«Il y a des lignes rouges à ne pas franchir» «En tant que ministre et vu l'évolution de la presse, je m'interroge sur l'opportunité de cette Autorité de régulation.» L'anarchie qui caractérise le paysage médiatique en Algérie est telle que le ministre de la Communication, Hamid Grine, a fort à faire pour y remédier. Animant hier un point de presse en marge d'une conférence donnée par Mme Paule Beaugrand-Champagne, présidente du Conseil de presse du Québec dans le cadre du cycle de formation au profit des professionnels des médias à la Bibliothèque nationale d'El Hamma à Alger, M.Grine est revenu sur un bon nombre de questions concernant la réforme de son secteur. Parlant du Conseil d'éthique et de déontologie, le ministre a affirmé que «jusqu'à présent il n'y a aucune date arrêtée pour sa création». Concernant l'Autorité de régulation de la presse écrite, il a indiqué que la loi la prévoyait, mais «en tant que ministre et vu l'évolution de la presse, je m'interroge sur l'opportunité de cette Autorité de régulation». «Dès lors qu'il y aura un Conseil de l'éthique, qui va s'autosaisir de tous les problèmes liés à la déontologie et à l'éthique, je ne vois aucune utilité (...) de l'opportunité de cette autorité», a-t-il affirmé en considérant qu'elle «est nécessaire dans l'audiovisuel» et peut dans ce cas «se substituer à l'autorité du ministère de la Communication». Le ministre conditionne sa mise en place par sa dotation d'un siège digne de ce nom. Le président du futur Conseil d'éthique et de la déontologie sera désigné par le président de la République, a ajouté le ministre de la Communication. Il s'est néanmoins interrogé si on allait «vers un amendement ou non», estimant que la question était «prématurée» et que la question est de se «mettre en conformité avec la nouvelle Constitution». Répondant à une question relative à la future loi sur la publicité qui elle aussi, a tardé à voir le jour, le ministre a pris à contrecourant les journalistes, en déclarant qu'«il ne faut pas s'attendre à des miracles».La future loi sur la publicité interviendra pour réglementer l'anarchie qui caractérise en ce moment la création de boîtes de communication qui se fait sans aucune règle. Le nombre de ces boîtes a atteint 4000. Abordant la question du paysage audiovisuel, le ministre a affirmé qu'aucune chaîne de télévision ou de radio ne peut être créée sans l'accord des autorités, soulignant que la tolérance de l'Etat a des «lignes rouges qu'il ne faut pas franchir». «Aucune chaîne de télévision ou de radio ne peut être créée sans l'accord des autorités. L'Etat algérien a été extrêmement tolérant, mais cette tolérance a des lignes rouges qu'il ne faut pas franchir», a déclaré le ministre en marge d'une conférence sur la déontologie dans la presse. Concernant l'accréditation des chaînes algériennes de droit étranger, M. Grine a précisé que «le moment venu» des fréquences (actuellement au nombre de 13) seront «allouées», précisant qu' «il reviendra à l'Autorité de régulation de déterminer les chaînes de télévision qui répondent au cahier des charges». Il a relevé que les cinq chaînes déjà accréditées ont accompli un «saut qualitatif» depuis leur lancement. Il a estimé, à propos de la presse écrite, que sur les 155 journaux que compte le paysage médiatique algérien, «peut-être qu'il y a 20 ou moins qui ont un poids et une importance sur le marché», considérant que «sur les 20, il y en a peut-être 10, qui sont érigés et gérés comme des entreprises de presse», avec des journalistes ayant des cartes de presse professionnelle, leurs droits sociaux et des salaires convenables. «Les autres sont bâtis et gérés comme des épiceries. Certains journaux n'ont aucun journaliste doté de la carte de presse professionnelle, n'assurent pas la couverture sociale de leurs journalistes et n'ont pas de contrat de travail», a-t-il regretté. Selon lui, un journal qui «peut exister sans la publicité étatique est un journal professionnel au sens propre du terme», avant de souligner que la crise de la presse écrite n'était pas spécifique à l'Algérie, mais se pose aussi à l'étranger: en Europe, en Amérique, et dans les pays voisins. Il a ainsi relevé que plusieurs journaux avaient des «créances importantes auprès des imprimeries étatiques».