Mois d'intensification du djihad dans l'imaginaire islamiste, le Ramadan de cette année aura, finalement, confirmé la grande désintégration des groupes armés. Un attentat à Larbâa au début du Ramadan, un autre plus important à Aïn Defla puis un dernier à Beni Mered ont bouclé un mois, émaillé, ici et là, il est vrai, d'assassinats individuels. En tout, quelque 70 citoyens tués, en majorité dans des bourgs isolés ou des faux barrages dressés à la hâte, à la faveur de l'obscurité. Comparativement aux Ramadan vécus en Algérie depuis 1992, celui de cette année est sans conteste, et de loin, le moins meurtrier, bien qu'il soit toujours bon d'affirmer que «soixante-dix morts, c'est peu». A titre de comparaison, le mois de Ramadan de l'année passée a fait près de 350 tués, dont une centaine dans les rangs des groupes armés et une psychose dans plusieurs villes du pays. Le mois sacré des années 93, 94, 95 et 96 ont été autant d'hécatombes, car survenues au fait de la force des groupes armés, les GIA notamment. L'un des attentats les plus saillants survenus entre le 16 novembre et le 15 décembre 2001 a été celui qui a coûté la vie à quatre personnes à Larbaâ, fief des repentis de l'ex-AIS, le même jour où une bombe fut désamorcée dans la mosquée El-Islah de la même ville. Le plus important attentat fut perpétré le 6 décembre à Arib, dans la périphérie de Aïn Defla. Une incursion terroriste à la nouvelle cité des relogés y a fait 17 morts et 4 blessés. Quelques jours plus tard, le même groupe, apparemment, commet un autre massacre, toujours à la périphérie de Aïn Defla. Bilan: 2 morts et 2 blessés. A Jijel, autre fief des trévistes de l'ex-AIS (élément d'appréciation à saisir au vol), un attentat terroriste a fait quatre morts, comme à Larbaâ. Les derniers jours du Ramadan ont été particulièrement sanglants avec trois attentats perpétrés presque simultanément à Chlef, Boumerdès et Blida, faisant huit morts, dont le président d'APC de Ouled Aïssa (Naciria) et son deuxième adjoint. La capitale, qui accueillait le Ramadan six jours seulement après la catastrophe du 10 novembre, a été particulièrement visée. Mais hormis l'attentat à la bombe, perpétré à Tafourah, le 20 novembre, à un arrêt de bus fréquenté par les étudiants, qui a fait plusieurs victimes, dont une devait succomber quelques jours plus tard, il n'y eut pas de fait majeur. Et ni encore moins une psychose d'attentats à la bombe ou à la voiture piégée. Les habitants ont jeûné et veillé de façon normale, sous l'oeil vigilant des services de sécurité. Le déploiement des forces de l'ordre du plan «Ramadan fi aman», initié par la gendarmerie le long des axes périphériques d'Alger, le maillage rigoureux des militaires sur les grandes artères routières (La Chiffa-Médéa, Blida-Khemis Miliana, etc.) ont-ils eu à ce point raison des groupes armés? Ou est-ce plutôt un indice qui reflète la désintégration complète de ces derniers? Les deux raisons sont à retenir, si l'on songe aux méthodes rudimentaires utilisées par les GIA dans les attentats : des bombes artisanales de faible portée, qui renseignent à un retour aux années d'avant-1992. Alger, qui reste la hantise des GIA, a traversé ce Ramadan sans trop de dégâts, n'eût été la catastrophe causée par les intempéries. Toutefois, rien n'est encore dit en matière de terrorisme, qui, somme toute, reste tributaire d'une grande quantité de facteurs aussi illisibles qu'invisibles.