Le Pr Ysmail Dahlouk C'est l'Association des amis de Miliana qui a organisé en ce samedi 9 juillet 2016 à la salle Mahfoud Touahri, cette chaleureuse et évocatrice rencontre. Comme de tradition, la ville de Miliana était au rendez-vous de la pensée et du souvenir pour solennellement commémorer le 54ème anniversaire de l'Indépendance de l'Algérie, victorieusement arrachée par son peuple au prix d'un très lourd tribut et du sacrifice suprême des meilleurs de ses enfants. Cette année, dans le prolongement du cycle d'hommages dernièrement célébrés à l'endroit des illustres Mustapha Ferroukhi et Mohamed Bouras deux repères emblématiques du Mouvement national et de la guerre de libération natifs de la perle du Zaccar, ce fut le tour du Pr Ysmail Dahlouk, un autre fils prodigue de Miliana d'être à travers son prestigieux parcours de moudjahid, revisité dans la symbolique d'une communion de pensée collective de ses amis et de la population de cette ville d'histoire, de culture et de mémoire. Issu d'une famille d'origine milianaise, Ysmail Dahlouk est né le 31 janvier 1931 dans cette ville ancestrale de patrimoines et de traditions citadines, où après sa scolarité au terroir, il accomplit brillamment un cycle d'études secondaires au lycée ex-Bugeaud de référence, actuellement Emir-Abdelkader et au terme du baccalauréat 2ème partie de l'époque, pour poursuivre des études universitaires à la Faculté de médecine d'Alger jusqu'au 19 mai 1956 date de l'appel historique de l'Union générale des étudiants musulmans algériens Ugema à la grève générale illimitée des étudiants. Dans cette conjoncture particulièrement décisive, il retourna à Miliana où comme chaque été il exerçait temporairement pendant la période des vacances à l'hôpital de Miliana avec le docteur chirurgien Bentoumi. C'est dans de telles conditions qu'il prit contact avec une de ses relations de jeunesse Si Mohamed Lalaoui, un responsable politique du FLN qui organisa sur son insistante demande son départ au maquis en Août 1956 dans la région du Zaccar où après un court séjour, l'étudiant en médecine Ysmail Dahlouk fut désigné en qualité de responsable d'une structure d'interventions sanitaires de proximité de la Zone 2 de la Wilaya IV historique couvrant territorialement Alger, Tipasa, Blida et Médéa. Enclavée dans d'intenses ratissages dévastateurs et meurtriers de l'armée coloniale, cette région fut le théâtre de celui impressionnant du 6 mars 1958 à Ouled Ali «ex-Champlain Médéa» où cette casemate salutaire de fortune fut détruite emportant avec elle quatre malades froidement achevés par la mitraille ennemie et le moudjahid Ysmail Dahlouk sérieusement blessé et transféré en hélicoptère à Damiette (Médéa) pour être soumis à un interrogatoire et à d'horribles séances de tortures en dépit de l'état critique de ses multiples blessures qui nécessitèrent une intervention chirurgicale pratiquée dans l'urgence par ses bourreaux à l'hôpital militaire de Médéa. Arrêté, il séjourna successivement dans la sinistre cellule de la DST de Bouzaréah, prélude à son internement dans les prisons de Miliana, Blida et de l'ex-Maison-Carrée El Harrach. Il connut également la cauchemardesque villa «Susini» à Alger et sera présenté au tribunal militaire qui le condamna à 5 années de travaux forcés avant d'être gracié en 1960 par des mesures d'amnistie promulguées par le général de Gaulle et retrouva ainsi la liberté après un dernier internement au Camp d'incarcération de Béni Messous. Après l'Indépendance, le Pr Ysmail Dahlouk reprit ses études en médecine pour devenir le pionnier de la dermatologie en Algérie et entreprendre également une mission déterminante de besoin vital par la formation de promotions successives de spécialistes suite à l'exode massif des seuls praticiens français à l'époque. Figure familière de la place Maurice-Audin le Pr Ysmail Dahlouk avait son cabinet médical en cette artère principale d'Alger qui l'a ainsi adopté avec ses patients qu'il recevait avec l'amabilité, l'art de la communication et de l'échange qui était le sien et auprès desquels il jouissait d'une grande estime et considération. L'auteur de ces lignes était de ceux-là pour l'avoir connu et apprécié en ce lieu lors de multiples consultations médicales empreintes de réconfort et de courtoisie. C'est l'Association des amis de Miliana qui a organisé en ce samedi 9 juillet 2016 à 10 heures à la salle Mahfoud Touahri, cette chaleureuse et évocatrice rencontre animée par le docteur Khouatmi Lotfi et le Pr Nadir Boumaza avec le concours et le soutien des autorités locales, notamment le chef de daïra, le président de l'Assemblée populaire communale de Miliana et l'Organisation nationale des moudjahidine. Devant une nombreuse assistance très attentive, les historiens de renom Mohamed El Korso, Abderrahmane Khalifa, Fouad Soufi ont rehaussé l'événement par de brillantes et instructives communications centrées sur la genèse historique de la ville de Miliana et de la guerre de libération amplifiées dans l'émotion par l'écho d'une captivante pièce théâtrale interprétée avec brio par de jeunes élèves filles et garçons de l'école primaire «Khadidja Oum El Mouminine» de Hadjout. Le moment de réjouissance et de grande émotion a été marqué par la cérémonie de la remise du trophée du souvenir au Pr Ysmail Dahlouk, visiblement ravi et heureux, par son ami et ancien ministre de l'Intérieur M'hamed Hadj Yala, ceci sous des acclamations ininterrompues de l'assistance et les youyous d'allégresse des femmes présentes en force en la circonstance. Un acte de pensée collective vient d'être ainsi célébré avec ferveur à l'endroit du Pr Ysmail Dahlouk qui, à travers son parcours incarne le souvenir vivace d'une glorieuse épopée historique immortalisée par l'amour de la patrie, la dignité, le courage et le sacrifice de l'élite intellectuelle algérienne qui a spontanément répondu à l'appel de l'Union générale des étudiants musulmans algériens Ugema du 19 mai 1956. Une date phare de la guerre de libération transcrite en lettres d'or dans la mémoire collective du peuple algérien avec sa légendaire et lumineuse devise: «Avec un diplôme en plus nous ne ferons pas de meilleurs cadavres. Notre devoir nous appelle à la souffrance quotidienne aux côtés de ceux qui luttent et meurent face à l'ennemi.» Un legs mémoriel sacré à transmettre à la postérité, à la jeunesse et aux générations futures à dessein de pérenniser une symbolique de sacrifices et d'amour voués à l'Algérie éternelle. Ceci en une fidélité au serment pour ne point oublier et pérenniser le souvenir en direction de la jeunesse et des générations montantes.