La famille de Claudine Chaulet et d'anciens responsables de l'Etat «Claudine Chaulet s'est totalement identifiée à l'Algérie», a déclaré Réda Malek, ancien chef de gouvernement. L'atmosphère était à la tristesse et au recueillement, dans l'après-midi d'hier, au cimetière chrétien de Diar Essaâda, sur les hauteurs d'Alger. Quitter, trois années presque jour pour jour après avoir assisté au départ de Pierre, son mari, une autre grande figure de la lutte de Libération nationale et de la bataille de l'édification nationale qui s'en est suivie, l'indépendance acquise, n'a pas été, en effet, chose aisée pour la nombreuse assistance qui a accompagné Claudine Chaulet à sa dernière demeure; la même qu'occupe son mari et qui a la particularité d'être située, en réponse à un voeu exprimé avant sa mort par celui-ci, juste à côté de la tombe d'Henri Maillot, un authentique martyr de la guerre de Libération nationale, comme les Chaulet, d'origine européenne. Une origine qui ne met que davantage en valeur leur engagement total - qui est allé jusqu'au martyre pour l'aspirant Maillot - en faveur, pour reprendre les propos de Réda Malek qui a prononcé en la circonstance une poignante, parce que sincère, oraison funèbre, de leur «patrie d'élection». «Claudine Chaulet s'est totalement identifiée à l'Algérie», a déclaré l'ancien chef de gouvernement. Durant la guerre de Libération nationale, a-t-il rappelé, «en n'hésitant pas à mettre en péril sa vie pour accomplir des actions au profit de la Révolution». Et après l'indépendance, «en s'engageant, en sa qualité d'universitaire et de femme de sciences, à la connaître à fond». Des propos qui ont poussé le fils aîné des Chaulet à chaleureusement remercier Réda Malek d'avoir rappelé que «la valeur des hommes ne tenait pas à leurs origines mais à leurs convictions et à la sincérité de leur engagement en faveur de la cause qu'ils ont épousée...» Sincérité dans l'engagement et dans les convictions que tous ceux avec lesquels nous nous sommes entretenus hier, l'ont reconnue non pas à Claudine Chaulet uniquement mais également à son mari Pierre. C'est le cas de Nourredine Djoudi et de Youcef Mehenni, des diplomates, aujourd'hui, à la retraite et anciens membres de l'ALN, qui ont connu Pierre Chaulet lorsqu'il était médecin dans les camps de l'ALN en Tunisie et du professeur Anissa Brahimi Errahmani, une ancienne collègue de Claudine Chaulet au département de sociologie de l'université d'Alger. Tous ont surtout insisté sur leur action après l'indépendance du pays pour mettre en exergue la profondeur et la sincérité de cet engagement. A propos de Pierre Chaulet, en rappelant «son immense contribution à la mise en place du système de santé national et au programme de lutte et d'éradication de certaines maladies, telle la tuberculose, dont souffraient une bonne partie de la population dans les premières années du recouvrement de la souveraineté nationale». Et pour Claudine Chaulet, en faisant de même pour ce qui est «de sa contribution au développement de la sociologie dans notre pays et, partant, à la formation de plusieurs générations de sociologues». Un avis largement partagé par nombre de présents, parmi leurs anciens compagnons, de lutte et de travail, qui, en la circonstance, ont, tous, grandement déploré un fait qu'ils ont jugé des plus déplorables au regard de l'engagement précité de Pierre Chaulet en faveur de l'Algérie, son pays.: «Trois années après la disparition de cet homme remarquable, on n'a toujours pas pensé à baptiser de son nom le moindre amphithéâtre d'un quelconque institut de médecine du pays...», nous ont-ils, en effet, déclaré. Non sans un brin d'amertume dans la voix. Un déplorable oubli qui, a-t-on appris, sera très bientôt corrigé (voir encadré ci-contre). Pour en revenir à l'enterrement de Claudine Chaulet, il s'est déroulé en présence, outre celle des membres de la famille de la disparue, d'un grand nombre de ministres, parmi lesquels ceux des Moudjahidine, de la Communication, de la Santé et de l'Agriculture, du wali d'Alger, de quelques chefs de formations politiques, du secrétaire général de l'ONM, de nombreux universitaires, de représentants de la famille de la presse, dont le directeur de notre journal, Ahmed Fattani et d'un nombre appréciable de citoyens anonymes... Un hôpital portera le nom de Pierre Chaulet Plusieurs compagnons de lutte et de travail de Pierre Chaulet que nous avons rencontrés hier, lors de l'enterrement de Claudine Chaulet, n'ont pas manqué de nous faire part de leur amertume face à l'incompréhensible «oubli», trois années après la disparition de ce grand homme qui a tout donné à l'Algérie, des autorités publiques de baptiser de son nom, au moins, un amphithéâtre dans un quelconque institut de médecine du pays. Une préoccupation que nous avons transmise, illico presto, au ministre de la Santé, Abdelmalek Boudiaf, à son arrivée au cimetière chrétien de Diar Essaâda, sur les hauteurs d'Alger. La réponse de ce dernier ne peut qu'être réjouissante pour ceux qui ne comprenaient pas «l'oubli» précité: le nom de Pierre Chaulet sera, très bientôt, donné à un hôpital de 150 lits qui sera inauguré dans les tout prochains jours à Alger...