Le futur de l'industrie algérienne se décide maintenant, se sont accordés à dire les conférenciers. «Penser l'avenir de l'industrie algérienne d'ici l'horizon 2030» a fait hier l'objet d'une conférence-débat dans le cadre de la première édition du Forum de l'industrie algérienne tenue à l'hôtel Sheraton d'Alger. Animée par d'éminents économistes, la conférence s'est avérée fructueuse dans la mesure où les conférenciers ont convenu de dire que l'avenir de l'industrie algérienne se décide maintenant. L'économiste et enseignant universitaire Alexandre Kateb qui a présenté la première communication, a conditionné l'essor de l'industrie algérienne par trois facteurs. La tenue compte par les gouverneurs de l'Algérie des mutations que connaît le monde aujourd'hui, l'urgence d'adopter le management moderne au sein des entreprises et la nécessité de changer la réglementation en vigueur. Par les nouvelles mutations, Alexandre Kateb entend l'émergence de nouvelles puissances mondiales telles que la Chine, le Brésil et l'Inde. S'intéresser de près aux expériences de ces pays ne sera que bénéfique pour l'Algérie, a-t-il préconisé. Quant à l'urgence d'adopter le management moderne dans les entreprises algériennes, l'économiste a fait remarquer que le développement de l'industrie ne peut pas se faire avec le management traditionnel fondé sur la communication verticale. «La relation entre les gouverneurs et les managers doit être dans les deux sens et autour d'un contrat de performance», a plaidé Alexandre Kateb, ajoutant que ce n'est que de cette façon que l'entreprise pourra réaliser de la valeur ajoutée. Concernant le troisième facteur, à savoir l'adoption d'une nouvelle réglementation, l'économiste a dit que cet objectif ne sera pas atteint par les Algériens tant que l'Algérie n'a pas adhéré encore à l'OMC. «Les transactions mondiales se font sur la base de la réglementation adoptée par l'OMC», a-t-il mentionné. Présentant en deuxième lieu sa communication, le professeur émérite Chems Eddine Chitour, a axé son exposé sur la formation de l'homme. Egal à lui-même, Chems Eddine Chitour a affirmé que rien ne se fera et rien ne se développera sans la prise au sérieux de l'aspect de la formation de l'homme. «Sans la formation de l'homme, il n'y aura pas d'avenir», a-t-il tranché. Pour le professeur Chitour, le sous-développement de l'Algérie est dû en grande partie au fait que l'Algérie indépendante n'a pas eu une école monolithique. «Nous avons confié l'école algérienne à 26 nations et nous avons eu comme résultat une génération hétérogène», a-t-il regretté. «Nous avons pu certes pouvoir nous rattraper par la suite, mais hélas uniquement en termes de quantité», a ajouté le professeur, regrettant que «les mathématiques, la physique et les sciences, qui ont fait avancer les autres pays, sont de plus en plus dévalorisées en Algérie. «L'université algérienne ne forme plus d'ingénieurs. Elle forme des mastères. Que peut faire un mastère?», s'est-il interrogé. Les responsables du secteur de l'éducation doivent en urgence réhabiliter, estime l'enseignant à l'Ecole polytechnique d'Alger, les mathématiques et les filières techniques, en créant dans chaque wilaya un lycée de mathématiques. Pour se développer, «il faut tracer un cap», explique le conférencier, citant le cas des Etats-Unis qui ont tourné résolument leur politique de développement depuis plusieurs décennies vers l'investissement dans le savoir et les nouvelles technologies. «Cela rapporte gros aujourd'hui pour ce pays», a-t-il fait remarquer, mettant en garde sur le fait que les peuples ne pourront faire face aujourd'hui comme dans 10 ans aux défis et enjeux de la mondialisation que par la formation et le savoir. Animant la dernière communication Mokhtar Chahboub, ex-PDG de la Snvi, a plaidé pour le durcissement du cahier des charges du gouvernement algérien pour les investisseurs dans le domaine automobile. «Il faut que le gouvernement exige des investisseurs étrangers, l'investissement davantage dans la sous-traitance. C'est ce genre d'investissement qui garantira l'épanouissement du marché automobile local et permettra la réalisation de l'économie d'échelle, c'est-à-dire permettre un véhicule à bon prix», a-t-il préconisé, plaidant en même temps d'exiger de ces investisseurs étrangers d'investir dans la formation du personnel. Il est à noter que plusieurs opérateurs économiques algériens, pourtant réputés, n'ont pas pris la peine d'y assister.