Un objectif, reprendre pied en Afrique Exclu du continent africain, vivement critiqué dans d'autres, pour sa politique agressive et son mépris vis-à-vis des institutions internationales dont l'ONU, Israël cherche aujourd'hui à obtenir un soutien. Annoncée il y a environ trois mois, la visite que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu va effectuer en Ouganda, au Kenya, en Ethiopie et au Rwanda tranche a priori par sa rareté tant l'Etat sioniste est massivement rejeté par la quasi-totalité des pays du continent. Bien que le programme de cette tournée officielle n'ait pas été dévoilé, il s'agirait de trouver des débouchés commerciaux et de permettre ainsi à Israël de remettre pied dans certains pays en Afrique. En réalité, d'autres objectifs motivent Netanyahu, à commencer par la commémoration du 40e anniversaire sur les lieux même de l'opération qui a coûté la vie à son frère, membre du commando qui tenta de libérer les otages du vol Tel-Aviv - Paris détourné par des Palestiniens et des Allemands, le 4 juillet 1976, en Ouganda. Cette visite avait donc été annoncée en février, et Netanyahu avait pris soin d'indiquer en Conseil des ministres qu'elle «fait partie d'un effort majeur de notre part pour revenir en Afrique par la grande porte». Pour quelles raisons latentes? Israël qui vit depuis des décennies sous perfusion, son économie étant soutenue à bout de bras par les Etats-Unis, d'une part, et l'ensemble des organisations membres du Congrès juif mondial, d'autre part, cherche davantage une retombée politique qu'un véritable gain économique à travers cette visite. Certes, il y a aura l'ouverture de bureaux de l'Agence israélienne pour le développement international dans les quatre pays ciblés, la chose ayant été allègrement approuvée par le cabinet sioniste. Il est même dit que cette Agence partagera avec les pays en développement les technologies et le savoir-faire israéliens. De quoi appâter des armées africaines qui peinent à garantir la stabilité et la sécurité de leurs Etats respectifs, car le principal axe de cette coopération sera d'entériner des échanges d'armements plus ou moins sophistiqués et surtout de renseignements. Netanyahu parle d'une enveloppe de 13 millions de dollars (11,7 millions d'euros) consacrée au «renforcement des relations économiques et de la coopération avec les pays africains» et qui porte principalement sur une formation dans les domaines de la «sécurité nationale» et de la santé. «L'avantage comparatif d'Israël dans ces domaines a créé un grand intérêt pour les pays africains qui cherchent une formation auprès d'Israël», considère l'entourage du Premier ministre qui juge que «le continent africain constitue un vaste potentiel pour Israël», à un moment où l'Afrique ne représente que 2% du commerce extérieur israélien. «L'Afrique, qui possède aujourd'hui l'un des plus forts taux de croissance au monde, renferme de nombreuses opportunités commerciales dans des domaines où l'expertise israélienne fait autorité, comme l'agriculture, les télécommunications, l'énergie renouvelable et les infrastructures», a également argumenté un responsable des Affaires étrangères israéliennes. Mais la raison fondamentale est tout autre. Isolé sur le continent africain, vivement critiqué dans d'autres, pour sa politique agressive et son mépris vis-à-vis des institutions internationales dont l'ONU, Israël cherche aujourd'hui à obtenir un soutien de certains pays africains, qui, avec leur vote, lui permettraient de faire fi des vives critiques liées à l'occupation des Territoires palestiniens ainsi que de ses activités nucléaires. Totalement discrédité en Afrique depuis les années 1970, lorsque la majorité des pays avait pris dans le cadre de l'OUA, ancêtre de l'actuelle Union africaine, ses distances avec l'Etat sioniste, Israël cherche surtout une absolution. Le paradoxe est qu'il s'y attelle au moment où sa politique expansionniste a atteint le summum de l'arrogance et du parti pris. L'Union africaine qui siège à Addis-Abeba mettra-t-elle pour la circonstance ses drapeaux en berne?