De nombreuses zones industrielles sont détournées de leur vocation première Le gouvernement compte transférer la gestion du foncier industriel aux walis «dans l'objectif d'encourager les investissements», dit-on. Le foncier industriel, qui constitue un abcès de fixation pour l'ensemble des businessman algériens, sera désormais confié aux walis après avoir été géré durant plusieurs années par le Comité d'assistance à la localisation et la promotion des investissements et de la régulation du foncier(Calpiref). Cette décision, discutable à plus d'un titre compte tenu des réactions qu'elle a suscitées au sein de la classe politique nationale et du patronat, a été prise dans le cadre du processus de diversification de l'économie nationale... Selon Azzeddine Kerri, directeur des finances locales au ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales, a affirmé, dans un entretien accordé à l'APS, que «désormais, ce foncier sera disponible car il sera à la charge des walis qui auront donc plus de responsabilité et plus de liberté pour promouvoir l'investissement». Pour ce responsable, le gouvernement a fini par comprendre que les collectivités locales doivent devenir un vrai moteur de création de richesse et d'emplois à travers la promotion de l'investissement local. Néanmoins, le point de vue du gouvernement sur cette question ne fait pas l'unanimité. En effet, si Ali Haddad, président du FCE, a recommandé, dans le rapport qu'il a remis au Premier ministre, que les zones industrielles doivent être la propriété privée de l'investisseur après 5 ans d'exploitation, ce qui contredit la mesure proposée par le gouvernement dans la loi de finances de 2016, à savoir la cession pour une période de 99 ans du lot à l'investisseur, la patronne du PT, Louisa Hanoune, a dénoncé cette mesure comme une sorte de décentralisation de la prédation. Selon elle, «il est simplement question de faciliter l'accès au foncier aux oligarques». Dans ce sillage, elle a dénoncé cette mesure dont elle exige «l'annulation immédiate» Néanmoins, ce qui est intrigant dans la gestion du foncier industriel, ce n'est pas tant le moyen d'y accéder puisque les zones industrielles des grandes villes, notamment Alger, Oran, Setif, Annaba, Blida et Béjaïa sont saturées, mais l'usage qui en est fait. Dans le discours du gouvernement, il est dit que la diversification de l'économie passe par la réhabilitation des zones industrielles, l'affectation des assiettes foncières qui ne sont pas exploitées, la facilitation de l'accès au foncier à travers une débureaucratisation de la procédure, ainsi que la création de nouvelles zones industrielles et zones d'activités. Or, l'usage qui est fait de celles qui existent déjà suscite mille et une interrogations. En effet, détournées de leur vocation initiale, les zones industrielles et d'activités, y compris les plus prisées comme celles de Dar El Beïda, Rouiba, Blida, Oran et Sétif, sont affectées à des concessionnaires automobiles et autres importateurs qui ont en fait de vrais dépotoirs pour les marchandises qu'ils importent. C'est le cas, par exemple, de la zone industrielle de Oued Smar à Alger et de Oued Tlélat à Oran. Dans certains cas, notamment au niveau des zones d'activités sises dans des endroits relativement isolés, les assiettes foncières sont carrément exploitées par la construction de résidences privées par certains bénéficiaires, comme c'est le cas dans la zone de Hadjout dans la wilaya de Tipasa. C'est le cas aussi dans la zone d'activités d'El Achour à Alger où le foncier a été détourné pour la construction de commerces (supérette, salle des fêtes, etc.). A quoi rime donc la décision du gouvernement de transférer la gestion du foncier industriel aux walis en fixant à cette entreprise l'objectif de diversifier l'économie nationale et encourager les investissements? Le foncier déjà affecté n'étant pas utilisé à bon escient, n'est-ce pas une fuite en avant que de parler du reste avant d'assainir la situation, d'autant plus que les zones industrielles qui ont été détournées de leur vocation sont les plus prisées? Est-ce le Calpiref, la gestion actuelle du foncier industriel, qui bloque la situation et qui fait que la majorité des zones industrielles du pays sont des aires de dépôt des importateurs? Il est vrai qu'il existe des zones industrielles opérationnelles et dont plus de 90% des activités relèvent effectivement de l'industrie. Il est possible de citer, à titre d'exemple, le pôle industriel agroalimentaire de Taharacht à Akbou, le pôle d'industrie électronique de Bordj Bou Arréridj, la zone de Ghardaïa, la zone d'El Eulma, etc. Mais, globalement, il est inapproprié de parler de zones industrielles en Algérie, encore moins d'industries puisque, objectivement, tout est encore à construire.