Y a-t-il meilleure occasion pour rappeler la nécessité de sauver 13 parlers berbères actuellement en danger de disparition? C'est en effet plus que jamais d'actualité de rappeler que le denier rapport de l'Unesco dénombrait 13 variétés de langue amazighe en voie d'extinction à travers plusieurs régions d'Algérie. La reconnaissance officielle par l'Etat de cette langue met tous les acteurs concernés dans un devoir moral d'aller à leur secours. Le temps est compté. En effet, rappeler à cette occasion de la célébration du 36ème anniversaire du printemps amazigh, désormais dans sa dimension nationale, ces dialectes en danger donne un goût amer à la célébration. Ce rappel qui sonne comme un rabat-joie en cette occasion du 20 avril semble être le contexte idéal pour que les feux de l'actualité soient braqués sur ces dialectes qui s'éteignent chaque jour un peu plus. C'est aussi, un rappel à l'ordre de certains militants et détenus du printemps 1980 qui veulent s'ériger en tuteurs sur le combat pour tamazight alors que le travail n'est pas terminé tant que ces dialectes sont en danger. La mort qui guette à tout moment ces 12 variantes de la langue est un aveu d'échec cinglant de ceux-là qui croient que le 20 avril est une porte qui s'ouvre sur la carrière politique alors que le vrai combat ne fait que commencer, sur le terrain... culturel et social. En effet, dans son Atlas des langues, l'Unesco dénombre, en tout, 13 variantes de tamazight menacées de disparition. En première position vers la tombe, l'on retrouve le korendjé, variante amazighe parlée par environ 5000 locuteurs dans la région de Tabelbala. Ce sera par la suite au tour du tamazight parlé dans la région d'Arzew et puis tagargrant, avec 15 000 locuteurs à Touggourt et Ouargla, le chenoui parlé par environ 20.000 habitants de Tipasa, Cherchell et Ténès et à Tagouraït n'est pas à l'abri aussi. D'autres variantes réparties dans plusieurs wilayas ont aussi, le couteau de l'indifférence à la gorge comme pour le zenatia de l'Ouarsenis à Tissemsilt. Le blidéen des monts de l'Atlas et Médéa, le senoussi de la montagne des Béni Snous et le chleha du village de Boussaïd attendent aussi dans le couloir de la mort. Pis encore, d'autres variantes que l'on croyait solides s'effritent peu à peu, hélas, comme le tamacheq des Touareg algériens du Hoggar, du Tassili parlé par 120.000 locuteurs et enfin, le tidikelt, parlé par 50.000 habitants d'In Salah. En fait, nous assistons à un véritable massacre des dialectes amazighs algériens. Et le désastre ne semble point inquiéter certains qui continuent de s'approprier l'histoire du 20 avril en croyant que le combat est juste politique. Enfin, il est indéniable que ce désastre montre toute l'importance de l'officialisation de tamazight. Officielle et dotée d'une académie, celle-ci pourra donc bénéficier d'un travail de recherche pointu visant à la sauvegarde de ces variantes. Pour le moment, les locuteurs, non sensibilisés, ignorent qu'ils sont en train de perdre un trésor irremplaçable. C'est en fait, une perte mortelle car, perdre sa langue c'est mourir un peu.