Sous le burkini se déroule une féroce bataille politico-idéologique. Chacun teste la résistance de l'autre. «Madame, au nom de la loi, déshabillez-vous!». L'image de quatre policiers obligeant une femme musulmane sur une plage de Nice à se défaire en public de son burkini a fait le tour du monde et suscité une grande indignation dans les médias internationaux. La communauté musulmane a été heurtée et blessée dans son amour-propre. En matière de propagande pour le recrutement de potentiels djihadistes, Daesh a été copieusement servi et voilà la France qui s'enlise sur la plage. Le débat s'enflamme au sujet du burkini créant une situation inédite à l'Hexagone et s'ensuit une incroyable politique qui entoure d'une éventuelle interdiction cet accoutrement qui effraie la France. On va l'interdire au nom de quoi? Des usages de la culture française? Au nom de l'égalité entre les hommes et les femmes? Interdire le burkini revient à restreindre le droit fondamental qu'est la liberté de religion, garantie dans la Constitution ainsi que dans divers instruments juridiques internationaux tels que la Convention européenne des droits de l'homme. Ce «détail» est loin d'encombrer l'ancien président français Nicolas Sarkozy. Il s'est dit prêt à ce que la Constitution de la République française soit changée pour le burkini. Interrogé par la radio française RTL, sur le caractère anticonstitutionnel d'une pareille loi, M.Sarkozy n'a pas vu d'inconvénient pour «changer la Constitution s'il le faut». «On l'a changée une petite trentaine de fois, c'est pas gênant», a-t-il renchéri. Le président des Républicains se distingue ainsi de son adversaire aux primaires, Alain Juppé, qui a exprimé son opposition franche à une loi interdisant le burkini. «Nous avons un mode de vie, nous avons des coutumes, nous avons des usages, nous avons des principes, et je n'ai nullement l'intention d'accepter le moindre compromis raisonnable sur ce sujet», a appuyé Nicolas Sarkozy. Le ministre français de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, lui, avertit qu'une loi interdisant le port du burkini serait «inconstitutionnelle, inefficace» et risquerait de créer «d'irréparables tensions». Si la burqa et le niqab cachent totalement ou partiellement le visage, ce qui a été jugé susceptible de porter atteinte à la sécurité publique, le burkini ne couvre pas le visage, mais uniquement une partie du corps. Il est difficile de transposer des motifs sécuritaires à la situation du «burkini»? Que dire alors des surfeurs, des plongeurs, des personnes à la peau fragile aux rayons solaires? La polémique s'est étendue à tous les courants politiques français réveillant de vieilles rivalités. Sous le burkini, se déroule une féroce bataille politico-idéologique. Chacun teste la résistance de l'autre. La droite française tente de ratisser au sein de l'extrême droite quitte à blesser dans son amour-propre une partie de la population française composant la communauté musulmane. L'autre bord de cette rixe circonscrite à une plage, est composée d'associations d'extrémistes qui alimentent la controverse en finançant des avocats pour entamer des recours devant des juridictions administratives. Pourtant, la France aurait pu faire l'économie de cette controverse eu égard au climat sécuritaire et à la situation économique fragiles. Le débat en lui-même occulte des problématiques bien plus préoccupantes pour le quotidien des Français. Les effets de cette situation ont été mal vécus. Il y a un sentiment de stigmatisation d'une partie des Français sur la base d'un critère religieux. Les idées, les arguments avancés dans ce débat rappellent étrangement le candidat républicain à la présidentielle américaine Donald Trump qui a multiplié les attaques contre les musulmans allant jusqu'à suggérer une «fermeture totale» des frontières américaines aux musulmans et recourir au contrôle du faciès. C'est dire que dans son faux débat sur le burkini, la France se Trump.