L'Arabie saoudite veut d'abord savoir quelle quantité de pétrole l'Iran va apporter sur le marché. C'est le cafouillage total. Le marché a bien de la peine à décoder les messages pourtant a priori favorables à un redressement des prix. Tout donne l'impression que l'on souffle le chaud et le froid, une situation qui débouche sur une ambiance d'hypocrisie généralisée qui sape le moral du baril. La Russie qui s'est dit prête à collaborer avec l'Opep pour trouver une issue à la dégringolade des prix du pétrole, a augmenté sa production au point d'atteindre un nouveau record en janvier 2016. «Les compagnies pétrolières russes ont pompé le mois dernier 46 millions de tonnes de pétrole et condensats, soit 18,88 millions de barils par jour en moyenne», indiquent les chiffres de l'agence publique chargée du secteur cités, hier, par les agences russes. Cela représente une hausse de 1,5% par rapport à janvier 2015 et un record depuis la chute de l'Urss font remarquer les observateurs. La Russie a finalement largement contribué à la chute des prix du pétrole en prenant part à cette guerre des prix sans pitié que se livrent Saoudiens et Américains. Elle se montre disponible à réduire sa production après avoir fait le plein! En toile de fond de cette démarche s'inscrit la rivalité irano-saoudienne qui peut faire capoter toute initiative qui tendrait à réduire le surplus d'or noir ou carrément l'éponger. «Bien qu'il y ait eu un certain optimisme initial à l'égard de l'intention de la Russie de réduire nettement sa production, l'Arabie saoudite est restée défiante à l'idée de toute diminution (de production), alors que l'Iran avait déjà promis de pomper plus de 1,5 million de barils par jour dans le but de récupérer sa part de marché perdue», indiquait Lukman Otunuga, analyste chez Fxtm. Quelles sont les conséquences de cette «guerre de tranchées»? «L'affrontement visible des intérêts des différents membres du cartel couplé avec un dollar qui s'apprécie, ont aggravé les malheurs du pétrole, entravant par conséquent toute possibilité de reprise des prix», fait observer M. Otunuga. Un constat que conforte l'information rapportée par le journal saoudien Al-Hayat, qui cite des sources au sein de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole. L'Arabie saoudite veut d'abord savoir quelle quantité de pétrole l'Iran va apporter sur le marché après la levée des sanctions (occidentales). Cela sera clair dans deux mois au plus tôt, auraient-ils confié, sous le sceau de l'anonymat. «Des pourparlers ce mois-ci, comme indiqué la semaine dernière, sont ainsi devenus peu probables», soulignaient les analystes de Commerzbank. Résultat: les prix dépriment. Le retour vers les 30 dollars n'est pas loin. Les prix du pétrole se repliaient hier au cours d'échanges européens, rattrapés par la perspective d'une offre toujours excédentaire et alors que les espoirs d'un accord entre pays producteurs pour réduire les excédents s'amenuisaient. Hier, vers 12h30 à Alger, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en avril valait 33,24 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE) de Londres, en repli de un dollar par rapport à la clôture de lundi. Dans les échanges électroniques sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en mars perdait 90 cents à 30,72 dollars. Une petite lueur d'espoir tout de même. Les investissements qui ont baissé de plus de 20% à 539 milliards de dollars en 2015 et qui devraient se poursuivre en 2016 laissent entrevoir un rebond des cours de l'or noir. «Face à cette situation, les prix du pétrole rebondiront à terme», a estimé hier le président de l'Institut français du pétrole Energies nouvelles (IFP EN), Didier Houssin, qui émet deux hypothèses. «Si l'offre reste suffisante pour faire face à la demande, on peut avoir un scénario durable au-delà de 2020 de prix dans une fourchette de 40 à 60 dollars», a pronostiqué M.Houssin. De sombres perspectives pour l'or noir.