Les chefs d'entreprises français préfèrent, pour l'heure, attendre. Annoncée en grande pompe aussi bien par la représentation diplomatique française à Alger que par le patronat algérien, la troisième rencontre algéro-française des chefs d'entreprises n'aura finalement rien apporté de concret en matière de partenariat. Le Medef semble toujours camper sur ses positions, notamment la réforme du système financier algérien avant de passer à l'acte. C'est du moins ce qui ressort officiellement de la conférence de presse animée, avant-hier à l'hôtel Sofitel, par le président du comité algérien de Medef International, M.Yves Thibault de Silguy, et le président du forum des chefs d'entreprises algériens, M.Omar Ramdane. Il y a eu certes beaucoup d'échanges d'informations entre les Français qui étaient fortement représentés et les Algériens qui l'étaient moins, si on compte le nombre de chefs d'entreprises de notre pays, qui ont pris part à la rencontre, mais le constat est malheureusement là. Malgré une réelle volonté politique des Français pour renforcer la coopération avec les Algériens, les hommes d'affaires de l'Hexagone sont toujours réticents et semblent vouloir encore davantage de garanties. M.Yves Thibault de Silguy, devant les journalistes, a été aussi clair que l'eau de roche. D'après lui, une entreprise française qui veut investir en Algérie doit avoir un système financier fiable. «La réforme bancaire est un élément clé», a-t-il souligné. Le problème du foncier industriel, le manque d'infrastructures (routes, logements, hôtels) sont également autant de préoccupations de l'ex-commissaire européen aux affaires monétaires et l'un des initiateurs de l'euro. En citant le développement du partenariat avec la Chine, M.Thibault, qui se targue de connaître parfaitement ce pays, a déclaré que la Chine a commencé à construire ses infrastructures, ce qui a permis l'installation rapide de sociétés étrangères. Bref, si pour le savoir-faire, les Français sont prêts à le transmettre aux Algériens, pour ce qui est des capitaux et l'investissement direct en Algérie, les chefs d'entreprises français préfèrent, pour l'heure, attendre. M.Ramdane, président du Forum des chefs d'entreprises algériens (FCE) a beau expliquer que l'Algérie a engagé des réformes dans des moments extrêmement difficiles et que malgré la brutalité de ces réformes, beaucoup d'avancées sont aujourd'hui constatées, il ne convainc guère. Pourquoi? La réponse a été donnée par le ministre des Finances, M.Abdelatif Benachenhou, bien avant la conférence de presse. «Les Algériens ne savent pas ce qu'ils veulent», a-t-il dit lors d'une intervention, quelques heures plutôt. Oui, il est clair actuellement que les entreprises algériennes doivent d'abord se mettre à niveau pour postuler à un partenariat. Ce constat est venu de la part même des chefs d'entreprises algériens que nous avons rencontrés tout au long de la rencontre avec le Medef. D'après le représentant de l'Association des entrepreneurs algériens (Agea) à Paris, beaucoup de Français veulent venir en Algérie, mais pour l'heure, aucune étude sérieuse ne leur a été proposée. Selon lui, les chefs d'entreprises algériens devraient d'abord se réunir et se concerter et proposer, en attendant l'application des réformes engagées par le gouvernement, des dossiers bien ficelés à leurs homologues français. C'est la logique même. En attendant, le marché algérien reste ouvert à tout le monde. Les atouts dont dispose notre pays sont considérables. Il reste, comme l'a si bien dit le grand argentier du pays, aux Algériens de savoir clairement ce qu'ils veulent.