La décomposition des groupes armés a aussi généré des actes de violence dont les objectifs restent illisibles. Le mois sacré de Ramadan a été particulièrement meurtrier en comparaison avec celui de l'année 2003, au cours duquel aucun assassinat n'a été enregistré. Cependant, le plus inquiétant n'est pas tant dans cette compatibilité macabre, mais dans l'expansion, les nouvelles formes et les stratégies développées par un terrorisme sur le déclin, certes, mais qui reste encore très actif dans pratiquement tout le pays. Le pic de violence a été atteint dès le début du Ramadan avec l'assassinat de seize personnes, citoyens de la localité de Bouarfa, située dans les contrebas de la Mitidja, qui s'étaient aventurées dans la forêt de M'sennou, dépendante de la commune de Hamdania. Cet acte de violence révéla aux services de sécurité que le crépusculaire GIA existait encore, dépéri, certes, avec moins d'une vingtaine d'hommes armés, disséminés dans le triangle Blida-Médéa-Khemis Miliana. Si la capitale et les grandes villes avaient été au centre des soucis des forces de sécurité qui y ont tissé un maillage très hermétique, elles ont été aussi au centre des stratégies terroristes. Plusieurs tentatives d'incursion de la part du Gspc ont été enregistrées tout le long du mois sacré, avec notamment deux guet-apens réussis, l'un à Bordj El Bahri, avec l'assassinat de deux élus communaux, l'autre en plein centre-ville de Jijel, incursion au cours de laquelle un policier et un civil ont été tués par un groupe armé qui circulait à visage découvert. Ce taux relativement réduit de réussite des groupes armés n'a pas entamé la stratégie sécuritaire des responsables des structures chargés de la contre-insurrection. Car tout se mesure par rapport aux actes de violence perpétrés à Alger, et dans ce cas, les actes liés aux terroristes ont été dérisoires. Douze ans de lutte contre-insurrectionnelle ont démontré que la guerre peut être gagnée par de petites opérations. Pour cela, la police, la gendarmerie, les Groupes de légitime défense (GLD) et les gardes communaux continuent d'enregistrer de petits succès, en «nettoyant» une crête, en tuant un ou deux terroristes, en sécurisant une dechra ou une mechta, ou en démantelant une cellule de soutien. Ces petites opérations de la lutte antiterroriste sont, en fait, la base de la guerre au quotidien qui se déroule à huis clos, loin des médias. Les attentats, que perpètre le Gspc à l'est, à l'ouest, au centre et au sud du pays font aussi partie de cette petite guerre qui continue en Algérie de faire rage. La chasse aux forces de l'ordre fait florès parmi les hommes du Groupe salafiste, et à Timimoun, à Jijel, à Relizane, à Tizi Ouzou et la périphérie d'Alger, la chasse aux policiers et aux gardes communaux reste très forte. La Gendarmerie nationale, qui a été épargnée depuis le massacre de huit gendarmes dans une embuscade tendue à l'est de Béjaïa par le groupe de Nabil Sahraoui et Abi Abdelaziz, au début de l'été, a enregistré trois assassinats de gendarmes, perpétrés par le groupe de Mokhtar Belmokhtar à 800 km au sud d'Alger, dans une zone qui n'a pas connu d'actes de violence semblables depuis plusieurs années. Basse intensité, recrudescence, éclaircie, dégradation et embellie sécuritaire, le terrorisme n'a pas une lecture cohérente et ne permet pas d'en faire une idée précise. La décomposition des groupes armés a généré une violence dont les objectifs restent très illisibles.