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L'ultime note du maître
BOUDJEMAÂ EL ANKIS EST DECEDE MERCREDI À L'ÂGE DE 88 ANS
Publié dans L'Expression le 05 - 09 - 2015


Boudjemaâ El Ankis le novateur
Marginalisé par ceux qui en ont fait autant avec Hadj M'hamed El Anka, il ne s'en était jamais plaint préférant la pratique honnête de son métier et la discrétion aux dérives sémantiques.
Il est parti, sur la pointe des pieds, cet enfant terrible du chaâbi qui est passé, de son vivant, de l'interprétation traditionnelle à un signifiant modernisé, sans transition aucune. Sa rencontre avec l'auteur, compositeur et musicien Mahboub Bati aura désarçonné plus d'un puriste. Le temps d'une adaptation puisque Boudjemaâ El Ankis n'avait pas changé d'un iota sa manière toute de conviction de restituer des pans importants du patrimoine porté, bien avant lui, par ceux que l'on nommait à l'époque les «meddahine». Digne héritier de Hadj M'hamed El Anka, Boudjemaâ avait cette particularité de s'être forgé très tôt une personnalité artistique digne de ce nom. Une référence, convient-il de souligner, une façon toute personnelle d'investir un champ musical que l'inexorable horloge du destin n'a pu entamer, emporter. Dans un milieu à tout le moins égocentrique, il était parmi les rares à témoigner respect, révérence et reconnaissance aux maîtres du chaâbi qui l'avaient précédé, avec à leur tête le Cardinal, Hadj M'hamed El Anka ce maître incontesté qui avait su, jusqu'à sa mort, tenir tête et mépriser ces clercs qui en voulaient tant au chaâbi, à la citadinité qu'à la Casbah éternelle qui lui a donné naissance. Sur ce plan strictement, je n'ai jamais compris les raisons qui poussaient El Ankis à lier l'historiographie de la musique populaire chère à la médina d'Alger au village d'origine de son père (je veux parler de Azzefoun) et au patrimoine «moghrabi», donc marocain.
L'enfant de la Casbah
Il est vrai que certains esprits chagrins avaient déroulé le tapis des impostures en prenant un curieux raccourci, traduisant toute honte bue Azzefoun par «Al Aâzifoun» (comprenez musiciens). Alors que le nom de cette localité veut tout simplement dire langouste, Azzefoun étant à l'époque un port où l'on pêchait énormément ce crustacé le plus recherché des gourmets de par la finesse de sa chair. Par ailleurs, ce n'est pas parce que le chaâbi a repris quelques poèmes du répertoire marocain, le royaume en a fait autant avec les poètes tlemcéniens, que l'identité algérienne de ce patrimoine devait être sacrifiée sur l'autel de quelques inexactitudes opportunistes, mues le plus souvent par l'approximation lorsqu'il ne s'agit pas de l'ignorance. Cela souligné, en guise d'honnêteté intellectuelle, je suis de ceux qui appréciaient énormément ce chanteur originaire, tout comme moi, de cette merveilleuse médina d'Alger. Depuis mon enfance, convient-il de souligner, à un moment surtout où cet artiste contribuait à sa manière au raffermissement du sentiment national. Il ne pouvait en être autrement tant il tenait à ce sentiment qu'il voulait à tout prix amplifié, restitué habilement à travers sa manière d'interpréter ses chansons irriguées le plus souvent par un signifié en liaison étroite avec la réalité sociale de l'époque: «La Casbah, un lieu, une histoire, une légende du chaâbi. J'y suis né. Je suis un enfant de la Casbah! C'est le quartier séculier d'Alger. La Casbah a été un giron ayant enfanté un grand nombre d'artistes. Dans le chaâbi, classique, kabyle... Et puis, le chaâbi avait pris le dessus et brillé. C'est à Bir Djebbah que ça se passait. Un endroit que je qualifie de " capitale " de la Casbah. C'est de là que sont issus Hadj M'hamed El Anka, Hadj M'rizek, Hadj Menouar, Amar El Achab, Omar Mekraza... Cela paraît bizarre, peut -être que je suis le seul à dire cela.» Sans nul doute possible, il était le seul à avoir fait cette relation, sauf qu'il a oublié de citer Mustapha Toumi, l'auteur de Sobhane Allah Yaltif, ou encore, dans un autre registre, Omar et Mohammed Racim nés tous deux, tout comme moi, à la rue du Chameau (devenue Rue des Frères Racim). Pour vous dire, dans une sorte d'ellipse où la flagornerie fera bon ménage avec la mauvaise foi, que Boudjemaâ Al Ankis est directement venu au chaâbi, serait vous induire en erreur. Bien avant qu'il ne se mette à gratter sur le mandole qu'il serrait constamment contre son coeur, il fut tout d'abord enchanté et séduit par le «gnibri» qu'il découvrit incidemment chez un vieux luthier de Bir Djebbah. Enfant qu'il était, il n'avait pas été pris au sérieux, de prime abord, par l'artisan qui mit beaucoup de temps pour lui en confectionner un pour la bagatelle d'un douro (5 francs, c'était de l'argent à l'époque). S'agissant du premier chanteur qui eut le mérite de séduire l'oreille musicale de cet enfant, alors âgé de huit ans, vous allez être surpris: «Le premier chanteur qui a flatté mon oreille est un chanteur français. C'était Tino Rossi. C'est étonnant! Ce n'est qu'après que je fus inspiré par des chanteurs de chaâbi.»
Comme El Anka
Les révélations d'Al Ankis, faites à une chaîne de radio périphérique, démontrent à l'évidence, que durant la période coloniale les Algériens étaient particulièrement réceptifs et ouverts à toutes les interprétations musicales, de l'Orient pour les uns comme de l'Occident pour bien d'autres. Ils étaient tellement impliqués, que le compositeur et ethnomusicologue hongrois Béla Bartók, en voyage d'études en Algérie, eut ce cri de coeur: «On ne peut mieux chanter que dans l'arbre généalogique de son peuple.» Du gnibri, il passera allègrement à la mandoline à un moment où il ne rêvait pas encore d'une carrière artistique.
C'est incidemment qu'il découvrira le monde du chaâbi grâce à Mohamed Kebaïli et les rudiments d'un métier qui le passionnera toute sa vie. Il avait à peine 14 ans lorsqu'il fit son baptême du feu à la suite de l'absence d'un musicien attitré de l'orchestre. C'est ainsi que commença Hadj M'hamed El Anka dans celui de Cheikh Nador. Une substitution qui le plongera dans un monde magique durant plus de 66 ans. Et c'est assurément, nous révèle K. Smaïl, la première chanson qu'il apprit, Aâla R'soul El Hadi Sali Ya Aâchik de cheikh Saïd El Meddah, qui le fit découvrir au monde des puristes. Même s'il ne se destinait pas à une carrière artistique, le merveilleux interprète d'El Kaoui ne s'empêchait pas d'apprécier les maîtres d'antan parmi lesquels il est aisé de citer El Anka et M'rizek. La personnalité qu'il aura forgée tout au long de sa carrière artistique lui permettait d'être éclectique à souhait et d'introduire des variations rythmiques empruntées le plus souvent à des musiques occidentales et latino-américaines. La même démarche il l'empruntera pour le choix des poèmes où Ibn Sahle, Ibn Triqui, Ibn M'saïeb, Kaddour El Alami et Benguitoune occuperont une place de choix dans son répertoire professionnel. Cet éclectisme n'aura cependant pas raison de ses aspirations en liaison étroite avec la réalité sociale. Il en fait la confidence à ChaâbiDZ:
«J'aime les choses sérieuses. Je n'ai jamais chanté n'importe quoi. Le social était ma préférence. Parce que cela touche tout le monde. Nous étions sous domination coloniale française. Nous étions tous concernés. Et le chaâbi a contribué dans le message patriotique et nationaliste. En 1945, l'on faisait clandestinement de la propagande messaliste pour le compte du PPA, notamment à l'occasion des mariages et autres fêtes.» Boudjemaâ El Ankis connaîtra les affres des geôles et de la torture française avant de reprendre de plus belle dès les lendemains de l'indépendance pour se tailler une carrière artistique des plus exemplaires. Marginalisé par ceux qui en ont fait autant avec Hadj M'hamed El Anka, il ne s'en était jamais plaint préférant la pratique honnête de son métier et la discrétion aux dérives sémantiques. Il est né le 17 juin 1927 à la Casbah d'Alger et rendra l'âme à l'âge de 88 ans, le 2 septembre à Alger où il sera enterré, à El Kettar plus précisément et sur les hauteurs de cette Casbah éternelle à laquelle il tenait tant.


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