Grisaille et mélancolie, mais aussi vie ordinaire et quête de l'espoir se dessinent à travers cette expo qui dure un mois. «Le collectif 220 est une rencontre entre sept jeunes photographes aux sensibilités et aux regards différents, soucieux de confronter leur expérience de la photographie afin d'explorer de nouvelles perspectives autour de l'Algérie, et au-delà.», nous assure-t-on. Pour faire ample connaissance avec ces jeunes artistes issus des différentes régions d'Algérie et apprécier leurs oeuvres, une exposition d'une huitaine de photographies chacun nous a été dévoilée lors d'une exposition collective, à l'espace Sylabs qui se trouve juste en face de l'Institut français d'Alger. Un endroit bien stratégique, d'autant que ce lieu est une ancienne usine qui a été fermée depuis 30 ans et rouverte que récemment grâce au dynamisme d'un groupe de jeunes gens qui ont mis la main à la pate dont le plasticien Walid Aidoud qui a servi pour l'aménagement intérieur mais pas que, puisqu'il est le directeur artistique de ce lieu fraîchement installé, avec en partenariat ces photographes notamment. «Sylabs est un accélérateur de talents, où ces derniers peuvent travailler, peuvent se former et collaborer. L'idée est de créer la synergie entre ces trois mondes: l'art, la technologie et l'entrepreneuriat. C'est un espace où on nous trouve des formations, des expos et des conférences sur 300 m2. Au départ, c'était une ancienne usine. Fermée depuis 30 ans. Beaucoup de gens ont mis la main à la pate dont notre directeur artistique Walid Aidoud qui est du domaine et qui nous a beaucoup aidés. La cible est représentée par ceux qui veulent créer de la valeur, elle peut être artistique économique ou sociale. Ce qui est bien ici est le fait qu'il existe un labo pour le prototypage, pour ceux qui veulent faire du trois D. Notre objectif est de réunir des jeunes qui veulent vraiment faire des choses. Donc on essaye de les regrouper, de faire des petits workshop etc», nous a déclaré Abdellah Malek, un des copropriétaires de cet espace. Parmi les artistes exposants du collectif 220, on citera Awal Houati qui nous dévoile des photos de son voyage en Iran. Ces photos témoignent de la vie courante dans ce pays bien conservateur, entre femme en djellabas et autres hommes dans une mosquée ou encore vue sur une voiture au- devant de laquelle on reconnaît le portait de Khomeini. L'artiste a choisi plutôt une vision bien lisse de l'Iran actuelle, loin de la nouvelle modernité qui le caractérise. Ses photos sont partagées en gros entre des scènes d'intérieur et d'autres à l'extérieur, le tout décliné en couleur. Fethi Sahraoui a choisi d'intituler ses photos en anglais «Raw tender. Shirtles». Il s'agit pour la pluspart des portraits d'enfants sur plage soit debout, ou allongés sur le sable, certains regardent l'objectif tandis que d'autres sont pris par surprise. Abdou Shanan a un parcours atypique. Né d'un père soudanais et de mère algérienne, il a fait des études en télécommunications en Libye, mais aussi un stage à Paris, aussi ses photos également prises en noir et blanc (la tendance qui prédomine lors de cette expo) parlent d'exil, de ces gens qui sont souvent dans la marge et donc en décalage par rapport au reste de la société. Ils sont dans l'incapacité de communiquer avec l'Autre. Ainsi ses photos qui s'apparentent à des plans pris au vif témoignent de l'état de léthargie de ces gens illustrés par des portraits humains où souvent l'on voit des «morceaux» d'homme et de femme dont la partie du corps est effacée car sortie du cadre. «C'est le lancement officiel du collectif. On est des amis. La première fois qu'on a parlé du collectif c'était dans la chambre 220. On a décidé d'être dans un collectif pour s'entraider. On collabore entre nous. Chacun de son côté on ne pourra pas faire grand chose», fait-il savoir. Pour sa part, Yassine Belahsène de Béjaïa, photographe autodidacte signe avec sa collection «Errance» une magnifique fresque psychologique de l'être humain dans sa totale solitude. Entre brouillard ou pluie embuant une fenêtre, entre reflet et ombres/ silhouettes se dessine un ciel sombre, chargé de douleur et de gris solitaire. Un flou inquiétant plane comme un mystère sur ces photographies et c'est ce qui les rend davantage intéressantes. En gros, notre coup de coeur! Houari Bouchenak est diplômé quant à lui en chimie industrielle, cela ne l'a pas empêché de rejoindre une agence de communication où il deviendra photo-reporter. Depuis, pour faire court, il a la photo dans le sang! Ses photos réunies sous le générique «l'oubli d'être en vie», témoignent quant à elles de cette frange de la population marginalisée par un choix esthétique avéré comme par exemple ces deux chaises vides face à un mur ou encore ces deux bottes devant un baril, tandis que les autres photos, toutes aussi éloquentes émotionnellement montrent des hommes et des femmes en état de déstresse. Revenant à la gent féminine qui, décidément, est peu nombreuse, mais qui hasard ou coïncidence, opte pour la couleur, est le cas de Sonia Merabet qui, au départ a fait des études de création de mode à Londres. Toujours attirée par l'univers chatoyant de la photo, Sonia nous propose ici des fragments de ses villégiatures dans le pays, que ce soit de jour ou de nuit, dans le Sahara ou à Béjaïa. Des images épurées et qui contrairement à beaucoup d'autres respirent la paix et la quiétude intérieures. Inaugurée samedi dernier, il est bon de savoir que l'expo du collectif 220 sera visible à l'espace Sylabs durant un mois.