Le président de l'USMA nous dresse un bilan de son action à la tête de cette équipe. Il est venu en 1993. Il a pris la direction de l'USMA et depuis, ce club n'en finit pas de glaner des titres. Aujourd'hui, son nom est intimement lié à celui de l'USMA. L'Expression: L'UMSA qui termine la phase aller première qui plus est avec 7 points d'avance sur son second. Quel est votre sentiment? Saïd Allik: Une immense satisfaction. Ce n'est certes pas le titre de champion d'Algérie mais c'est un titre de champion d'hiver honorifique qui a de la valeur, d'autant qu'on termine avec 7 points d'avance. Je crois qu'on ne pouvait en demander plus encore qu'en mon for intérieur, je suis convaincu qu'on aurait pu faire mieux. L'écart que l'USMA a en ce moment aurait pu, aurait dû être plus important si elle n'avait pas commis deux impairs, à savoir le match nul à domicile contre l'USM Annaba et la défaite au stade du 5-Juillet contre le CRB. Là, vous jouez au perfectionniste. L'USMA a tout de même remporté 12 des 15 matches de cette phase aller. Ce n'est pas rien. Le bilan est certes positif, mais je me dis qu'il aurait pu être meilleur car les deux matches dont je vous ai parlé étaient à notre portée. Alors, si vous me qualifiez de perfectionniste, je vous répondrai : oui, je le suis. C'est-à-dire, je suis quelqu'un qui veut avoir une équipe performante, qui gagne, qui développe un volume de jeu assez intéressant. Je veux que mes joueurs aient une envie de jouer. Voilà la philosophie dans laquelle je me reconnais. C'est pourquoi je n'hésiterai pas à vous dire que je n'ai pas été content par certaines prestations de mon équipe durant cette phase aller. Est-ce qu'en début de saison, vous vous attendiez à un tel parcours de la part de votre équipe? Je ne m'attendais surtout pas à ce qu'elle ramène autant de victoires en déplacement. Ceci dit, notre objectif était de terminer premier car on savait ce que valait notre équipe. Autant dire que vous êtes sur le bon chemin qui mène vers le titre de champion d'Algérie, qui est à coup sûr l'objectif n°1 du club. C'est sûr. C'est l'objectif principal auquel a été assigné le staff technique. L'USMA depuis maintenant dix ans, a pris une telle importance dans le football algérien qu'elle ne peut plus se permettre de jouer les seconds rôles. Les 7 points d'avance qu'elle a sont-ils sécurisants pour cette mission? On ne va, tout de même pas, montrer un mécontentement avec une telle avance. Nos adversaires voudraient bien être à notre place. Mais 7 points lorsqu'il reste 15 matches à jouer, ce n'est pas énorme. Vous savez, j'ai réuni les joueurs pour leur dire: «C'est bien, ce que vous avez fait. Maintenant, on passe à un autre cap. On tourne la page et c'est comme si on reprenait à zéro». C'est-à-dire qu'il faut qu'ils se montrent plus performants que lors de la phase aller. Par conséquent, ces 7 points d'avance, c'est bon pour le moral mais il ne faut pas dormir sur ses lauriers. Il faut continuer avec le même état d'esprit cette soif de gagner pour arriver au bout de son objectif. Il s'agit là d'une équipe qui n'a, pratiquement pas pris de repos, depuis 3 ans. Comment fait-elle pour tenir? Il y a un esprit de solidarité entre les joueurs qui a joué un rôle important dans ce phénomène. Mais je profite de cette question pour rendre un vibrant hommage à des gens que l'on a tendance à oublier dans le rendement de l'équipe. Je veux parler du staff médical dont l'action a été primordiale tant dans le domaine de la récupération que dans celui du suivi des joueurs durant toute cette période. Je peux vous certifier que c'est une équipe médicale dévouée et extrêmement compétente. Est-ce que l'USMA a l'effectif qu'elle mérite actuellement? C'est-à-dire s'il y a des manques, où peuvent-ils se situer? Ma façon de travailler est de toujours faire mieux. On ne peut se contenter de ce qu'on a en permanence, sinon on stagne. On a un effectif qui a donné pleinement satisfaction ces dernières saisons et je tiens à rendre hommage à ces joueurs car, il nous est arrivé de traverser des périodes très difficiles où la trésorerie de l'USMA était en manque. Ces joueurs ont, malgré tout, fait preuve de conscience professionnelle, à continuer à jouer et à donner le meilleur d'eux-mêmes avec les résultats positifs que l'on connaît. Certains d'entre eux que nous avons contactés nous ont confirmé cela, nous affirmant que Saïd Allik avait toujours été un homme de parole. Je ne promets jamais quelque chose en l'air. c'est pourquoi les joueurs me font confiance. Ils savent que s'ils ne sont pas payés aujourd'hui, ils le seront demain. C'est pourquoi ils ont continué à faire preuve de la même joie de jouer et à jouer avec le même état d'esprit. Mais cette USMA a-t-elle besoin de se renforcer? Lorsqu'on fait preuve d'ambition qui est d'aller de l'avant, on est obligé de trouver le parfait équilibre. On est obligé d'avoir le meilleur chez soi. C'est une loi universelle dans le football. L'équipe qui veut jouer les premiers rôles doit avoir les meilleurs joueurs. Je n'invente rien. Donc, je suis satisfait du groupe que nous avons mais je suis pour le renforcement de certains postes. Par qui, par exemple? Je ne vous citerai pas de nom, mais il faut que celui qu'on veut ramener soit meilleur que ceux qu'on a sous la main. L'idéal serait d'avoir une doublure à chaque poste, car on a plusieurs échéances qui vont nous faire disputer un bon paquet de matches. Pour cela, on a besoin d'un effectif en qualité et en quantité. Venons-en au problème financier. L'USMA bénéficie de rentrées d'argent de la part de la CAF et des droits TV. Ce problème est pourtant bien réel. Oui, il est réel. L'USMA est un club ambitieux, qui joue les premiers rôles. En tant que premier responsable, je me dois de lui donner les moyens d'atteindre ses objectifs. La motivation doit être permanente chez les joueurs et chez leur staff. Il faut les mettre dans les meilleures conditions pour se préparer. Il faut donc se donner les moyens de la politique que vous voulez mettre en pratique, une politique tournée vers la gagne et la conquête de titres. Pour vous dire honnêtement, l'USMA est en train de surmonter la crise financière qu'elle traversait. Maintenant, vous me parlez des droits TV, moi je vous dirai qu'ils sont dérisoires. Et là où je ne suis pas d'accord, c'est qu'on met tous les clubs sur un pied d'égalité dans la répartition de ces droits. Or, on sait qu'il y a des clubs qui empêchent la télévision de venir chez eux, il y a des endroits où la télévision ne peut pas aller. L'USMA est alignée sur ces clubs pour la répartition alors qu'on lui télévise la moitié de ses matches dans la saison. C'est un véritable non-sens. Où en êtes-vous avec l'affaire de la question du stade de Bologhine? Ce problème est en voie d'être réglé et en faveur de l'USMA. Une réunion à laquelle j'ai assisté, a regroupé mardi dernier le représentant du wali d'Alger, le wali délégué de Bab El-Oued, le président de l'APC de Bologhine et le DJS d'Alger. Il a été décidé de rétablir l'USMA dans ses droits et de lui redonner la gestion de ce stade. Un projet de convention est en élaboration. En outre, le responsable de la wilaya d'Alger s'est engagé à faire entreprendre des travaux de restauration du stade ainsi que la pose d'une nouvelle pelouse. Cela même si l'USMA va recevoir ses adversaires au stade du 5-Juillet? Absolument. Si nous allons au 5-Juillet c'est parce qu'on estime que le terrain de Bologhine n'offre plus de garantie de sécurité pour les joueurs. Pas plus tard que la semaine dernière, lors d'un match cadet entre l'USMA et la JSMB, un joueur béjaoui a failli perdre la vie. La pelouse est dans un état de dégradation totale. Il faut que l'APC songe à la remplacer sinon on court vers un accident grave, voire un drame. En outre, j'avais mis le paquet pour doter ce stade d'une véritable tribune officielle et une tribune de presse. Vous voyez dans quel état elles sont aujourd'hui ? Vous ne pouvez plus inviter vos amis à venir assister à un match dans une telle tribune. J'en suis malade. S'il y a bien un reproche qui est fait à l'USMA, c'est l'instabilité de son staff technique. Elle change d'entraîneur au moins une fois par saison. Je vous concède cette réflexion. Il faut que vous sachiez que l'USMA est pour la stabilité du staff technique. Mais je tiens à dire qu'avec tout le respect qu'on a pour les techniciens algériens, on n'arrive pas à en avoir un sur deux ou trois ans. A la fin d'une année sportive, il s'agit de bien faire son bilan et de ne pas se focaliser que sur les aspects positifs. Je suis quelqu'un qui est très bien dans sa peau. J'ai la conscience tranquille et certain que ce que je fais, je le fais pour le bien de l'USMA. On ne peut se contenter d'une chose et oublier tout le reste. Il m'est arrivé par exemple de me séparer à l'amiable avec un entraîneur qui m'a ramené un doublé. Il y a eu du positif mais quelque part, je n'ai pas été satisfait dans quelques domaines. Un président doit savoir prendre ses responsabilité. Je les ai prises. Maintenant, mon voeu le plus cher serait d'avoir un entraîneur pour au moins trois ans. Qu'en est-il du devenir du staff actuel? Ce que je peux dire, c'est qu'il a obtenu de bons résultats. Il doit continuer sa mission. Mais il doit rectifier ce qui n'a pas marché lors de la phase aller et je ne parle pas des résultats uniquement. Vous savez, dès après le match aller que nous avions perdu à Tunis contre l'EST, en Coupe d'Afrique, j'avais réuni les entraîneurs pour leur assigner un objectif qui s'articule sur trois axes, à savoir la discipline du groupe, la discipline tactique et l'agressivité dans la récupération du ballon. Ces entraîneurs sont tenus d'atteindre cet objectif. Ça ne vous gêne pas trop, le fait de vous immiscer dans les affaires techniques? Chez moi, c'est normal. Mais le président Saïd Allik n'intervient jamais dans la composition de l'équipe. Le plus souvent, je m'installe à la tribune sans savoir qui va être aligné. Maintenant, c'est vrai qu'il m'arrive de donner quelques fois mon avis et je le donnerai toujours. On en arrive à la champion's league africaine. Votre entraîneur a dit que l'USMA ne pouvait pas remporter ce trophée. Qu'est-ce qui a pu le pousser à dire cela? L'USMA est faite pour remporter une telle compétition parce que c'est la conviction de son président qui est un gagneur. Maintenant, c'est vrai que l'entraîneur a fait cette déclaration en début de saison. A mon avis, c'était humain. C'était une façon de diminuer un peu de la pression que les joueurs avaient sur eux. Mais je suis convaincu qu'il a tout fait pour mener son équipe vers les succès. Il n'a pas pu et ce n'est pas uniquement de sa faute. Probablement que nous aussi avons failli parce que nous nous sommes dit que nous n'avions pas réuni toutes les conditions pour aller le plus loin dans cette compétition. L'une des plus belles opérations que vous ayez réussies depuis que vous êtes président de l'USMA, c'est le transfert de Diallo à Nantes. Vous le ramenez du Mali pour une certaine somme et à peine un an plus tard, il se retrouve en France, moyennant une plus value appréciable. Ce que je peux vous certifier, c'est que dans ce transfert, j'ai donné la primauté au plan sportif. L'aspect financier venait en second. Il faut que vous sachiez que Diallo avait des contacts avec des clubs arabes, des clubs français et des clubs anglais vers la fin. Si j'avais donné de l'importance au côté financier, j'aurais opté pour le départ de Diallo vers un club des pays arabes où l'USMA aurait pu gagner 3, 5 fois plus que ce qu'offrait le FC Nantes. Etant des sportifs comprenant la volonté et la détermination du joueur à embrasser une carrière professionnelle, vu son jeune âge et son talent, l'équipe dirigeante de l'USMA a mis de côté l'aspect financier pour encourager l'aspect sportif. Et je vous assure que l'offre du club arabe était ferme. Il y a presque un an, vous aviez réuni à la va vite une assemblée générale du club pour annoncer votre départ. Pourtant, vous êtes toujours là. Vous savez, quelle que soit la fonction qu'on occupe, on est tous appelé un jour à partir. Mais il ne s'agit pas de partir comme ça, sans crier gare. Il s'agit tout de même de la présidence de l'un des meilleurs clubs d'Algérie qui, en 10 ans, a collectionné les titres. C'est pourquoi j'ai averti le comité directeur qu'il était temps de préparer une période de transition. Une période durant laquelle je l'accompagnerai mais il faudra bien qu'un jour je m'efface. Nul n'est éternel. Il faut donc commencer à mettre en place une organisation qui permettra de remplacer X ou Y par la suite. C'est une façon de voir les choses. Je peux vous assurer que c'est extrêmement stressant. Je suis saturé. Gérer un club dans la capitale vous ronge. Donnez-moi à diriger 10 ans un club de l'intérieur du pays et pas 3 ans pour un club comme l'USMA. Comment pouvez-vous faire de la performance sans l'outil de travail ? Et l'outil de travail, ce n'est pas seulement l'argent, ce sont les terrains d'entraînement. Comment voulez-vous jouer une champion's league lorsque vous avez la moitié du terrain de Bologhine pour vous entraîner? 11 ans de présidence d'un club comme l'USMA, 11 ans de succès. C'est quoi la vie de tous les jours de Saïd Allik? C'est une vie de fou, mais il faut aimer cela et faire preuve d'ambition. J'ai connu avec l'USMA tous les bonheurs mais en 11 ans, je n'ai pas eu de vie de famille. Je m'investis totalement pour ce club. Je fais des journées de travail de 10 heures et même chez moi, à une heure tardive, j'en suis encore à me consacrer à ce club. C'est un milieu prenant, qui vous accapare au détriment de votre santé, de votre famille et de l'avenir de vos enfants. Mais je ne regrette rien de ce que j'ai fait, car j'ai gagné beaucoup d'amis et j'ai évolué dans un milieu très sain, au milieu de gens que j'ai respectés et qui me l'ont rendu.
