Après avoir dominé l'Afrique, le groupe Vivendi, dirigé par le magnat de l'audiovisuel en France Vincent Bolloré, entend mettre la main sur le média du groupe le plus important en Italie, Mediaset en augmentant par surprise 20% son capital, dont le principal actionnaire n'est autre que Silvio Berlusconi. Les deux groupes s'étaient alliés pour créer un «Netflix européen», mais visiblement le groupe français veut faire le chemin tout seul. Les Italiens n'ont pas supporté la prise de participation surprise de Vincent Bolloré, à hauteur de 20%, dans le capital du groupe Mediaset de Silvio Berlusconi. Dans la presse italienne, le ton est monté d'un cran évoquant un «blitz» (terme allemand signifiant «éclair», guerre-éclair) de l'homme d'affaires français. Le clan Berlusconi fait opposition à la démarche française et prépare une riposte au groupe. Même l'Etat italien s'engage dans la bataille. Lors du Sommet européen de Bruxelles le 15 décembre, le nouveau Premier ministre de gauche, Paolo Gentiloni, a exprimé son agacement face à ce qu'il qualifie de manoeuvre «hostile» du groupe Vivendi, dirigé par Vincent Bolloré. La veille, le ministre du Développement économique, Carlo Calenda, était également monté au créneau, évoquant une opération peu appropriée et «tout à fait inattendue». Dans un secteur «aussi stratégique que les médias», le gouvernement «suivra avec attention l'évolution de la situation», avait-il prévenu.Fraîchement nommé après la démission de Matteo Renzi, le gouvernement italien veut afficher sa fermeté. Mais sa marge d'action est limitée. L'opération est juridiquement légale et relève de l'autorité de surveillance des marchés.Il faut préciser aussi que Médiaset contrôle déjà Telecom Italia (avec 23,8% des parts) et son réseau de télécommunications stratégiques pour l'Italie, c'est sans doute ce qui a motivé l'action de Bolloré. De son côté, le magnat italien Silvio Berlusconi, qui détient 38,26% des parts de Mediaset, dispose d'une marge de manoeuvre pour garder le contrôle de la société. Malgré leur bonne entente, les deux hommes d'affaires avaient scellé un accord et se voyaient construire ensemble un «Netflix de l'Europe du Sud» grâce à des participations croisées dans chacun de leur groupe. Même si l'amitié est rompue, les intérêts stratégiques sont toujours là. Reste à savoir qui est derrière cette volte-face de Vivendi. L'homme d'affaires franco-tunisien Tarek Ben Ammar, qui est associé aux deux hommes, n'est pas étranger à cette manoeuvre. Depuis quelques années Berlusconi est en perte de vitesse, au moment où Bolloré est en grande force économique. [email protected]