Deux des nombreux blessés après l'attentat de samedi L'explosion qui a eu lieu samedi dans la grande rue piétonne d'Istiklal a entraîné la mort de six personnes, 20 autres ayant été blessées, dont trois grièvement. Une seconde fois, en moins d'une semaine, la Turquie a été frappée par un attentat-suicide qui a visé une rue très fréquentée dans un important quartier commerçant d'Istanbul. Le pays se retrouve en état d'alerte maximum face à des attaques meurtrières qui se sont multipliées ces derniers mois. Attribués au groupe Etat islamique (EI) ou aux rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui ont repris, l'été dernier, leur bras de fer armé avec les forces turques, les attentats commencent à inquiéter les dirigeants car ils visent principalement la manne touristique du pays. Le dernier en date, dimanche dernier, a vu une voiture piégée exploser près d'un arrêt de bus, en plein centre d'Ankara, faisant 35 tués et plus de 120 blessés. Le 17 février, un autre attentat du même genre avait causé 29 morts, toujours dans la capitale turque. Les deux attaques ont été revendiquées par un groupe radical kurde, proche des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), agissant en représailles à la mort de civils pendant les opérations de l'armée et de la police contre la rébellion dans plusieurs villes du Sud-Est anatolien. L'explosion qui a eu lieu samedi dans la grande rue piétonne d'Istiklal a entraîné la mort de six personnes, 20 autres ayant été blessées, dont trois grièvement. Le «kamikaze» qui s'est fait exploser sur l'avenue fréquentée par des centaines de milliers de personnes durant le week end, avait à peine 25 ans. Lié à l'organisation terroriste Daesh, Mehmet Öztürk, originaire de Gaziantep (sud) près de la frontière syrienne, «ne figurait pas dans la liste de personnes recherchées», selon le ministre turc de l'Intérieur qui a confirmé que trois Israéliens, dont deux avec la nationalité américaine, et un Iranien ont été tués dans l'attentat, 24 étrangers dont plusieurs Israéliens figurant aussi parmi les 39 blessés. Les autorités turques ont rapidement privilégié la piste Daesh, compte tenu de la situation tendue au nord de la Syrie où elles mènent d'intenses bombardements des positions kurdes syriennes. Avec la célébration du Nouvel An kurde, Newroz, aujourd'hui même, les craintes de plusieurs attentats sont à leur paroxysme, surtout du fait des déclarations du président Recep Tayipp Erdogan qui réaffirme sa détermination à éradiquer complètement la menace terroriste d'où qu'elle vienne. Face à la double menace du PKK et de l'EI, l'état d'alerte a été durci dans tous les endroits sensibles du pays. Mais le climat a déteint sur d'autres espaces, puisque l'Allemagne a fermé jeudi son ambassade à Ankara, son consulat général à Istanbul et ses écoles dans les deux villes «en raison d'un risque d'attentat». En janvier dernier, 12 touristes allemands avaient été tués dans un attentat-suicide, attribué à l'EI dans le centre historique d'Istanbul. L'ambassade des Etats-Unis à Ankara a également mis en garde ses ressortissants en Turquie contre de possibles attentats et leur a recommandé d' «éviter tout rassemblement politique ou manifestation» lors des fêtes du Nouvel An kurde prévues dimanche et lundi. Réagissant aux critiques de plus en plus nombreuses contre «l' impuissance des services de sécurité», Erdogan a lancé lanathème contre les «complices» des «terroristes» kurdes, qu'ils soient des élus, des intellectuels ou des journalistes. Depuis plusieurs jours, il presse le Parlement de lever l'immunité de députés du Parti démocratique des peuples (HDP, pro-kurde) poursuivis pour «propagande terroriste», alors que la police multiplie les arrestations dans les milieux du PKK sans cesser d'accuser l'Europe de complaisance à l'égard des terroristes kurdes. La politique de la Turquie, parquée par l'ambivalence et les calculs étriqués, a montré ses limites puisqu'elle doit faire face maintenant à ce même groupe terroriste avec lequel elle a si longtemps entretenu des échanges commerciaux, notamment pétroliers, et des partages de rôle a priori secrets. Outre la guerre larvée qu'Ankara livre au PKK, le masque est donc tombé qui voit l'armée turque contrainte de combattre Daesh au risque daggraver la menace terroriste à laquelle la Turquie doit maintenant faire face à tout instant.