Le président vénézuélien, Nicolas Madura, contesté par l'opposition L'opposition au Venezuela espèrait boucler hier la validation des signatures en faveur d'un référendum afin de révoquer le président Nicolas Maduro, une étape cruciale pour cette consultation qu'elle veut organiser. Pendant cinq jours, des milliers de Vénézuéliens ont fait la queue devant les centres électoraux pour apposer leur empreinte digitale et confirmer ainsi leur signature présentée en avril. L'opposition de centre droit, majoritaire au Parlement, a besoin que le Conseil national électoral (CNE) légalise 200.000 signatures, sur les 1,3 million recueillies par l'opposition puis pré-validées par cet organisme. Jeudi, l'optimisme régnait parmi la coalition de la Table pour l'unité démocratique (MUD): dans 23 des 24 Etats du pays, elle disait avoir atteint le minimum requis, équivalent à 1% de l'électorat de chaque région. Dans l'Etat de Nueva Esparta (nord), il manquait seulement 200 signatures à valider. «Le total des signatures validées jusqu'à présent est de 326.381. Nous avons surmonté tous les obstacles», s'est réjoui la députée d'opposition Delsa Solorzano. Une fois cette étape franchie, le CNE - accusé par l'opposition de jouer le jeu du gouvernement en tentant de gagner du temps - annoncera le 26 juillet si le processus peut suivre son cours. Le temps est précieux pour l'opposition: si elle veut provoquer des élections anticipées, elle doit organiser le référendum d'ici au 10 janvier 2017. Sinon, elle n'obtiendrait que le remplacement de M.Maduro par son vice-président, du même parti. Si elle a le feu vert du CNE fin juillet, elle devra réunir quatre millions de signatures en trois jours pour avoir enfin le droit de convoquer la consultation. Durant la semaine, la MUD a accusé le chavisme (du nom de l'ex-président Hugo Chavez, 1999-2013) de vouloir saboter le processus. Le référendum reste en effet suspendu à l'issue du recours judiciaire déposé par le camp présidentiel, qui demande une annulation pour «fraude» à la signature. Il est aussi menacé par les récentes émeutes liées aux pénuries alimentaires, la présidente du CNE, Tibisay Lucena, ayant prévenu que toute violence entraînerait «la suspension immédiate du processus jusqu'au rétablissement de l'ordre». Car le pays pétrolier, dont l'économie s'est effondrée avec la chute des cours, est en pleine ébullition sociale: pillages et lynchages se font plus nombreux, les habitants étant lassés d'une pénurie frappant 80% des aliments et de la pire inflation au monde (180,9% en 2015). Ces troubles ont fait au moins cinq morts ces dernières semaines. Nicolas Maduro, héritier politique de Hugo Chavez, n'a plus que 25% de soutien parmi la population, selon un sondage de Datanalisis. «Le changement ne sera pas immédiat, mais le référendum est une étape», confiait cette semaine une étudiante en pharmacie de 28 ans faisant la queue face à un supermarché de l'est de Caracas. Près du même supermarché, un économiste en retraite de 64 ans, assurait, lui, que «cette année, il n'y aura pas de référendum». «Ils ne vont pas faire partir Maduro, ni par l'OEA (l'Organisation des Etats américains, qui fait pression pour le référendum, ndlr) ni par un coup d'Etat. Je fais la queue tous les jours et cette situation me met en colère, mais je résiste car c'est une guerre économique de la bourgeoisie» confiait-il, reprenant les arguments du président qui accuse la droite de créer artificiellement les pénuries pour le déstabiliser. Malgré son impopularité, le chef de l'Etat, qui compte encore le soutien de l'armée, de la majorité des institutions et d'un noyau dur de chavistes, reste serein: «S'il y a un référendum, nous irons et nous gagnerons, s'il n'y en a pas, la vie politique du pays continuera», affirmait-il jeudi. Si la consultation est organisée, il faudra dépasser le score de Maduro à l'élection présidentielle de 2013 (7,5 millions de voix) pour le faire partir.