Le lait est vendu au compte-gouttes «Ce sont tous ces facteurs réunis qui ont donné une forte impulsion au secteur de la production de lait à Bouira, dont l'objectif à terme, est de devenir un bassin laitier qui compte à l'échelle nationale...». La réalité est qu'aujourd'hui se procurer un sachet de lait relève de l'exploit. La wilaya de Bouira connaît une crise sans précédent sur le lait. Depuis maintenant une semaine, le sachet se fait de plus en plus rare. Le manque touchera aussi le produit en pack, le lait de vache. «Cette rareté cache une augmentation», considère un citoyen. Quand il est disponible à des heures précises de la journée, il est vendu au compte-goutte et quelquefois sous le comptoir. La cause essentielle de cette pénurie reste la faiblesse de la production face à une demande de plus en plus grandissante. Ce constat révèle un paradoxe et soulève des interrogations. Il y a quelques années, les services agricoles vantaient les mérites de la wilaya et son projet d'être un bassin laitier national. On parlait en 2009 de 69.000 têtes ovines dont 39.000 vaches laitières. Côté production, on annonçait 70 millions de litres collectés contre 40 millions en 2008. Cette performance a été obtenue grâce au programme étatique de soutien à la filière lait, estimait un responsable du secteur. «Les agriculteurs et éleveurs n'hésitent pas à se reconvertir dans l'élevage bovin.» Cette option est expliquée par le montant de la subvention octroyée pour l'acquisition d'une vache, estimée à 60.000 DA, au moment où les opérations d'aménagement d'une étable bénéficient d'un soutien de 500.000 DA. La filière qui montrait des signes positifs a vite rechuté suite aux maladies à répétition qui ont affecté le cheptel. L'autre cause de ce manque sensible reste l'anarchie qui règne dans la filière du lait en général. Un expert, en l'occurrence Akli Moussouni, disait à ce propos: «La problématique du lait n'échappe pas au fait que cette filière, comme toutes les autres, est entretenue sous la pression du consommateur, dans un sous-développement socio-économique, aux dépens du Trésor public.» Dans son analyse, le spécialiste précise: «Par rapport aux dérivés, en l'occurrence les yaourts et les crèmes dessert, les fabricants se sont mis de la partie en s'impliquant dans les dispositifs d'aide à l'emploi en important et en fournissant aux agriculteurs des vaches pour récupérer le lait, faisant payer au consommateur l'archaïsme de la filière dans laquelle ils ont investi, au lieu de développer eux-mêmes des fermes d'élevage performant qui auraient pu leur permettre d'obtenir des produits trois fois moins chers, en faveur du consommateur». Comme chacun sait, la wilaya de Bouira est alimentée depuis par les unités de Draâ Ben Khedda et de Boudouaou. La production réservée à la wilaya de Bouira avoisine les 25%. Quatre petites unités ont été lancées localement. Leurs capacités de production et la qualité de leurs produits ne résolvent pas le dilemme du lait. Malgré cette situation et l'engagement pris en 2009 par la direction des services agricoles d'aider un investisseur de la région de Taghzout; ce dernier attend depuis 24 mois, sinon, plus un dénouement à sa demande. Voilà ce que déclarait l'ancien directeur du secteur en 2015: «... Une autre coopérative dite de performance devrait prochainement voir le jour dans la localité de Taghzout, qui abritera une pépinière pour la reproduction de génisses. Parallèlement, quelque 64 unités d'élevage bovin de la wilaya, sur les 621 existantes, ont bénéficié de nouveaux équipements. Ce sont tous ces facteurs réunis qui ont donné une forte impulsion au secteur de la production de lait à Bouira, dont l'objectif, à terme, est de devenir un bassin laitier qui compte à l'échelle nationale...». La réalité est qu'aujourd'hui se procurer un sachet de lait relève de l'exploit.