Mohcen Belabbas, président du RCD Le RND ne se contente pas de présenter la décentralisation comme horizon prometteur, mais va jusqu'à considérer la centralisation actuellement en vigueur comme étant un sérieux blocage au développement du pays. L'excès de centralisation inquiète de plus en plus et l'idée de la décentralisation-régionalisation fait de moins en moins peur. Elle semble même constituer une alternative à la crise que vit actuellement l'Etat central, même si bien des nuances structurent encore son expression par certains partis politiques. L'idée est en tout cas l'une des principales qui émergent de la campagne électorale en cours. Jusque-là portée par deux partis de l'opposition démocratique, à savoir le RCD et le FFS, cette revendication gagne de plus en plus de terrain et, désormais, même des partis au pouvoir ou ayant participé durant des années à la gestion de l'Etat la portent avec fierté. C'est le cas notamment du RND et du MSP. Interrogé récemment lors d'une conférence de presse sur «la nécessité d'aller vers une nouvelle reconfiguration de l'Etat qui consisterait à mettre en place des régions plus ou moins autonomes pour permettre une plus grande implication citoyenne et une efficacité accrue dans la gestion des affaires de la cité», le secrétaire général du RND a surpris par sa réponse: «Je n'ai jamais été contre», a-t-il affirmé en appelant au lancement d'un débat sur la question. Mais l'avis du RND sur cette problématique qui commence à susciter une forme de consensus au sein de la classe politique ne se limite pas à cette réponse. En effet, Ahmed Ouyahia ne rate aucune occasion, tout particulièrement depuis le début de la campagne électorale pour les législatives du 4 mai, de plaider pour une réforme de l'Etat dans le sens de la décentralisation progressive de sa gestion. «Il faut aller vers la concrétisation de la décentralisation des communes et des wilayas en redonnant des prérogatives aux présidents des APC. Il faut absolument promouvoir cette démarche. Promouvoir la décentralisation pour «améliorer les conditions de vie de la population», a-t-il recommandé en précisant qu'il était «grand temps de rompre avec les multiples difficultés et entraves engendrées par le système de centralisation.» C'est dire que le RND ne se contente pas de présenter la décentralisation comme horizon prometteur, mais va jusqu'à considérer la centralisation actuellement en vigueur comme étant un sérieux blocage au développement du pays. Du côté du MSP, c'est le même engagement en faveur de la régionalisation. Dans un meeting qu'il a animé à Tizi Ouzou, le président de ce parti, Abderrezak Makri, a exprimé l'attachement indéfectible de son parti à la «régionalisation» qu'il n'hésite pas à présenter comme étant une solution de sortie de crise pour le pays. De plus, énumérant les entraves que génère l'excès de centralité de la gestion des affaires de l'Etat sur les plans politique, économique, administratif et autres, Makri a énergiquement dénoncé «la centralisation des pouvoirs par une caste vivant dans la capitale». Dans l'immédiat, le président du MSP a appelé à plus de prérogatives pour les élus locaux et la réorganisation de la société civile pour qu'elle devienne un partenaire positif et non un outil au service de l'administration. Le RCD, connu pour être parmi les premiers à avoir appelé à la re-fondation de l'Etat et la mise en place d'une «régionalisation modulable» continue de réitérer cette revendication en mobilisant de nouveaux arguments et en proposant un mode d'emploi pratique. En la matière, Mohcen Belabbas, président du parti, estime que la première grande solution consiste en une large décentralisation des pouvoirs de gestion et le renforcement de la gouvernance locale. Il s'agit selon lui, dans un premier temps, de procéder à la suppression des daïras qu'il qualifie de «budgétivores» et de recentrer la gouvernance locale sur la commune, la wilaya et une nouvelle structure qu'il propose d'appeler «la région» et qui devrait regrouper deux, trois ou quatre wilayas selon les régions. «On doit aller également vers la création d'un Parlement qui va être choisi par les citoyens et un gouvernement local dans chaque région. L'exemple espagnol est le mieux indiqué à suivre. On ne doit laisser au niveau central que la défense, la monnaie et les relations internationales», a-t-il proposé en soulignant que «le système des régions a déjà fonctionné dans notre pays et il a donné un résultat», notamment durant la révolution... Ainsi, bien que les arguments que présentent les partis pour vendre politiquement l'idée d'une «décentralisation» ou d'une «régionalisation» soient différents, l'idée commence à gagner du terrain et de plus en plus de partis et de personnalités politiques y adhèrent. Les modalités de sa mise en place n'ayant pas encore fait consensus, il est encore tôt de fixer un horizon à sa concrétisation. Toutefois, elle fait son chemin. Lentement, mais sûrement.