James Robert, le juge fédéral qui a engagé un bras de fer avec le président Trump pour défendre les droits des immigrés La cour d'appel fédérale de San Francisco a rejeté dimanche l'appel formulé la veille au soir par le ministère américain de la Justice contre une décision prise par un juge de Seattle. Le bras de fer se poursuivait hier entre l'administration Trump et la justice américaine sur le décret migratoire, pendant que des citoyens des pays à majorité musulmane visés par ce texte profitent de sa suspension pour se rendre aux Etats-Unis avant un éventuel nouveau revirement. Elle a ainsi maintenu cette décision du magistrat James Robart. Il avait émis vendredi une injonction temporaire qui a effet sur l'ensemble du territoire américain, bloquant le décret présidentiel le temps qu'une plainte déposée il y a une semaine soit examinée. Infligeant un nouveau camouflet à Donald Trump, la justice a confirmé que les ressortissants de sept pays musulmans, visés par le texte controversé, pouvaient continuer de rentrer aux Etats-Unis. Mais la brèche pourrait se refermer rapidement. «Je n'arrive pas à croire qu'un juge mette notre pays en pareil péril. Si quelque chose arrive, tenez-le pour responsable ainsi que le système judiciaire. Les gens affluent. Mauvais!», a tweeté le président Trump. «J'ai donné l'instruction au département de la Sécurité intérieure de contrôler les personnes arrivant dans notre pays très attentivement. Les tribunaux rendent la tâche très difficile!», a-t-il ajouté. La décision du juge Robart eu pour effet dès samedi de rouvrir les frontières américaines aux ressortissants d'Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen, ainsi qu'aux réfugiés. Dans le détail, la cour d'appel a demandé aux Etats de Washington et du Minnesota, à l'origine de la plainte déposée lundi dernier contre le décret qui a engendré une vague d'indignation planétaire, de fournir des documents étayant leurs demandes avant 23h59 heure locale dimanche (hier 7h59 GMT). Elle a également donné au ministère de la Justice jusqu'à hier après-midi pour apporter de nouveaux arguments à l'appui de sa requête. Avec l'épée de Damoclès d'un retournement de situation dans ce bras de fer politico-judiciaire qui a des répercussions aux quatre coins de la planète, les immigrants embarquaient en nombre sur des vols à destination des Etats-Unis. Quelque 60.000 visas, suspendus par ce texte, ont également retrouvé leur validité, selon la diplomatie américaine. Et de nombreuses compagnie aériennes, dont Air France, acceptent de nouveau les ressortissants des sept pays visés. Kamal Fadlalla, un médecin soudanais de 33 ans a pu ainsi rentrer à New York dimanche après s'être retrouvé coincé pendant une semaine au Soudan, à l'issue d'une visite familiale. «C'est bon» d'être de retour aux Etats-Unis, a-t-il confié à l'aéroport new-yorkais JFK, où il a été accueilli par des «bienvenue à la maison». La Maison-Blanche, toutefois, entend vite refermer la brèche légale dans laquelle s'engouffrent de nombreux migrants et remporter le combat judiciaire, quitte à multiplier les appels ou porter l'affaire devant la Cour suprême. Le vice-président Mike Pence a écumé les plateaux de télévision dimanche pour exprimer sa «frustration». L'exécutif, a-t-il promis sur Fox News, «va réagir très rapidement». «Nous allons gagner la bataille des arguments (devant la justice, ndlr) car nous allons prendre les mesures nécessaires pour protéger le pays». De nouvelles voix ont par ailleurs critiqué dimanche un décret déjà fustigé de toutes parts et qui a encore déversé dans les rues des grandes capitales mondiales des milliers de manifestants ce week-end. Le texte «n'était vraiment pas préparé et (...) était fondé sur des mensonges», a dénoncé sur CNN Madeleine Albright, l'ancienne secrétaire d'Etat de l'ex-président démocrate Bill Clinton. «Les mécanismes (politiques) laissaient à désirer», a renchéri sur le même plateau Stephen Hadley, qui fut conseiller en sécurité nationale de l'ancien président républicain George W. Bush. «Mais je pense qu'ils essayaient (...) d'envoyer un message au pays». La signature du décret vendredi dernier a profondément divisé les Etats-Unis qui sortaient déjà sonnés d'une campagne électorale acerbe.