Pour Philippe Breton, la communication est une utopie. Elle n'est ni idéologie ni vision humaniste, ce qui ne l'empêche pourtant pas de gérer la vie des hommes avec une influence des plus terrifiantes. Philippe Breton est un nom que les étudiants en sciences de l'information et de la communication devraient connaître. Casbah, en plus de se porter éditeur en Algérie de l'une des oeuvres de ce chercheur, fait paraître, du même coup, et dans un élan de souci académique, deux autres recherches dans le domaine de la communication, qui ne manqueront pas de constituer une référence incontournable pour les étudiants et les intéressés. Le premier de cette livraison, Philippe Breton avec L'utopie de la communication, donne une autre vision sur ce nouvel aspect de la planète: un archipel interconnecté à outrance où la communication devient une fin en soi faisant peu état du contenu qu'elle charrie. Si la communication est devenue de nos jours un terme usuel et même incontournable, son émergence a nécessité bien des pérégrinations intellectuelles. Mené par le mathématicien Norbert Weiner, au début des années 40, un groupe de scientifiques allait établir les fondements d'un concept qui a encore du mal à être cerné et défini : la cybernétique. Philippe Breton ne réussit pas plus que les autres à lui donner une définition apte à rassasier les plus curieux, mais il rendra compte du moins de l'esprit qui anima ces illuminés d'un nouvel idéal. Bien que la cybernétique n'ait pas fait long feu, il demeure que les premiers textes qui ont sanctionné les réunions de ces scientifiques versés dans les disciplines les plus diverses, témoignent de l'importance d'une telle démarche dans la construction du monde que nous connaissons. Dans ce petit groupe de réflexion, on pouvait trouver, entre autres, un cardiologue, un neurologue, mais aussi un mathématicien et un physicien qui croyaient tous en la possibilité de dresser une toile cognitive réunissant tous les phénomènes humains et physiques connus. De cet idéal, ne subsiste aujourd'hui que ce qu'on appelle la communication. Philippe Breton concentre son analyse après cette introduction sur le constat qu'il a fait de l'explosion des courants appelant à l'exclusion et à l'épuration, xénophobie en tête, aidés en cela par une communication galopante. En plus d'être d'un apport documentaire certain, Breton propose avec L'utopie de la communication une lecture à contresens du phénomène. Pour lui, la communication est d'abord une utopie. Il dénonce le statut ambigu qu'elle acquière, à mi-chemin entre l'idéologie et la vision humaniste, mais qui ne gère pas, avec moins d'influence, la vie des hommes. Continuant sur la même lancée, Casbah Editions met à la disposition des plus gourmands Une histoire de la communication moderne- Espace public et privé de Patrice Flichy, qui retrace la société de la communication depuis le télégraphe jusqu'au téléphone sans fil, et L'explosion de la communication de Serge Proulx et Philippe Breton, encore lui, pour un état des lieux de la communication d'hier et d'aujourd'hui. Avec ce redoutable trio d'ouvrages, le sujet se trouve plus éclairé que jamais.