Les premières victimes de Daesh sont d'abord les musulmans Il y a dans l'attitude de la classe politique française une forte dose de pragmatisme et il semble que la leçon des attentats de Paris ait été retenue. Ponty, une petite ville normande, a vécu samedi dernier, des événements particulièrement violents en relation directe avec les attentats de Paris. Un groupe d'extrême droite s'en est pris à tous les habitants de la ville d'origine maghrébine. Les ultras qui organisaient une manifestation anti-étranger ont pris prétexte de l'actualité terroriste en France pour organiser une vraie chasse au musulman dans cette petite ville qui a vécu des scènes très dures, racontent de nombreux témoins. Cette poussée de fièvre raciste est, bien entendu, le pire scénario de l'après attentat. Pareil scénario a été vécu dans l'Hexagone, au lendemain de l'attaque qui a ciblé le journal Charlie Hebdo. L'on rappellera que les actes islamophobes avaient progressé de plus de 100%, en l'espace de quelques semaines seulement. La stigmatisation n'était pas seulement sociale, elle était aussi le fait de personnalités politiques de droite et d'extrême droite qui ont joué sur l'amalgame islam-islamiste et monté toute une théorie de guerre de civilisations qui se déroulerait en France. Les attentats de vendredi dernier constituent un autre motif pour poursuivre la campagne anti-islam, sauf que pour cette fois, tous les médias français ont soigneusement pris le soin d'éviter tout discours tendancieux, au point où il n'a jamais été question d'évoquer les origines ethniques des terroristes du moment que ceux-ci étaient français. L'enquête a effectivement avancé dans le sens de l'identification de trois terroristes, avec la précision que ces derniers étaient tous nés et ont vécu en France. Leur nationalité n'a donc pas fait de doute. L'on comprend que les autorités françaises et, au-delà, la société pensante française refuse de tomber dans le piège que lui tend Daesh que visiblement des groupes d'extrême droite de Ponty voudraient l'y précipiter. Le débat politique en France s'oriente justement vers la fin de l'amalgame. Gauche et droite, soutiennent la thèse que Daesh est une secte terroriste et que les populations musulmanes de France ne doivent pas souffrir plus que d'autres des agissements de cette organisation en France. En d'autres termes, les politiques veulent faire triompher les idéaux de la République française et élever la citoyenneté au-dessus des religions. Cette approche n'est pas mue par le seul souci de sauvegarder la dignité des musulmans, mais participe de la nécessité stratégique de compter les millions de musulmans de France dans le camp des autorités dans sa lutte contre le terrorisme. Il y a dans l'attitude de la classe politique française une forte dose de pragmatisme et il semble que la leçon des attentats de Paris ait été retenue au plan de la politique intérieure. Il reste que la stratégie de la diplomatie française, plutôt guerrière dans le Proche-Orient, pourrait réduire de l'efficacité de la démarche à l'interne. Mais en tout état de cause, il devient clair que pour la France, battre Daesh n'est pas une affaire d'armée, mais c'est dans la conjugaison de tous les efforts, et surtout celle des musulmans que la guerre contre le terrorisme pourra être gagnée. Il n'est un secret pour personne que jusque-là, ce sont principalement les musulmans qui constituent le gros des victimes de Daesh et des autres organisations terroristes islamistes. La stratégie semble être esquissée, mais rien ne dit que l'Etat français dispose des leviers nécessaires pour mener à bien sa stratégie anti-Daesh en France. L'extrême droite reste un acteur déterminant dans le paysage politique français et à quelques semaines d'élections régionales, il n'est pas dit que «la hantise» française ne s'exprime pas publiquement au point de donner à Daesh, matière à exploiter la détresse des musulmans de France. En fait, ce qui s'est produit dans la petite ville de Ponty peut remonter jusqu'à Paris et réduire à néant tout le discours «politiquement correct» de l'Intelligentsia française. De là à dire que la vraie guerre contre l'organisation terroriste est d'abord franco-française, il n'y qu'un pas que nombre d'observateurs n'hésitent pas à franchir. Les vrais ennemis de la France sont ses démons