au sein du peuple algérien, la solidarité est la chose la mieux partagée. «L'idée est en train de faire son chemin en concertation avec les opérateurs économiques relevant des secteurs tant privé que public», nous a indiqué hier Abdelkader Malki, secrétaire national à la Centrale syndicale. Avec le téléthon de l'Ugta, à coup sûr, l'Algérie va explorer une nouvelle forme d'entreprise philanthropique puisque de telles actions ont été par le passé parrainées par les autorités. Mais il se trouve que les téléthons initiés auparavant ont laissé un goût d'inachevé. Que ce soit pour le projet de construction des Diar Errahma (1992), du relogement des sinistrés de Aïn Témouchent (2000) et de Bab El-Oued (2001), les citoyens n'ont pas été convenablement informés à temps sur l'utilisation des fonds récoltés. Ainsi, faute de transparence, le téléthon, cadre que se donnent les sociétés modernes pour exprimer leur solidarité à l'égard des démunis, peine, chez nous, à s'imposer. Pourtant, au sein du peuple algérien la solidarité est la chose du monde la mieux partagée. Et le séisme qui vient d'endeuiller le centre du pays vient, encore une fois, en donner la confirmation. Dès lors que survient un drame, la culture basée sur le lien communautaire, encore bien ancrée dans la société algérienne, s'exprime spontanément. Les vieux réflexes liés à la touiza, loin d'exprimer une réactivation de l'instinct grégaire, cristallisent paradoxalement les ressorts de la culture traditionnelle. Dans une telle société, il ne manque alors que le relais des images de la télévision pour transformer l'élan de solidarité en un extraordinaire plan de sauvetage national. Mais malheureusement, il n'est rien de tout cela. Car les organisateurs des téléthons n'ont pas su se mettre au niveau des organisateurs des traditionnelles touizas. Alors que les seconds savent exactement pourquoi et pour qui, ils collectent les dons, les premiers l'ignorent royalement. Prenons le dernier téléthon en date, celui organisé au profit des sinistrés des inondations de Bab El-Oued. Les autorités pour ne pas répéter l'erreur commise à Aïn Témouchent confient à une association dénommée «Téléthon 2001» la mission de collecter les fonds pour servir au relogement des sinistrés. Mais après que celle-ci eut amassé quelque 60 milliards de centimes, on se rend compte que «c'est l'Etat qui reloge et non une association». Conséquences: les sinistrés de Bab El Oued ont pu être relogés sans qu'aucun sou des fonds collectés ait été déboursé ! Ainsi, l'association Téléthon 2001, déclarée seule responsable de l'argent, s'est retrouvée, du jour au lendemain, confrontée à un problème d'identification de la nature des projets auxquels seront affectés les fonds. Au-delà, la télévision, on s'en souvient, avait annoncé, à l'issue du téléthon, que la somme collectée avait atteint les 110 milliards avant que le chef de l'Etat en personne ne vienne démentir ce chiffre en parlant de 60 milliards seulement. Quant au téléthon de Aïn Témouchent, l'association «Téléthon 2000» basée dans cette ville et qui devait superviser l'opération de collecte des dons et contrôler l'utilisation de l'argent (quelque 666.543.670,83 DA) s'est vue dessaisie par le wali de Aïn Témouchent, lequel a versé ladite somme dans le compte trésor de la wilaya. Notons aussi que Abdelaziz Bouteflika avait appelé les citoyens à la vigilance afin de garantir la bonne utilisation de l'argent. Cela dit, le téléthon à «l'algérienne» pèche par un autre travers. Nombre de «bienfaiteurs», mus par le souci de laisser une bonne image auprès de la population, promettent des dons et puis disparaissent. Ainsi, sur les 67 milliards de l'argent promis pour Aïn Temouchent pour ne s'arrêter qu'à cet exemple, 36 milliards seulement sont entrés. Au cours de l'opération, il y a eu 250 millions de centimes de chèques sans provision. Téléthon oui, tirer les enseignements du passé c'est mieux.