oeuvres du Cubain Eduardo Miguel Abela Torras L'exposition rendue du travail de résidence artistique algéro-cubain sera montrée dans sa totalité la semaine prochaine. Le tropique du Cancer est l'un des cinq parallèles principaux indiqués sur les cartes terrestres. Ce dernier relie aussi l'Algérie à Cuba, deux pays frères qui furent les Mecques des révolutions dans le monde. Pour raviver leurs relations quoi de mieux que l'art pour faire rapprocher à nouveau les gens quand la géographie les en éloigne. Qu'à cela ne tienne! Une résidence d'artistes a vu le jour entre l'Algérie et Cuba laquelle a pour objectif de réaliser une exposition, placée sous l'égide de l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (Aarc). Dans un premier temps, ce sont huit artistes algériens qui se sont envolés vers Cuba en juin dernier et y sont restés dix jours. Ils ont sillonné La Havane et Trinidad. Ces derniers sont le plasticien Djaoudet Guessouma, le photographe Halim Zenati, la photographe Besma Khalfa, les plasticiennes Souad Douibi et Thilleli Rahmoun, le vidéaste photographe Samir Abchiche, le plasticien Karim-Nazim Tidafi et enfin le photographe initiateur du projet Karim Abdesselam. Côté cubain, ce sont trois artistes qui sont venus travailler en résidence à Dar Abdellatif du 6 au 25 décembre 2015. Samedi devait être le vernissage de cette belle exposition qui verra plus tard l'organisation d'un concert avec Amazigh Kateb qui a fait également partie du voyage à Cuba. Mais ceci est une autre histoire qui se raconte en plus par les mots en rythmes et en musique. En attendant, c'est celle par l'image qu'eut lieu samedi, quoiqu'en partie. En effet, la disparition du grand Hocine Ait Ahmed a fait chambouler toutes les donnes. L'expo qui devait être annulée a été en partie maintenue. Ainsi, le public a pu assister samedi dernier à un vernissage «succinct» de cette exposition tronquée pour le coup, car une partie des artistes ayant choisi d'observer le deuil, reporter l'expo et d'autres non. «Petit problème d'organisation», avouera à demi-mot la responsable du département Arts plastiques et néanmoins commissaire de cette exposition qui nous présentera en préambule un des participants à cette belle aventure humaine et plastique. Il s'agit de Samir Abchiche qui fera remarquer que ce voyage à Cuba «n'était pas le meilleur mais le plus spécial, qui lui a été donné de vivre, où il a pu découvrir un peuple nouveau, une culture nouvelle, une ville marquée par une avalanche de couleurs, d'images. On ne voulait plus dormir tant on refusait de rater une miette de cette ville et ces habitants sachant qu'on allait bientôt rentrer...» «Un pays joyeux tout simplement», dira pour sa part Myriam Aitelhara pour résumer, soulignant par ailleurs la forte abondance de l'art que l'on peut croiser dans n'importe quel coin de rue, de maison, saluant encore leur riche production locale, malgré l'embargo dont les Cubains font l'objet. «Notre voyage a coïncidé en effet avec les accords de coparticipants algéro-cubains et la biennale de La Havane. Les Cubains c'est un peuple d'artistes. Ils nous ont dit qu'ils vivent encore dans les années 1950. On nous appelle les riches. Ils ont développé un vrai savoir-faire. Et ils sont satisfaits d'eux -mêmes. Lors de nos pérégrinations à travers les quartiers populaires, car il faisait chaud, on marchait beaucoup dehors, on s'est rendu compte qu'il y avait beaucoup de similitude avec Alger, notre architecture...» Ce sont en effet pour la plupart des vues de badauds, de gens qui se promènent dans la rue qui sont le plus restituées dans la plupart des photos que nous avons eu à explorer durant cette expo. Karim Tidafi a choisi le prisme de la nuit pour se laisser guider à l'intuition et de saisir les instantanéités de la vie cubaine dans son quotidien nocturne. Ses photos reflètent bien une certaine atmosphère épicée, rehaussée de ce grain de teinte ocre qui impute vie et chaleur humaine à ces photographies. Pour sa part, Samir Abchiche a préféré immortaliser par son objectif le jour cubain, par ces portraits d' hommes et femmes rivés dans leur monotonie, au bas de leur porte et cet intérieur de maisons vides, volets de fenêtres ouvertes laissant passer une lumière quêtant une hypothétique fraîcheur en ces chaudes journées de juin. Le photographe a su capter surtout une certaine forme de mansuétude doublée de sérénité, dans lesquelles coulent paisiblement ces gens et évoluent dans une certaine torpeur dynamique mais positive. Lola Besma Khalfa quant à elle, poursuit sa démarche de juxtaposition des images pour intercepter l'évanescence du mouvement des gens et partant, nous faire ressentir leur aura, par une sorte de voile qui se dégage de ses photos qui mêlent plusieurs visions à la fois, le tout en couleurs, ce qui donne encore plus de relief et de bonhomie à ses photos qui respirent la joie de vivre. Un Cubain cette fois, Rancano Vieites Ernesto Mateo a dans sa vidéo intitulée «L'ombre de l'air» nous donne à voir une paire de chaussures, féminité par terre, placée à hauteur d'un reflet humain, celui d'un corps féminin, dont la robe et les cheveux bougent au gré du vent. Une simple vision de grâce et d'harmonie rendue possible à l'aide d'un data show et un écran. Un hors champ qui n'est que poésie et sublimation de cette terre belle et ouverte qui se laisse bercer par les vents, une féminité ondoyante loin des clichés et stéréotypes que l'ont connaît de la femme latino par exemple. Un autre artiste cubain ayant réalisé son oeuvre à Alger est Eduardo Miguel Abela Torras qui a choisi de monter dans une fresque murale ce qu'il a retenu de notre ville en y injectant des objets de sa culture. Aussi, en plus de Riad El Feth on découvre ici un homme barbu, là-bas une femme voilée et puis l'Emir Abdelkader sur son cheval et puis d'autres détails et références culturelles drôles ou incongrus. Notamment sur une des toiles on peut lire «Excusez-moi je ne parle pas français». Souad Douibi, quant à elle, nous surprend par son triptyque pictural, bien amusant et coloré où l'on découvre sa célèbre poupée, recouvrant une fois ses yeux, puis ses oreilles et enfin sa bouche. Une oeuvre noyée de signes en langue arabe. Une expo qui nous laisse toutefois sur notre faim d'autant qu'elle n'a été présentée qu'à moitié. L'organisation aurait peut-être mieux fait de l'annuler tout bonnement? Elle sera en tout cas visible dans son intégralité, nous fera savoir Myriam Aitelhara, à partir de la semaine prochaine.