Cette région prude et attachée aux valeurs ancestrales est en train de perdre son âme. Les villages de la Kabylie profonde semblent ne pas pouvoir sortir de l'ornière et le développement apparaît pratiquement impossible. Les infrastructures routières, notamment, manquent terriblement, comme manquent et la volonté de ceux qui possèdent les capitaux et les moyens infrastructurels pour essayer d'impulser le développement. Il faut dire qu'en l'absence de possibilités d'une agriculture en mesure d'absorber la main-d'oeuvre juvénile et devant le tarissement des possibilités d'émigration vers notamment les pays d'Europe qui ont toujours et jusque-là servi de soupape de sécurité, les citoyens se sont rabattus, du moins la tranche juvénile, sur le commerce informel. Certains ayant l'air de trouver leur compte dans l'ouverture de bars clandestins et d'autres dans la revente des devises. En Kabylie, mis à part quelques petites tentatives d'industrialisation du privé, généralement dans la transformation des produits de l'agroalimentaire, aucune autre issue n'est proposée aux jeunes bras. Aussi, dans les villages notamment, les jeunes bras s'adonnent aux jeux de hasard et même aux maux sociaux. La Kabylie prude et attachée aux valeurs ancestrales est en train de perdre son âme. Dans les villes et même dans certains villages, les marchands d'alcools pullulent et plus encore des boîtes de nuit sont apparues sous l'oeil réprobateur des anciens. Comment ne pas évoquer aussi cette multiplication de vols enregistrés dans les villages? Il semble que les monte-en-l'air venus des régions limitrophes et sous les «conseils éclairés» des habitants de la région, ont trouvé en Kabylie une filière des plus importantes. Aujourd'hui, que ce soit en Haute-Kabylie ou en Basse-Kabylie, en ville ou dans les villages, les vols sont le lot quotidien des citoyens. Tout cela milite en fait pour une action énergique des forces de sécurité et une action de l'Etat envers ces laissés-pour-compte que sont les jeunes villageois. Il est vrai qu'au niveau de ces villages, rares sont ceux qui sont dotés d'infrastructures de loisirs. Les aires de jeu, pourtant simples à réaliser, manquent terriblement. Aussi, et dans la plupart des cas, ce sont les jeunes gens eux-mêmes qui, sur les rives des oueds ou d'un terrain vague quelconque, se sont débrouillés pour créer des espaces de jeu. Comme manquent terriblement des maisons de jeunes. Et pourtant, quatre murs en pisé, et le tour est joué ! Pourquoi ne pas évoquer les souffrances des filles des villages? Ces dernières quand elles ont la chance de poursuivre leurs études sont là à attendre le bon vouloir du ramassage scolaire. Un service qui est plus ou moins organisé et qui semble derrière les abandons de scolarité des jeunes filles. La liste est longue de ces doléances des citoyens qui ont fini par croire que la nation les a tout simplement oubliés! L'administration a beau multiplier les sorties sur le terrain mais, comme toujours, les vrais concernés sont comme tenus à la lisière des réceptions officielles et ne sont pas arrivés à formuler leurs doléances. Depuis les élections municipales du 10 octobre 2002 qui ont connu des escarmouches et donc qui ont fait que plusieurs communes soient restées sans APC, les choses semblent avoir empiré ! Alors qu'avec un maire, le citoyen a cette impression d'avoir un vis-à-vis à qui se plaindre et avec qui parler, maintenant les administrateurs donnent cette désagréable impression de ne gérer que les affaires courantes! Il est temps que les pouvoirs publics s'intéressent à ces choses et fassent en sorte que les citoyens se disent, quarante-trois années après l'indépendance du pays que les choses commencent à bouger!