Symboles. Kylian Mbappé représente parfaitement Monaco, folle jeunesse et puissance offensive, comme Gianluigi Buffon cristallise les vertus de la Juventus Turin, immense expérience et art de la défense, pour un choc de styles. Un bébé contre un papy: «Gigi», 39 ans, joue ce soir (19h45 heure algérienne) son 150e match européen en club, Mbappé, 18 ans, son 8e. «Il est jeune mais il est déjà très réaliste face au but», prévient Buffon, qui appelle Mbappé «le nouveau Thierry Henry» dans une interview au site de l'UEFA. «J'avais déjà joué la Coupe du monde en France quand il est né...» soupire le portier italien. Cet écart illustre bien la différence de profil entre les deux effectifs: Monaco a la plus jeune équipe du plateau de la C1 (25,28 ans de moyenne d'âge) et la Juve la plus vieille (29,55 ans), selon les chiffres de l'UEFA. Si l'ASM peut compter sur Radamel Falcao (31 ans) ou Kamil Glik (29 ans), ex-capitaine du Torino qui retrouve avec appétit le grand rival du «Toro», l'expérience penche clairement du côté de la Juve. Les deux patrons de sa charnière centrale ont joué une vie ensemble, à la Juve et avec l'Italie. Le combattant Giorgio Chiellini (90 sélections) et le Beckenbauer du XXIe siècle, Leonardo Bonucci (69 sél.), se comprennent les yeux fermés. Le séduisant collectif monégasque est-il assez fort pour les faire tomber? Les perceurs contre le coffre-fort Mbappé contre Buffon, c'est aussi les 146 buts marqués par Monaco en 57 matchs contre la meilleure défense d'Europe. La Juve n'a été trompée que deux fois dans cette campagne de C1, et la réaction du gardien italien à ces deux buts est éloquente et résume parfaitement sa culture défensive et celle de la Juventus: «On aurait pu les éviter». L'équipe de Massimiliano Allegri, qui décortique toujours minutieusement le jeu de ses adversaires pour préparer sa tactique, ne mésestimera jamais Monaco. Après tout, l'ASM a mis trois buts à chaque match contre Manchester City et le Borussia Dortmund aux tours précédents, et Mbappé en a claqué 5 à lui seul, jetant à la face du monde tous ses records de précocité. «Nous devons jouer le couteau entre les dents», prévient Bonucci. Mais quand on a tenu 180 minutes en quarts face au Barcelone de Messi, Neymar et Suarez sans prendre le moindre but, on n'a peur de rien. En outre le nul 2-2 de vendredi sur le terrain de l'Atalanta Bergame, autre équipe enthousiaste et en forme, a servi d'avertissement. La défense est une philosophie à la Juve. Nouveau riche contre vieille noblesse Enfin, Mbappé et Buffon sont de parfaits ambassadeurs de leurs clubs. En six mois fulgurants, le Francilien est devenu la figure de proue du projet monégasque de valorisation des jeunes, formés au club, comme lui, ou achetés à moins de 20 ans, comme Bernardo Silva (à Benfica) ou Thomas Lemar (à Caen). Buffon, qui a dépassé les 600 matchs sous le même maillot «bianconero», illustre bien la noblesse de la Vieille Dame, ses 32 titres de championne d'Italie, et ses huit finales de C1 (pour deux victoires). Le grand gardien a presque tout gagné, mais attend toujours d'attraper la coupe par ses grandes oreilles, après deux échecs en finale (2003, 2005). «Ce serait la plus grande joie de ma carrière avec la victoire en Coupe du monde 2006, confie-t-il, comme une récompense que l'on obtient à la fin d'un parcours difficile.» Moins médaillé, Monaco file vers son 8e titre de champion et a perdu ses deux finales européennes (C2 1992 et C1 2004). Le palmarès de Mbappé se limite à un Euro des moins de 19 ans (2016), mais à 18 ans Gigi n'avait encore rien gagné. Enfin la noblesse n'est pas seule à pencher en faveur de la duchesse de Savoie, les confrontations directes aussi. A chaque fois en C1 la Juve est passée, déjà en demie en 1998, et en quarts il y a deux ans. Mais Monaco n'avait pas encore Mbappé...