«Les uns et les autres sont obligés de payer la taxe de la paix.» «L'amnistie générale est le seul remède aux années de destruction et de sang qui ont plongé le pays dans le chaos et dans l'insécurité totale. L'intérêt suprême de l'Algérie impose aux victimes de la tragédie nationale et à tout le peuple de pardonner. Nous n'avons pas d'autre choix.» Le président de la République. M.Abdelaziz Bouteflika, a défendu hier, son projet d'amnistie, dans son discours prononcé à l'occasion de la clôture des travaux de la conférence nationale sur la réforme de la justice, qui s'est tenue au Palais des nations. Comme «promis», le président réitère que le «référendum sur l'amnistie générale aura lieu seulement quand le peuple se sentira prêt et une fois les blessures guéries». Mais Bouteflika, qui entamera très prochainement une campagne à travers les wilayas les plus touchées par le terrorisme, semble pressé de réaliser ce projet: «Les années passent et le pays peine à sortir d'une crise qui l'a frappé de plein fouet», a-t-il déclaré. Présenté comme le fer de lance de son programme électoral, l'amnistie générale s'inscrit dans la continuité d'un processus enclenché en 1999 avec la concorde civile. Et comme le premier projet, «rien ne se fera, cette fois aussi, assure-t-il, sans l'adhésion du peuple et aucune décision ne sera prise sans son aval». Un détail sur lequel a beaucoup insisté le président, hier, devant une assistance composée essentiellement de juristes. Il expliquera plus loin les raisons de cette insistance. A ce sujet, le président met en garde : «Le plus important ce n'est pas de se passionner pour l'amnistie et la réconciliation nationale, mais il s'agit, de prime abord, de saisir le sens réel de ce projet, de comprendre enfin, que la paix ne se fera pas sans concessions. Les uns et les autres, ajoute-t-il, et le peuple en général sont obligés de payer cette taxe, celle de la paix.» Le président qui annonce ici, un avant-goût du projet portant amnistie générale, n'en dira pas moins le prix de la taxe? Et, quelles sont les limites de ce concept. Rien aussi sur « les concessions » que doivent faire les terroristes. A travers «ce rappel», le président a tenu à mettre les Algériens devant leurs responsabilités. Si toutefois ils adhèrent à sa démarche. Il s'agit de dire que le projet, dont il est certes le principal instigateur, appartiendra finalement au peuple, et s'attellera à traduire ses aspirations et ses visions de la crise: «La clé, ajoute-t-il, est entre nos mains. Si on sait l'utiliser on en sortira vainqueurs, dans le cas contraire les risques sont considérables.» En somme, une fois voté, le projet sera celui du peuple et non pas celui du président. Le message est adressé aussi à la classe politique qui s'est engagée à défendre un projet dont elle «ignore tout», pour reprendre les propres termes de ses instigateurs, à l'image des parties de l'alliance stratégique, qui, d'ores et déjà, ont entamé leur campagne à travers les wilayas, soutenu dans ce sens par des organisations et des associations. Dans le même chapitre, le président, qui s'est montré, hier, satisfait des réformes judiciaires engagées depuis cinq ans, a précisé que le rôle des juristes sera «de veiller à la bonne application du projet de l'amnistie une fois adopté par le peuple, et ce, à travers la force de la loi». Sur ce chapitre aussi, le président n'a pas levé le voile sur la nature des textes qui seront élaborés pour appuyer cette politique amnistiante.