Vingt-trois vols ont été signalés cette nuit-là. Deux jeunes sont pris. L'un d'eux porte un couteau... Nassim Chifouf explique le pourquoi de son appel auprès de la cour. Mim Aïssa, le juge, écoute en précisant d'emblée aux deux détenus qu'ils ont été neutralisés en flagrant délit de vol de poste-radio, fait prévu et puni par l'article 350 du code pénal. Zakaria, le second détenu se tient debout et sa jeunesse n'a d'égal que le désarroi qui l'habite depuis sa condamnation en 1re instance. Zakaria reconnaît le port de poignard mais pas le vol. Nassim opina du chef. Le second prévenu fait aussi dans la délation en informant que la rue où ils ont été arrêtés grouille de drogués, de voleurs, de trabendistes. «Nous n'avons pas volé la voiture», dit-il. La victime lève le doigt: «Il ne dit pas la vérité. Lorsque je me suis approché de mon auto, j'ai vu le déflecteur brisé et la disparition de l'autoradio». - Vous les avez vus, ces deux jeunes, demande le président? La victime répond par la négative. Les avocats sont ravis de cette réponse. La deuxième victime aussi n'a rien vu. La dernière victime, elle, n'est pas sûre de les avoir vu voler l'autoradio. Boukhatem demande la confirmation du jugement prononcé en 1re instance. Me Ahcène Djaâfri salue la franchise de ces trois victimes-témoins. Il rappelle qu'elles avaient déposé plainte contre X, pas contre Nassim ni Zakaria. L'avocat sème-t-il le doute dans l'esprit du trio de magistrats? Difficile. Il parle de pression des policiers au cours de cette nuit où vingt-trois méfaits avaient été commis dans le coin. «Certains d'entre eux étaient heureux de rencontrer les deux jeunes pour avoir la conscience tranquille du devoir accompli», s'est écrié le défenseur qui a demandé aux juges d'être raisonnables et ne pas suivre aveuglément le PV d'audition de la PJ où il est transcrit des aveux «suggérés». C'est la règle du jeu. Le procès se déroule à l'audience pas dans un petit bureau tamisé. Pour le port de l'arme blanche, Me Djaâfri affirme que son client la portait pour des raisons de débrouille. «Durant le jeûne, il a une table d'herbes aromatiques utilisées pour la soupe du crépuscule». Me Benguitoun, pour Nassim, appuie sur le «niet, nous n'avons pas volé» des deux détenus. Il veut savoir si les vrais voleurs n'étaient pas en train d'écouter l'autoradio volé avant de l'écouler loin de Blida. Puis il revient sur la bonne foi de ces jeunes condamnés à un an de prison ferme par le tribunal: «Mon client, le jeune Nassim, a interjeté appel car il s'est estimé méprisé. Il me l'a dit. Il n'y est pour rien dans toute cette histoire de vol», a expliqué l'avocat brun alors que son confrère ne cessait de fixer le trio de juges dont Rechache, cette vigilante conseillère de Mim, dont le respect soulevé à chaque audience laisse les initiés ravis d'avoir affaire à de tels magistrats. Ce n'est pas un secret de Polichinelle que de rappeler qu'un magistrat bosse autour d'un dossier heureusement assez souvent bien ficelé. C'est pourquoi ce dimanche, les quarante-deux détenus entendus par les membres de la chambre pénale étaient mi-heureux, mi-tenaillés par la peur d'être renvoyés en taule, après la confirmation du verdict sévère prononcé en première instance. Les deux clients de Me Djaâfri et Benguitoun avaient une chance minime de passer entre les mailles du fillet «condamnation», surtout pour celui qui a été trouvé avec une arme blanche. Effectivement, malgré les deux percutantes interventions des deux défenseurs, Nassim et Zakaria ont entendu Mim, le président de la chambre correctionnelle: ils écopent d'une peine d'un an ferme. Me Djaâfri semblait déçu mais en homme de droit, il ne put que se plier à la décision définitive de la justice.