Rencontré avant l'ouverture hier, de la 24e session ordinaire de l'assemblée générale de l'Union des radios des Etats arabes (ASBU), au Palais des nations, le directeur de la chaîne satellitaire libanaise Al Manar, Mohammed Haider, a bien voulu nous expliquer les raisons intrinsèques qui ont conduit à la suspension de sa chaîne sur le satellite européen et aux Etats-Unis. L'Expression: Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) français a ordonné la cessation de la diffusion de votre chaîne Al Manar sur le satellite européen. Qu'en est-il exactement? Mohammed Haïder : Depuis le lancement des programmes, le 25 mai de l'année 2000, notre chaîne Al Manar n'a cessé de faire face à des intimidations et de faire l'objet de pressions de la part des lobbies juifs. Il est clair que c'est notre façon de couvrir les événements et de rapporter les massacres commis dans les territoires palestiniens occupés qui dérangent Israël. Les juifs sont parvenus à leur but, il y a quelques jours. Selon nos informations, les juifs sont actuellement en possession d'un dossier très solide pour étaler leur décision à tous les médias arabes qui les dérangent. Ils ont fait pression sur l'Etat français qui, lui, a fini par interdire la diffusion de nos programmes sur le satellite européen. Je peux comprendre qu'Israël est dérangé par le fait que nous rapportons les exactions qu'il commet en Palestine, mais ce qui me choque par contre, c'est l'attitude de la France reconnue comme pays des droits de l'Homme et de la liberté d'expression. Et quelle sera la réaction des autorités de votre pays, le Liban, suite à cette décision française? Par le passé, le Liban a déclaré qu'il aurait réagi de la même manière aux médias des pays où les médias libanais sont maltraités. Donc il faut s'attendre à ce que des décisions soient prises contre les chaînes ou radios françaises qui existent au Liban. Actuellement, je suis ici à Alger, mais je crois savoir qu'une réunion des responsables libanais se tiendra demain lundi (aujourd'hui, Ndlr) pour examiner la question. Les Etats-Unis ont fait de même, puisque votre chaîne a été également interdite de diffusion en Amérique centrale et en Amérique du Nord. C'est une accusation gratuite, elle constitue un précédent grave dans le monde de l'information. Du reste, je ne suis pas étonné que les Etats-Unis adoptent la même position qu'Israël et soutiennent leur démarche. Mais les Etats-Unis ont annoncé vendredi dernier, avoir placé votre chaîne sur leur liste des organisations terroristes. Si lorsqu'une chaîne de télévision dénonce les exactions israéliennes en Palestine, elle lève le voile sur les crimes commis par l'armée israélienne et informe l'opinion internationale sur les souffrances du peuple palestinien, elle est qualifiée d'organisation terroriste, je déclare que nous sommes fiers de notre chaîne Al Manar. Allez-vous changer de stratégie à la suite de ces décisions américaine et française? Non, nous allons continuer et rester dans la résistance. Votre chaîne est également perçue comme étant le porte-parole du Hezbollah chiite libanais ; cette assertion est-elle vraie? Al Manar est une chaîne associée où existent des actionnaires, comme le stipule la réglementation au Liban. Les actionnaires appartiennent à différentes factions qui existent au Liban et parmi eux des éléments du Hezbollah. La chaîne Al Manar n'est pas un porte-parole de ce parti, même si effectivement son orientation politique est la même que celle du Hezbollah. En fait, ce qui dérange c'est notre alignement direct et franc sans concession à la cause palestinienne. Nous sommes le porte-parole de la cause palestinienne, c'est ça la réalité. Avez-vous reçu des soutiens de la part des autres télévisions et médias arabes? Oui, de la part de quelques-unes qui nous ont exprimé leur solidarité. Et qu'attendez-vous de la 24e session de l'Union des radios et télévisions des Etats arabes qui se déroule à Alger et à laquelle vous prenez part? Nous attendons une position fraternelle et de soutien. Un soutien surtout de la part de l'Algérie et des autres pays frères. L'affaire de notre suspension sera soumise à débat demain (aujourd'hui, Ndlr) dans une séance de travail et nous attendons beaucoup de cette rencontre.