«Le bureau de l'APN doit vérifier les amendements uniquement dans la forme et non pas dans le fond» L'opposition accuse la coalition de vouloir détourner les dispositions de la Constitution qui lui garantit le droit à la libre expression. Les hostilités s'accentuent. Entre la coalition et l'opposition l'écart s'élargit davantage. Le projet de loi portant sur le règlement intérieur de l'APN, qui est en cours d'élaboration au niveau de la commission parlementaire des affaires juridiques, constitue un véritable terrain de bataille entre les deux parties. L'une tente de garder le monopole et l'autre veut à tout prix arracher ce qui lui revient de droit, ce qui donne lieu à une confrontation entre les deux camps. Selon des sources, il y a des resistances au sein de l'APN pour traduire les dispositions de la Constitution, alors que la Loi fondamentale garantit à l'opposition une place pour exprimer son avis au sein des institutions, mais leur application est de bonne guerre. Ce règlement, faut-il le rappeler, sera la plate-forme qui définira l'action des partis politiques au sein des assemblées élues. Ce qui explique les enjeux et les craintes de part et d'autre. L'opposition, qui a été longtemps marginalisée, est déterminée à s'imposer. Celle-ci accuse la coalition de vouloir détourner les dispositions de la Constitution qui lui garantit une place au sein du Parlement et son droit à exprimer librement et à défendre ses idées. «Ils veulent étouffer l'exercice politique en fermant les portes devant l'opposition», a déploré Youcef Khababa, député et membre du mouvement Ennahda. Contacté par nos soins, ce dernier a qualifié de faux débat l'examen du projet sur le règlement intérieur de l'APN au niveau de la commission juridique. «L'opposition gêne sérieusement les partis de la coalition, lesquels veulent fermer l'espace d'expression», a soutenu Nadia Chouitem, élue du Parti des travailleurs. Son collègue, Ramdane Youcef Taâzibt, a rappelé qu'il est écrit noir sur blanc dans la Constitution que l'opposition peut même saisir le Conseil constitutionnel, ce qui n'est pas un non-événement. «Nous espérons que cet acquis soit traduit clairement dans le nouveau règlement intérieur de façon à ne pas compliquer la chose pour les partis de l'opposition», a-t-il affirmé. Le député du MSP, Naâmane Laouer, a également insisté sur ce point. «La saisine du Conseil constitutionnel est le point le plus important qui peut permettre à l'opposition de contester une loi qui a été adoptée», a-t-il indiqué. Pour lui, les choses sont claires, il reste à voir comment elles seront traduites sur le terrain. Il faut rappeler que le chef de l'Etat a tenu à ses engagements en réservant un rôle plus important à l'opposition à travers la possibilité de tenir une séance mensuelle consacrée à l'examen d'un ordre du jour proposé par l'opposition et que celle-ci peut à l'avenir saisir le Conseil constitutionnel sur des lois adoptées au Parlement. La Constitution confère, en vertu de l'article 166, le droit à 50 députés ou 30 membres du Conseil de la nation de saisir le Conseil constitutionnel. Or, la coalition tente de compliquer les choses pour l'opposition de sorte à l'amener à baisser les bras. D'ailleurs, ils ont même évoqué la dissolution d'un groupe parlementaire en cas de perte des membres par un parti, ce qui n'arrangera certainement pas les partis de l'opposition et les petits partis. «Cette disposition est en contradiction avec les décisions du Conseil constitutionnel qui valide les résultats des élections», a soutenu Djelloul Djoudi du PT et membre de cette commission. Contacté par nos soins, notre interlocuteur affirme qu'il y a même une proposition de porter le nombre de députés pour la création d'un groupe parlementaire à 20 élus au lieu de 10 actuellement, «alors que dans les pays démocratiques un parti peut créer un groupe parlementaire même avec un ou deux élus; chez nous ils veulent compliquer ça pour interdire aux autres partis de se doter d'un groupe parlementaire», a-t-il déploré. M.Djoudi a également relevé qu'il faut relancer la commission de coordination qui n'a jamais fonctionné durant ce mandat. Selon lui, les vice-présidents, les présidents des commissions et les président de groupes parlementaires ne se sont jamais réunis pour faire le point. Ce n'est pas tout. Les partis de l'opposition plaident pour une application logique de l'article 61 du règlement intérieur actuel portant sur les amendements. «Le bureau de l'APN doit vérifier les amendements uniquement dans la forme et non pas dans le fond», a clarifié M.Djoudi. Par ailleurs, les députés de l'opposition voient en l'examen de ce projet à la fin du mandat une manière de bâcler les choses. «Il serait préférable de le reporter pour la prochaine législature pour lui donner plus de temps de débat», a soutenu le porte- parole du PT.