La veille du lancement du Téléthon des 28 et 29 novembre, Hamraoui Habib Chawki annonçait : «60 milliards, c'est possible.» A la clôture, les animateurs affichaient 110 milliards et des poussières. Sans compter l'apport des Algériens à l'étranger. Des citoyens et des associations, des administrations et des institutions se sont mobilisés pour apporter un peu de réconfort aux victimes d'une catastrophe qui, si elle est naturelle, n'en est pas moins, en partie, due, par la gravité de ses effets, à une gestion approximative de la ville, de la société, en un mot, du pays. La conscience aiguë qu'affiche le citoyen de l'incurie de l'Administration, de la bureaucratie corrompue et corruptrice ne l'empêchera pas de mobiliser toutes ses capacités de don, assumant une résilience devenue légendaire en ces années de terrorisme multiforme. Si le seul Téléthon a réuni 1,14 milliard de dinars, diverses sources concordantes estiment que «l'élan de solidarité qui a suivi dès le 10 novembre représente, tant en nature qu'en espèces ou en services, plus de 5 milliards de dinars». Le Croissant-Rouge algérien, qui a été destinataire des aides institutionnelles et étrangères, n'a pas fini de faire le bilan : «Comme les affectations se faisaient au fur et à mesure des arrivées, le bilan exhaustif a été remis à plus tard, d'autant qu'il a besoin d'être consolidé au niveau du ministère en charge de la Solidarité.» Un citoyen résumera de manière magistrale la mentalité qui prédomine: «Je n'ai pas grand-chose à donner. Je ne possède que cette voiture. Je la vends, et le produit de la vente sera remis au Téléthon. Peu importe si la totalité n'arrive pas aux sinistrés, mais il faut bien faire quelque chose...» On a vu de la douleur, de la solidarité désintéressée et des charognards, de l'héroïsme là où on ne l'attendait pas, et des lâchetés là où on les savait. Aujourd'hui, un mois plus tard, les blessures se cicatrisent. On fait ses calculs. La vie reprend ses droits. La wilaya d'Alger publie la liste des faux sinistrés qui ont voulu profiter de la pagaille pour enfin trouver un logement. Que n'a-t-elle publié celle des prébendiers de haut vol qui ont ruiné le patrimoine foncier de la wilaya. Il faut un début à tout, nous dit-on. Un mois après, ce sont encore les lampistes qui paient. Ainsi soit l'Algérie. Avant et après.