«Mon action est loin d'être achevée.» L'Expression : Les fédérations sportives viennent de procéder à l'évaluation de leurs bilans et au renouvellement de leurs structures. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet? Mustapha Berraf : Il faut saluer l'esprit de démocratie qui a prévalu lors de ces opérations. Il y a lieu, également, de souligner la grande maturité qui y a régné. Ce sont des opérations normales inscrites dans le programme du gouvernement. Il faut, d'autre part, saluer la neutralité du ministre de la Jeunesse et des Sports qui a laissé libre cours aux assemblées pour choisir leurs élus. Il est vrai qu'il y a eu, dans certains cas de figure, quelques incompréhensions, mais je pense que, globalement, tout s'est bien déroulé. Les responsables, qui ont bénéficié de la confiance de leurs assemblées générales respectives, se sont engagés à travailler et à redoubler d'efforts en vue de faire du sport algérien la grande vitrine qui a existé ces dernières années, notamment dans la réalisation de résultats historiques aux Jeux méditerranéens de Tunis, aux Jeux africains d'Abuja et aux Jeux sportifs arabes d'Alger. Le ministre de la Jeunesse et des Sports avait mis sur pied une commission de suivi de ces assemblées. N'est-ce pas là une sorte d'immixtion? Non, il ne s'agit nullement d'immixtion. La loi confère au ministère de la Jeuness et des Sports la mission de contrôle du fonctionnement des fédérations sportives. Il veille, en outre, à ce que les statuts de celles-ci soient en conformité avec la loi algérienne. A mon avis, la commission ministérielle de suivi de ces assemblées a inscrit son action dans le cadre de la loi et de la réglementation. Il est vrai qu'il y a eu çà et là quelques interprétations qui ont fait croire à des actions tendancieuses de sa part, mais elles étaient isolées. Je pense, encore une fois, que cette opération s'est très bien déroulée. Je tiens à féliciter les membres de la commission ministérielle pour leur disponibilité, leur sérieux et leur esprit de responsabilité. Vous venez de boucler quatre années de mandat. Quel bilan faites-vous de votre action à la tête du COA? A mon avis, c'est un bilan positif et il faut associer à cette réussite les membres du bureau exécutif qui m'ont accompagné tout au long de ces quatre années. Aujourd'hui, le COA dispose d'un siège à la mesure de sa renommée et de sa prestigieuse histoire. L'institution olympique se targue, maintenant, d'avoir une aura sur l'ensemble du mouvement associatif algérien. Le COA est, actuellement la première organisation nationale de par le nombre de ses adhérents, sa composition et son impact sur la société civile. Par ailleurs, les actions liées aux idées olympiques et aux grandes manifestations ont, elles aussi, connu beaucoup de succès. A titre d'exemple, sur les quatre années qui viennent de passer, nous avons pu mettre sur pied, à chaque fois, une semaine olympique dont une s'est déroulée dans le Grand Sud, ce qui n'est pas négligeable. Il est vrai que nous avons bénéficié du soutien des autorités, notamment le ministère de la Jeunesse et des Sports et des wilayas. Je tiens, également, à souligner qu'au cours de ce mandat, nous avons bénéficié de l'aide et du soutien du ministre de l'Energie et des Mines, à travers Sonatrach et Sonelgaz qui ont su accompagner nos actions en faveur du développement du sport et de l'éducation olympique. Ceci pour dire que le Comité olympique vit dans une sérénité absolue, dans une parfaite cohésion entre tous ses membres et dans une excellente compréhension avec le ministère de la Jeunesse et des Sports. Nous n'avons pas vu passer ces quatre années parce que le plan de charge que nous avons élaboré et réalisé était très important. Les membres de l'assemblée générale, qui nous ont élus, pourront constater que nous avons réalisé la majeure partie de nos objectifs, notamment la création de la commission «La femme et le sport», et celle de l'association des olympiens, la réactivation du TAS ainsi que la mise en oeuvre du concept liant le sport à l'environnement. S'il y a eu un seul regret de ma part, c'est de n'avoir pas mis en route le chantier du musée de l'olympisme algérien. Il n'a pu se faire en raison du manque de locaux adaptés pour l'accueillir. On a pu constater, également, que le COA bénéficie maintenant de nombreux partenaires... C'est exact, et cela signifie que notre opération de marketing porte ses fruits. Grâce au sponsoring, le COA a bénéficié d'un soutien financier très appréciable. Il dispose, aujourd'hui, de beaucoup de partenaires et cela rejaillit sur les fédérations sportives qui jouissent, à leur tour, d'une incidence financière de ces opérations. On peut dire que le COA est le véritable pilier de tout le mouvement sportif national. Parmi les nouvelles créations au sein du COA, la femme n'a pas été oubliée... Je crois qu'il faut rendre hommage aux membres de la commission «La femme et le sport». Des membres qui ont été élus par les personnalités sportives de notre pays. En seulement deux années d'activité, cette commission a réussi l'exploit d'obtenir pour Mme Khelili, DJS de Boumerdès, le trophée «Femme et sport» africain. L'implication de cette commission dans tous les actes du COA est à souligner. Pouvez-vous nous parler de l'association des olympiens? Notre action s'est, effectivement, soldée par la création de cette association qui est opérationnelle et qui dispose de bureaux au siège du COA. C'est un lieu de regroupement, de concertation et d'aide à ces anciens athlètes qui ont participé à des jeux Olympiques et qui ont consacré une grande partie de leur vie au sport algérien. Certains d'entre eux vivent dans des conditions difficiles et cette association leur est d'un soutien non négligeable. Nous sommes à l'écoute des doléances de ces anciens athlètes et extrêmement fiers de posséder une telle association en Algérie, alors que dans beaucoup d'autres pays, la mise en oeuvre de ce programme connaît des difficultés parce qu'au niveau des staffs dirigeants, on a une certaine tendance à ne pas trop faire confiance à des jeunes qui viennent et qui essaient de bousculer l'ordre des choses. Nous sommes, pour notre part, à l'écoute de nos anciens athlètes qui connaissent bien leurs disciplines respectives. Je crois que les avis et les conseils qu'ils peuvent nous donner sont les bienvenus. Jusqu'où s'est située l'action du COA dans la solidarité olympique? Je peux vous dire que dans ce domaine, le COA a réalisé 98% de son programme. Ce qui est rare dans tous les pays. Grâce à cette solidarité, des athlètes, des entraîneurs, des dirigeants et même des administratifs ont bénéficié du soutien financier dont ils avaient besoin dans le cadre de leur travail. Le fait le plus démonstratif de l'intérêt accordé par le CIO à ce genre d'action a été la visite de travail de trois jours en Algérie effectuée par M. Jacques Rogge, président de l'instance olympique internationale. Cette visite a permis au COA de renforcer les liens avec le CIO. Le fait marquant de cette visite aura été l'audience accordée à M. Rogge par le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, qui, en cette occasion, a été récipiendaire de l'ordre en « or » du mérite olympique international, une distinction que peu de chefs d'Etat dans le monde ont reçue. M. Bouteflika la recevait pour son action soutenue, depuis de nombreuses années, pour le sport. D'autre part, ces quatre années, qui viennent de passer, ont vu l'élection de M. Amar Addadi à la présidence du Comité international des Jeux méditerranéens. Avec M. Mustapha Larfaoui, qui préside aux destinées de la Fédération internationale de natation, le sport algérien voit deux de ses enfants installés au sommet de la hiérarchie du sport mondial. Avoir des hommes à ce niveau-là et une femme qui décroche le trophée mondial pour l'Afrique, «Femme et sport», ne peut que vous amener à avoir un sentiment de fierté. Il y a eu également un événement qui n'a peut-être pas eu la médiatisation souhaitée. On veut parler de la quinzaine olympique algéro-cubaine dont l'expérience n'a pu malheureusement se renouveler. Elle n'a pu se renouveler en raison, malheureusement, de l'indisponibilité de moyens de transport aérien. Mais ce que je peux vous annoncer c'est que nous avons un rendez-vous pour la signature d'un accord algéro-cubain de partenariat pour les jeux Olympiques de 2008. Au même titre que l'accord liant la Chine au Kenya, l'Algérie et Cuba vont s'associer en vue de préparer leurs athlètes respectifs pour l'échéance de Pékin. Des athlètes algériens iront, donc, à Cuba pour s'y préparer et bénéficier du savoir-faire des techniciens de ce pays. D'un autre côté, l'Algérie accueillera des sportifs cubains qui disposeront de ses infrastructures, notamment le centre de préparation en altitude de Tikjda. Je n'ai pas besoin de vous rappeler la renommée de ce pays dans le domaine sportif qui fait qu'à chaque fois aux jeux Olympiques, il réalise une belle moisson de médailles. Nous en venons à l'un des plus beaux coups réalisés par le COA avec l'acquisition du centre de Tikjda pour en faire un centre de regroupement en altitude pour les équipes nationales. Je suis, effectivement, l'un des initiateurs de ce projet. L'idée a germé dans ma tête en raison de l'indisponibilité de bases d'entraînement à l'étranger au moment opportun. Cela nous a causé d'énormes désagréments pour la préparation de nos athlètes pour les échéances internationales. La création d'un centre de ce type, ici, chez nous, en Algérie, devenait une nécessité impérieuse. Nous avons, donc, développé une action en ce sens auprès du gouvernement, lequel, lors d'un conseil interministériel, a décidé d'octroyer le site de Tikjda au Comité olympique. Comme vous le savez, les méthodes modernes d'entraînement imposent une préparation en altitude pour les sportifs afin qu'ils deviennent plus résistants lorsqu'ils descendent au niveau de la mer. Nous avons, donc, fait des efforts pour restaurer le patrimoine qui venait d'être confié au COA car, il s'agit d'un site qui a souffert lors des années de terrorisme avec des structures complètement saccagées lorsqu'elles n'ont pas été brûlées. Cette action de restauration et de réhabilitation nous permet, aujourd'hui, de bénéficier dans les chalets de 117 chambres, soit 234 lits. En outre, le COA et les fédérations sportives vont bénéficier de l'octroi de l'hôtel Djurdjura qui va apporter un plus en matière de capacité d'accueil. Il y a que les gens restent réticents en pensant au terrorisme. Je tiens à les rassurer. L'endroit est parfaitement sécurisé et de nombreuses personnes et familles y affluent. Le tourisme de montagne reprend vie chez nous. Mais que restera-t-il si tout est pris par le COA ? Je démens toute information tendant à faire croire que le COA a fait main basse sur le site. Dès que l'hôtel et son auberge seront restaurés et opérationnels, n'importe qui pourra venir en profiter, selon les normes de la commercialité touristique en vogue dans notre pays. Le tourisme est quelque part une activité sportive. Ses adeptes seront les bienvenus dans ce site pour bénéficier de l'air pur des montagnes et pratiquer quelques activités liées à l'endroit, comme les randonnées pédestres, le ski ou l'escalade. Comment cela va-t-il se passer? Le Comité olympique instaurera dans ce site une organisation qui permettra aux sportifs de se préparer, aux touristes et aux vacanciers de bénéficier de ses commodités et de tout ce qu'il y a aux alentours, à charge pour eux de s'acquitter de leur dû comme ils le faisaient auparavant. Je crois que l'équilibre budgétaire et financier sera facilement trouvé surtout que le COA dispose d'un portefeuille de clientèle assez conséquent dans le monde du sport. La piste d'athlétisme est-elle prête? Elle le sera dans peu de temps, de même que le terrain de football et ses annexes. Ce qu'il faut savoir, c'est que l'Iaaf a consenti une aide de 100.000 dollars pour le site. De son côté, le CIO avait déjà dégagé une enveloppe de 50 000 dollars et s'apprête à effectuer une rallonge de 50.000 dollars. Cela va permettre à Tikjda d'acquérir ses titres de noblesse et d'atteindre les normes d'une station internationale. Je vous annonce, d'ailleurs, que quelques-uns de nos meilleurs athlètes, parmi eux Saïd Guerni Djabir, s'entraînent déjà sur le site même si celui-ci n'est pas prêt à 100%. La sortie des sportifs et des athlètes algériens aux derniers JO d'Athènes a été accompagnée d'une salve de critiques pour leurs mauvais résultats. Cela a dû vous faire mal. Je suis un élu du mouvement sportif national et j'assume entièrement mes responsabilités. Tout un chacun sait, néanmoins, que M. Berraf n'était pas sur les pistes, les bassins, les tatamis ou les rings. Mais j'assume l'échec car, on n'a pas le droit de jeter l'anathème sur des athlètes parce qu'ils échouent alors qu'on les encense quand ils réussissent. L'athlète est un être humain, un Algérien dont le pays peut être fier et qui peut connaître des moments difficiles. C'est en des instants de ce genre qu'il a besoin de soutien et non lorsqu'il gagne. C'est pourquoi je me suis mis en avant pour les protéger. Nous sommes indissociables les uns des autres. Nous sommes solidairement responsables de l'échec ou de la réussite. C'est dans les moments de décision qu'il faut savoir se mettre aux côtés des athlètes pour qu'ils se remettent en question et pour qu'ils s'attellent à reprendre le travail avec plus d'abnégation. Le sport n'est pas fait que de gagne. Il y a des échecs qui sont parfois salutaires. La polémique était née surtout du fait qu'avant les JO vous aviez tablé sur 5 médailles. Il ne s'agissait pas d'un pronostic mais d'un objectif. Etant président du COA, je me présente comme un manager. Je ne pouvais, honnêtement, pas me présenter auprès des institutions du pays sans fixer d'objectifs à mes troupes. Ces objectifs ont été établis sur des données fournies par les fédérations sportives qui n'allaient, tout de même, pas nous dire que nous allions à Athènes pour en revenir avec aucune médaille. Ce qu'il faut savoir c'est que le COA est organisateur de la participation de la délégation algérienne aux JO et sur ce point, cela s'est très bien passé. Maintenant pour ce qui est de la préparation des athlètes, l'institution olympique n'a aucun droit de regard. Cela relève des prérogatives des fédérations sportives. Les responsables techniques de celles-ci se sont engagés à réaliser de bons résultats. C'est à partir de là que nous avons fixé les objectifs. Maintenant il ne faut pas oublier que ces athlètes ont gagné le droit d'y participer sur le terrain et on ne pouvait, honnêtement, pas les y empêcher. Cela nous a permis d'avoir la plus importante délégation depuis l'indépendance du pays avec 62 athlètes. Cette donnée est très importante. Ensuite, il y a eu le fait que nous avons eu 5 finalistes dont deux en natation, ce qui n'est pas rien. J'ajouterai la participation féminine où les filles, malgré leur inexpérience, sont allées se mesurer aux meilleures dans cette compétition planétaire. Pouvez-vous donner les dates des deux assemblées générales du COA? L'assemblée ordinaire aura lieu le 17 février au siège du COA. L'assemblée élective se tiendra le 3 mars au même endroit. Nous ferons en sorte qu'elles se déroulent dans les meilleures conditions. Peut-on dire que Mustapha Berraf postulera pour un second mandat? Je vous annonce que je suis candidat pour un second mandat et j'espère que l'assemblée générale me renouvellera sa confiance car, mon action à la tête de cette prestigieuse institution n'est pas terminée.
