Le Conseil des ministres vient de décider. Il accorde un champ d'intervention très large aux binationaux. Ceux qui le veulent, peuvent être utiles à l'Algérie. Quant aux autres... Tempête dans un verre d'eau. Depuis mardi dernier les choses sont plus claires. Le Conseil des ministres présidé par le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, a adopté «la liste des hautes responsabilités de l'Etat ainsi que des fonctions politiques dont l'accès requiert la nationalité algérienne exclusive». Un peu plus d'une dizaine de fonctions civiles sont énumérées ainsi que «les principales responsabilités et fonctions au sein de l'Armée nationale populaire...(qui)... pourraient être élargies à toute autre responsabilité militaire qui sera décidée par décret présidentiel». Parmi les fonctions civiles figurent la présidence du Sénat, de l'APN, de Premier ministre, de ministre, la présidence de la Cour suprême, du Conseil d'Etat, le poste de gouverneur de la Banque d'Algérie, les responsables des services de sécurité et enfin la présidence de la haute instance indépendante chargée de la surveillance des élections. Mis à part ces fonctions, nos binationaux ont tout loisir de participer au développement du pays. Tous les au-tres secteurs leur sont ouverts. Dans l'économie, à l'université, dans la médecine, dans les Ntic, etc. Normalement et maintenant que la liste est connue on se rend compte que la polémique autour de l'article 51, qui a eu lieu au cours du débat sur la révision de la Constitution, était disproportionnée. Pour mieux l'admettre, il faut au moins s'entendre sur ce qu'est la binationalité. Quand un Algérien possède une deuxième nationalité, celle-ci ne lui a été ni imposée ni ne découle d'une quelconque automaticité. C'est lui qui en fait la demande. Là où les raisons le regardent. C'est sa vie privée. Ensuite, il faut qu'il réponde à des critères précis. A des engagements aussi. Pour qu'enfin l'Etat étranger lui accorde ou pas sa nouvelle nationalité. Donc il y a tout un parcours et des obligations à accomplir qui sont loin d'être simples pour cette acquisition. La démarche est longue, minutieuse et fastidieuse. Il faut vraiment le vouloir pour ne pas abandonner en cours de route. Une fois acquise, cette nouvelle nationalité fait de son titulaire un citoyen à part entière dans le pays où il vivait en étranger. Ceci ne lui fait aucunement perdre la nationalité de son pays d'origine. Un double avantage que personne ne peut lui reprocher dès lors qu'il ne s'agit que d'améliorer ses conditions de vie dans le nouveau pays qu'il s'est choisi. D'ailleurs et à aucun moment cette double nationalité ne lui pose de problèmes dans son pays d'origine. Ni sur le plan des droits civiques ni sur les mentalités des Algériens restés au pays, qui ont réussi à dépasser l'idée qui prévalait avant l'indépendance et qui faisait des naturalisés des traîtres. Les temps ont changé et les esprits se sont adaptés. Jusque-là et vue sous cet angle, posséder la double nationalité fait partie d'une certaine normalité. Une normalité que le débat sur l'article 51 lors de l'adoption de la nouvelle Constitution est venu perturber. Certains milieux se sont crus investis du droit de réclamer l'accès aux binationaux aux hautes responsabilités dans notre pays et que nous avons cité plus haut. Alors qu'il n'est même pas sûr que c'est le souhait de la majorité des binationaux. De toutes façons et aux âmes bien nées, il est inconcevable et inadmissible pour les Algériens qui n'ont pas de patrie de rechange d'être dirigés par des personnes qui en ont deux. Si des cas ont existé avant la nouvelle Constitution, il est heureux que l'erreur ait pu être corrigée. C'est même, de toute évidence, ces cas qui sont à l'origine de la prise de conscience. Pour faire simple et sans pousser le bouchon, disons que c'est la porte des conflits d'intérêts qu'il fallait impérativement fermer. Après, on peut aborder les autres fonctions ouvertes à l'accès des binationaux. Elles sont nombreuses comme mentionné plus haut. Le tout est de s'assurer qu'elles n'entraînent aucune incompatibilité. Et si après la publication de la liste par le Conseil des ministres, certains continuent, malgré tout, à la contester, cela deviendra plus que douteux. Et malsain. Surtout pour la normalité dont on parlait tout à l'heure et qui en prendrait un sérieux coup. Soyons raisonnables et positifs. Continuons à applaudir la réussite à l'étranger de nos binationaux. Continuons à les accueillir chaleureusement lors de leur venue en vacances. Pour le reste rappelons les mots, restés gravés dans l'histoire, prononcés par le président américain, John Kennedy, lors de son discours d'investiture, le 20 janvier 1960. «Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous. Demandez ce que vous pouvez faire pour votre pays», a-t-il lancé à ses compatriotes. L'appel peut s'appliquer à nos binationaux. Au moins pour ceux qui sont partis à l'âge adulte et à qui l'Etat algérien a donné tout ce qu'il a pu. Ils peuvent à leur tout donner à l'Algérie ce qu'ils peuvent. Même la bonne parole de là où ils sont! [email protected]