La commission des finances, à cette occasion, a été privée par son président de l'ensemble de ses prérogatives. Décidément, rien ne va plus au sein de la commission des finances. Celle-ci, qui a repris ses travaux mercredi, en vue d'étudier les 108 amendements proposés par les parlementaires, a littéralement cessé de fonctionner à cause, nous dit-on, «du comportement totalitaire et illégal de son président, Tahar Khaoua». Ainsi, et contrairement aux usages qui ont cours au sein de l'APN pluraliste algérienne depuis sept ans, ce responsable, nous apprennent des députés, membres de cette commission, «a refusé catégoriquement d'entériner les amendements qui, pourtant, ont fait l'unanimité au sein des membres et, partant, des groupes parlementaires». Un pareil comportement, jamais observé auparavant, a notamment concerné l'article 26 prévoyant une TVA (taxe sur la valeur ajoutée) de 7 % sur les médicaments et que pas moins de 8 amendements sont venus abroger. Il y va de même, on s'en doute bien, de la fameuse hausse de 5 DA sur le prix du gasoil. Ici, des députés, notamment ceux du FLN, qui souhaitaient que cette augmentation ne soit que d'un dinar au lieu de cinq, ont poussé la bonne volonté, mais aussi pour ne laisser aucune prise aux pouvoirs publics, jusqu'à retirer leurs propositions d'amendements afin de ne laisser que la proposition d'abrogation telle que formulée par Amar Takdjout, syndicaliste, député et membre de la direction du PT. Si le FLN est demeuré en retrait dans ces troubles qui menacent de déstabiliser durablement l'APN, le RND, lui, semble y trouver son compte comme nous le disent des sources proches de l'instance législative nationale. La tension est allée tellement loin, nous disent nos sources, que le représentant du MSP dans cette commission, Fateh Guerd, a fini par claquer la porte bruyamment. Le représentant du mouvement El-Islah, qui, notamment, n'a aucune chance cette fois-ci de passer un nouvel amendement interdisant l'importation de boissons alcoolisées, s'est lui aussi retiré sans autre forme de procès. Quant au PT, il a pris la ferme décision de refuser de défendre ses propositions d'amendements au sein de cette commission. Celle-ci, nous disent nos sources, «roule tout bonnement pour le compte du gouvernement en général, et du ministre des Finances en particulier, alors que le principe de séparation des pouvoirs est censé être garanti par la constitution». «Si la situation devait perdurer, s'indignent encore nos sources, il serait carrément préférable de dissoudre l'APN et de transformer en règle, l'exception qui permet au président de légiférer par ordonnance durant les intersessions». Le FLN aux côtés des «frondeurs» Les amendements proposés, qui font l'unanimité, ne visent rien moins qu'à préserver le pouvoir d'achat de larges couches de la société. Ce serait, en effet, défoncer des portes ouvertes que de rappeler que le médicament coûte déjà bien assez cher sans qu'il ne soit besoin de revoir à la hausse la TVA. La hausse de 5 DA du prix du gasoil, elle, touche directement les petites bourses. Elle risque carrément de provoquer une réaction en chaîne, puisque le transport en commun, l'électricité et même le pain sont tributaires de ce produit de première nécessité. Le PT, qui a ainsi refusé que ses députés viennent défendre leurs amendements au sein de cette commission, a préféré s'en remettre à la plénière. Il semble que la tension ait tellement monté, engendrant éclats de voix et retraits des députés, que le président de l'APN, lui-même, Amar Saïdani, en a été informé en plein milieu de la nuit de mercredi à jeudi. Or, jusqu'à l'heure actuelle, le troisième homme de l'Etat n'a pas réagi pour remettre quelque ordre au sein de cette commission dont «le fonctionnement remet en cause le principe même de souveraineté de la démocratie populaire». La situation presse d'autant plus que le début du vote de la loi, et de ses éventuels amendements, commence demain lundi. Nos sources, à la lumière de ces révélations, n'hésitent pas à parler de «pressions directes et indirectes» exercées sur les députés de la part de certains représentants des pouvoirs publics. Des «éclats» signalés dans ces colonnes faisaient état de mémorables prises de bec entre le ministre des Finances et certains députés, membres de la commission des finances. Benachenhou, qui semble refuser tout débat contradictoire, a plusieurs fois claqué la porte bruyamment, avant de subir un malaise qui a nécessité son transport à l'hôpital. Les «parades» de Benachenhou De fait, ce n'est pas le seul grief retenu contre les responsables de l'APN. Ceux-ci ont programmé les votes durant la nuit. Les séances dureront ainsi entre 20 et 6 heures du matin. Nos sources y voient là « une volonté délibérée de fatiguer les députés, de favoriser l'absentéisme et de faire en sorte que l'essentiel de la loi Benachenhou soit préservé». Les députés, sont de plus en plus nombreux à se montrer «mécontents» de l'épée de Damoclès de la dissolution pendant sur leur tête, évoquent l'unique fois où le président a daigné honorer de sa présence l'hémicycle dans l'unique but, hélas, «de demander un blanc seing aux représentants directs de la souveraineté et de la démocratie populaire». Dans tous les cas de figure, et même si rien n'est fait pour remédier à cette situation dommageable pour la crédibilité de cette institution législative, il faut s'attendre à de chauds débats lors de la séance de ce lundi soir, ce qui ne laissera pas de mettre à nu toutes les régressions enregistrées dans le fonctionnement démocratique de l'APN en un laps de temps très court.