Des terroristes dispersés parmi la population Face à des terroristes qui ont multiplié les attaques-suicides pour ralentir leur progression, et contraints par un soutien de l'aviation de la coalition internationale jugé insuffisant, les troupes irakiennes ne devraient s'installer à Mossoul que dans un délai d'un mois, au mieux. Hier, les affrontements entre les forces spéciales irakiennes et les éléments du groupe Etat islamique (EI) se poursuivaient hier à Kirkouk, dans le nord de l'Irak, visé par plusieurs attaques de Daesh qui ont fait au moins 46 morts et pris les autorités par surprise, en pleine offensive sur Mossoul. Au sixième jour de cette opération de grande envergure contre le dernier bastion terroriste en Irak, Baghdad a dû dépêcher des renforts vers Kirkouk pour débusquer les snipers et autres kamikazes potentiels, qui sévissent dans cette ville, théoriquement sous contrôle kurde, où le couvre-feu total est rigoureusement imposé. La visite hier à Baghdad du secrétaire à la Défense américain, Ashton Carter, ne sera pas passée inaperçue tant la question du devenir ultérieur de Mossoul et, à un degré sous-jacent, de l'Irak lui-même est ouvertement posé par plusieurs parties prenantes au conflit, notamment la Turquie d'Erdogan. Les Etats-Unis qui dirigent la coalition internationale en appui aux forces de Baghdad n'ont pas une ligne politique claire, soutenant les uns malgré les autres, et faisant fi des antagonismes profonds qui opposent des alliés malgré eux. C'est d'ailleurs cette problématique qu'Ashton Carter semble venu débattre avec ses interlocuteurs irakiens qui voient d'un mauvais oeil les prétentions, avouées ou latentes, d'Ankara sur Mossoul, quand tout un chacun sait que la véritable inquiétude des Turcs a trait au rôle des peshmergas, proches du PKK, dans la libération de Mossoul. Avant même d'être acculés dans cette ville où ils devront se battre à un contre dix, dans le meilleur cas de figure, les terroristes de Daesh ont cherché à détourner l'attention sur une autre localité sise dans l'enclave kurde. Kirkouk a fait l'objet d'une série de raids vendredi à l'aube, prenant plusieurs édifices gouvernementaux et des mosquées. L'attaque qui a fait 46 morts et 133 blessés, principalement des membres des forces de sécurité, selon un responsable militaire du ministère irakien de l'Intérieur, alors qu'on compte 48 terroristes tués. Des sources proches de l'armée irakienne ont indiqué avoir recueilli auprès d'un terroriste capturé l'information selon laquelle Abou Bakr al-Baghdadi, en personne, a planifié cette attaque de Kirkouk dans le but de «réduire la pression sur le front de Mossoul». Partout dans la province de Mossoul et de Kirkouk, l'alerte est donnée quant au risque réel de réaction des cellules dormantes de Daesh, par le biais d'attentats-suicides menés par des éléments ceinturés d'explosifs, «actionnés en dernier recours, pour semer la panique et faire un maximum de victimes plutôt que d'atteindre un objectif militaire précis». Les milliers de peshmergas qui avancent vers Mossoul ont ralenti l'allure, sachant que le gouvernement irakien est très sourcilleux sur la composante des forces habilitées à occuper la ville, une fois que l'offensive contre l'EI sera concluante. Non loin de Baachiqa, les combattants kurdes feront le moment venu la jonction avec les forces spéciales irakiennes, par-delà Qaradosh à la périphérie est de Mossoul. Face à des terroristes qui ont multiplié les attaques-suicides pour ralentir leur progression, et contraints par un soutien de l'aviation de la coalition internationale jugé insuffisant, les troupes irakiennes ne devraient s'installer à Mossoul que dans un délai d'un mois, au mieux. Encore faudra-t-il qu' elles fassent front contre les 4000 éléments de Daesh dispersés au sein de la population, consentante ou forcée, et qu'elles oeuvrent au nettoyage maison par maison, rue par rue, quartier par quartier. On le voit, l'affaire est loin d'être simple et ne consistera pas, comme le pensent beaucoup, en un combat déséquilibré entre une coalition incroyable de plus de 60 pays et de plusieurs armées régionales, mais deviendra, bel et bien, une guérilla urbaine de tous les dangers au coeur de laquelle 1,6 million d'habitants seront pris au piège.