L'Alliance atlantique va-t-elle remettre la Guerre froide à l'ordre du jour, 27 ans après qu'elle a été déclarée finie? Le répit n'aura donc duré qu'un peu plus d'un quart de siècle pour revenir à ce que les états-majors politiques et militaires connaissent le mieux: préparer la guerre pour, assurent-ils, préserver la paix. L'antienne est connue et l'on sait également comment le monde a été - au moins à deux reprises - au bord du gouffre au XXe siècle. Dès lors, le sommet de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord [Otan (Alliance atlantique) regroupant 28 pays, dont 10 de l'ex-Europe orientale communiste et anciens membres du pacte de Varsovie] qui s'est tenu dans la capitale polonaise les 8 et 9 juillet, a été tout sauf pacifique et les déclarations musclées du chef de l'Otan, Jens Stoltenberg, en témoignent. De fait, les enjeux du sommet de Varsovie ont été multiples: entamer un vaste redéploiement à l'Est, restructurer la défense commune européenne, outre d'adresser un message de fermeté à la Russie. Varsovie a ainsi scellé de fait irrémédiablement le destin des ex-démocraties populaires européennes et notamment les trois pays Baltes [Estonie, Lettonie et Lituanie] à l'Alliance atlantique. C'est dans ce contexte qu'ont été prises les dernières décisions de l'Otan en direction des pays Baltes et de la Pologne. Pour les rassurer? Contre quelle menace? Celle de la Russie, bien sûr, dont «l'activisme», à en croire les analystes occidentaux, ne laisse pas d'inquiéter. Demeurant dans le manichéisme du «bon» (toutes les entreprises de l'Otan, y compris les plus périlleuses pour la paix, sont congrues) et du «méchant» (la Russie, dont le fantôme de l'ex-Urss empêcherait ses «paisibles» Etats frontaliers de vivre dans la quiétude) l'Occident n'en finit pas de revisiter le spectre du chaos, ne tirant aucune leçon des deux conflagrations mondiales qui faillirent détruire notre planète. En fait, les dernières décisions de l'Otan, outre d'être perçues [par la Russie] comme une provocation délibérée, poussent Moscou dans ses ultimes retranchements. Le premier responsable de l'Alliance atlantique, Jens Stoltenberg, a d'ailleurs assuré récemment: «Nous avons pris la décision de renforcer notre présence militaire avancée (...). Je salue les engagements pris par plusieurs Alliés dans ce domaine.» Le patron de l'Otan a aussi admis qu'il «s'agissait du plus grand effort de défense» entrepris par son organisation depuis la fin de la Guerre froide. Et pour cause! Les habituelles «manoeuvres de printemps» ont pris cette année une ampleur sans précédent. Ainsi, «Anaconda» a rassemblé 31.000 soldats et de multiples équipements. D'autre part, l'opération «Saber Strike 2016» a réuni 10.000 soldats issus de 13 Etats, dont l'objectif était de se «porter en urgence» sur les théâtres d'opération baltes devant des forces russes. Last but not least, notons encore ledit «exercice Baltops» un agencement sur mer avec 6100 marins et soldats. Ces démonstrations de force de l'Otan et ses alliés ont précédé le sommet en Pologne des 8-9 juillet derniers. Cela étant - en fait, l'équilibre stratégique entre l'Otan et la Russie est rompu - l'Alliance ne cherche que la paix, assure Jens Stoltenberg. Le patron de l'Otan affirme que son organisation «ne souhaitait pas qu'une nouvelle Guerre froide éclate» avec la Russie.. En effet, selon lui, l'Otan, «s'applique à éviter une escalade des tensions et prône un dialogue ouvert avec Moscou». M.Stoltenberg est même allé à dire que l'Otan ne voyait pas dans la Russie «une menace directe». Ce qui n'empêche pas l'Otan de mettre en place tous les ingrédients pour une (possible) confrontation avec la Russie. De fait, les bases militaires de l'Alliance atlantique et des Etats-Unis encerclent quasiment les frontières de la Russie. Pour appuyer cet étonnant pacte de «non-agression» l'Otan va déployer en Pologne et dans les pays Baltes quatre bataillons de 4000 hommes. Déploiement effectif à partir de 2017. Et cerise sur le gâteau, les Etats-Unis ont ouvert en mai dernier une base du bouclier antimissile à Deveslu en Roumanie. Une autre similaire est prévue en 2018 en Pologne. Or, pour Moscou le déploiement d'un bouclier antimissile en Pologne est une «ligne rouge» à ne pas franchir, de même qu'une adhésion de l'Ukraine et de la Georgie à l'Otan, demandée avec force par Kiev et Tbilissi. Toutefois, le retour à la doctrine de la dissuasion-containment, chère à Truman [déclaration du président US Harry Truman en 1947], qu'effectue l'Otan reste périlleux pour la paix et relance la course aux armements!