Mustapha Boutadjine, qui n'a plus besoin d'être présenté, pratique la mondialisation, c'est-à dire l'échange et le partage, en ouvrant pour une dizaine de jours son atelier-galerie, Artbribus à quatre artistes venus de Cuba. Paris De notre correspondante Cuba chez Artbribus à Paris». Par cette initiative qui s'inscrit dans le cadre des portes ouvertes du 13e arrondissement de Paris «Lézarts de la Bièvre», Martha Jimenez, Eduardo Miguel Abela Torras, Hector Frank Heredia Garcia et Orlando Ignacio Fernandez Merida, quatre plasticiens cubains, présentent leurs œuvres du 7 au 16 juin, pour la première fois à Paris, à l'initiative de Mustapha Boutadjine. Rebelle aux frontières de toutes natures, internationaliste par choix et idéal, comme il l'exprime dans ses innombrables expositions personnelles en France, en Algérie et dans de nombreux pays — Black is toujours beautiful, Insurgés, America Basta, Sous les pavés, le gitan, Femmes d'Alger en hommage aux figures emblématiques algériennes qui ont pris part activement à la lutte de libération nationale et à celles qui en France les ont soutenues et assistées devant les tribunaux — Mustapha Boutadjine soutient que c'est une «toute petite contribution pour abattre les murs des préjugés, de la méconnaissance, pour rapprocher les hommes les uns des autres». Et d'appuyer : «Pour s'exprimer, un artiste a besoin de respirer d'autres airs, de s'ouvrir et de se confronter à d'autres univers, d'autres modes de vie.» Ses hôtes cubains confirment et approuvent. Martha Gimenez vient de Camaguëy, elle est plasticienne et sculptrice. Avec 250 expositions personnelles et collectives à Cuba et dans d'autres pays, c'est une artiste connue et reconnue. Elle a reçu le premier prix de l'Unesco pour l'ensemble de son œuvre, en 1997. Son atelier fait partie des lieux que visitent les touristes qui se rendent à Cuba. Hector Frank Héredia, ingénieur électronicien de formation, en est venu à la peinture en autodidacte il y a une douzaine d'années et il s'y adonne complètement depuis. Sa spécialité, l'art figuratif, à partir des visages, et plus particulièrement des yeux que l'artiste considère comme la partie la plus expressive du corps humain, parce que, selon une expression populaire cubaine, «les yeux ne mentent pas», nous dit l'artiste havanais. Très doué de ses minutieux doigts et habile, Hector Frank Héredia récupère de vieilles portes et autres matériaux pour les transformer en objets d'art. L'artiste a déjà exposé en France mais jamais à Paris. C'est la première fois. Eduardo M. Abela Torras est fils et petit-fils de peintres. Son grand-père, consul en France, puis ambassadeur au Guatémala, était un peintre très connu. Influencé par Velasquez, l'artiste qui pratique le figuratif est considéré à Cuba comme un peintre qui manie un humour très fin, puisé dans l'histoire de Cuba, mais adapté à la réalité quotidienne. Les invités de Mustapha Boutadjine considèrent leur présence à Paris comme une précieuse opportunité pour faire connaître une facette de la culture cubaine si riche et diverse, d'échanger avec des artistes de Paris, de nouer des contacts avec des galeristes parisiens. Et aussi de pouvoir vendre quelques-unes de leurs œuvres car le marché à Cuba est limité du fait du pouvoir d'achat modeste des Cubains, les principaux acquéreurs restant les étrangers qui vivent à Cuba ou qui sont de passage. Quant à Mustapha Boutadjine, sa rencontre avec Cuba est ancienne, l'artiste fait, en effet, partie de cette génération d'Algériens qui ont été nourris de l'idéal des peuples en quête de leur émancipation du temps où l'Algérie était un réceptacle des mouvements de libération nationale. Cet héritage a contribué à forger l'art de Mustapha Boutadjine, qui prend plaisir à détourner les publicités, à déchiqueter en tous petits morceaux des couvertures de magazines féminins et people, au papier de premier choix, pour créer des portraits vivants de militants de la liberté et de la dignité humaine. Et sous les doigts les personnalités emblématiques qui ont porté le combat pour la liberté sont très nombreuses : Franz Fanon, Kateb Yacine, Maurice Audin, Tahar Djaout, Louis Aragon, Arthur Rimbaud, Martin Luther King, Nelson Mandela, Rosa Parks, Angela Davis, Sacco et Vanzetti, Mumia Abu Jamal, José Marti, Che Guevara, Hugo Chavez, Zapata, Cesaria Evora et tant d'autres encore. Mustapha Boutadjine et son épouse ont aussi fait un voyage à Cuba en solidarité avec les victimes de l'ouragan Sandy, voyage qu'il mit à profit pour prendre attache avec des artistes. Ainsi, il compte renouveler son invitation en accueillant chaque année quatre à cinq artistes cubains. A noter que sa prochaine création (plusieurs œuvres) aura pour thème «Histoire et mémoire de l'Amérique latine».