attendait pas moins des gestes spectaculaires de la part du non moins spectaculaire nouveau président, notamment en faveur de la paix dans le monde et le respect de la planète, d'où cet enthousiasme universel soulevé aux quatre coins du monde par l'avènement Obama. D'autant que le discours et les promesses du candidat-président tranchaient nettement avec ses prédécesseurs, se disant plus sensibilisé aux problèmes de la planète, plus ouvert au dialogue politique et aux solutions multilatérales et, bien sûr, non partisan de la force brute dans la résolution de conflits. Tout le contraire de son prédécesseur. Donc, on pouvait croire à une fin proche de la guerre tous azimuts des ex-occupants de la Maison-Blanche. La fermeture de Guantanamo, le retrait des troupes américaines de l'Irak, la fin des tensions avec l'Iran et du martyre palestinien, bref, un épisode de détente dans l'histoire tourmentée de l'humanité. Mais comme l'arbre ne fait pas la forêt, ni l'hirondelle le printemps, le symbole Obama ne peut contraindre les visées d'ores et déjà établies de l'empire, ni humaniser ses pratiques. La détente risque donc d'être de courte durée et les nombreux espoirs des millions de gens de par le monde de s'émousser. Si la fermeture de Guantanamo (déjà condamnée par la Cour suprême du pays) est acquise pour le nouveau président, le retrait des troupes de l'Irak annoncé pour 2011 n'est qu'un leurre et ne signifie nullement la fin de l'occupation de ce pays. Il fait partie d'un calcul qu'on cache à l'opinion et qui consiste tout simplement à poursuivre l'occupation de ce pays de façon moins visible, mais non moins efficace en ayant un droit de regard sur le choix des gouvernants locaux et la main- mise sur les ressources énergétiques. Des indices probants parlent déjà de cette occupation à long terme de l'Irak. Les Etats-Unis y ont construit la plus grande ambassade du monde. Plus grande que le Vatican. Imaginez 6 fois le siège des Nations unies à New York. C'est dire qu'il ne s'agit pas d'une ambassade, mais plutôt de l'annexe de Washington en Irak pour rappeler aux Irakiens qui sont les vrais maîtres de leur pays. A cette forteresse mastodonte qui s'élève imposante au centre de Baghdad, s'ajoutent une série de casernes fortifiées et disséminées partout sur le territoire irakien. Autrement dit, les décors sont déjà plantés pour la présence massive et permanente des Américains en Irak. De là, en «bons» colonisateurs et supporters inconditionnels de l'Etat sioniste d'Israël, ils pourront opprimer à leur guise, contrôler toute la région, manipuler les faits et les gens, mettre en échec les mouvements progressistes, bouger leurs pions dans les gouvernements locaux et veiller au grain en cas de soulèvement inopiné des populations. C'est toute une colonisation! Différente de la tutelle britannique d'antan? Pas tant que ça. Mais tout cela ne fera pas les manchettes des grands médias occidentaux dont les caméras seront braquées sur le retrait officiel des troupes. Quant à ce qu'il restera de l'Irak après «le retrait américain», seuls les Irakiens auront à le subir dans un pays qui n'existe plus, un Etat désagrégé en une multitude de tribus, dans la mire des miliciens et des mercenaires de tout bord et sous la gouverne de dirigeants aux ordres des Etats-Unis. La régression s'affiche partout et le chaos s'annonce sans fin. Le sort de l'Irak semble désormais scellé et la liberté a été mise hors jeu. (*) écrivaine