Un juge fédéral de Seattle a bloqué temporairement, vendredi, le décret anti-immigration du président américain visant sept pays à majorité musulmane. L'injonction temporaire du juge James Robart est valable sur l'ensemble du territoire américain, le temps qu'une plainte déposée lundi par le ministre de la Justice de l'Etat de Washington, Bob Ferguson, soit examinée. La réponse de la Maison-Blanche ne s'est pas fait attendre. «Le ministre de la Justice entend déposer une injonction d'urgence pour faire appliquer le décret et annuler la décision du juge Robart», selon un communiqué. Le président américain, Donald Trump, a, de son côté, qualifié hier de «ridicule» la décision du juge Robart qui bloque son décret migratoire, assurant que celle-ci expose l'Amérique à de «gros problèmes» et qu'elle sera «cassée». «L'opinion de ce soi-disant juge, qui, en gros, prive notre pays de sa police, est ridicule et sera cassée !» a prévenu le nouveau président américain dans une salve de tweets matinaux. Les juges fédéraux de plusieurs autres Etats ont également statué contre l'interdiction depuis qu'elle a été décrétée vendredi dernier, notamment en Californie et dans l'Etat de New York, mais la décision du juge Robart est celle dont la portée est la plus vaste. «La Constitution a vaincu aujourd'hui», a déclaré M. Ferguson, un démocrate, après l'annonce de la décision. «Personne n'est au-dessus de la loi, pas même le Président», a-t-il ajouté, faisant remarquer que le juge Robart avait été nommé par l'ex-président républicain, George W. Bush. M. Ferguson avait porté plainte lundi pour invalider des points-clés du décret présidentiel, qui ferme les frontières des Etats-Unis aux réfugiés pendant quatre mois et aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane (Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen) pendant trois mois. Les Syriens font l'objet d'une interdiction indéfinie. Dans sa plainte, M. Ferguson affirme que l'interdiction décrétée par le Président allait à l'encontre des droits constitutionnels des immigrés et de leurs familles, car elle vise particulièrement les musulmans. Le gouverneur de l'Etat de Washington, Jay Inslee, a lui aussi évoqué une «victoire éclatante» mais averti que la bataille pour son retrait n'est pas terminée. Un avis partagé par M. Ferguson qui a dit sur la chaîne CNN qu'il ne serait «pas surpris» si ce bras de fer se termine «à la Cour suprême». Le décret s'est traduit, le week-end dernier, par l'interpellation dans les aéroports de quelque 109 personnes résidant légalement aux Etats-Unis, selon la Maison-Blanche, tandis que des centaines d'autres étaient empêchées d'embarquer à destination des Etats-Unis. Depuis son entrée en vigueur, les Etats-Unis ont révoqué 60 000 visas attribués à des ressortissants des sept pays visés. Mais un avocat du ministère de la Justice a déclaré devant un tribunal en Virginie que quelque 100 000 visas avaient été révoqués. Aux Etats-Unis, le décret a été qualifié de «propagande d'une portée inimaginable» pour les djihadistes, par cinq sénateurs démocrates, dans un courrier adressé au secrétaire américain à la Défense. Deux sénateurs républicains, John McCain et Lindsey Graham, avaient déjà estimé qu'il équivalait à «se tirer une balle dans le pied de la lutte contre le terrorisme». Le décret suscite l'indignation à travers le monde depuis une semaine, provoquant des manifestations. A signaler qu'après le blocage par le juge Robart du décret anti-immigration de Donald Trump, la compagnie Qatar Airways a annoncé hier qu'elle transporterait vers les Etats-Unis les ressortissants des sept pays interdits ces derniers jours d'entrée aux Etats-Unis.