Une nouvelle Assemblée populaire nationale a été élue le 4 mai dernier. Le fait le plus significatif à relever est évidemment le médiocre taux de participation: 35,37% des inscrits (selon les résultats provisoires rendus publics mardi dernier par le Conseil constitutionnel, ceux donnés par le ministère de l'Intérieur étaient de 38,25%. Le fait est suffisamment symptomatique pour ne pas s'y arrêter: 64,63% des Algériens n'ont pas estimé politique de prendre part à un scrutin pourtant important pour le renouvellement de la composante de l'APN. Cette désaffection électorale est inquiétante dès lors qu'elle illustre - ou démontre - la fissure, si ce n'est la rupture, entre la société et le champ politique. Ce fait doit alerter autant les gouvernants que les partis politiques. En effet, ce sont ces derniers [les partis politiques] qui fournissent les femmes et les hommes appelés à légiférer, soit à gouverner. Le constat à faire est que les partis politiques ont échoué à donner à l'Etat les hommes et femmes dont il a besoin. Par ailleurs, l'Etat n'a pas su ou pu utiliser à bon escient le personnel politique national, d'où le déficit de confiance qui se répercute sur les résultats des scrutins électoraux Aussi, cet échec est autant celui de la classe politique nationale que celui des gouvernants qui n'ont pas su répondre aux attentes de leurs électeurs et administrés. Mais revenons aux chiffres qui, s'ils disent quelque chose, ne disent pas tout lorsqu'ils sont tronqués ou incomplets. Les chiffres qu'a donnés le ministère de l'Intérieur sont globaux, ne détaillent pas la participation par wilaya et par ville, ce qui se fait partout dans le monde. Cette absence des vrais chiffres de la consultation électorale ne permet pas de connaître le poids politique réel des partis et sur leur électorat. Cela n'aide pas, par ailleurs, le citoyen à comprendre les enjeux du scrutin, comme les partis politiques à avoir une idée tangible de leur impact sur leur électorat. Ce qui ressort des 35,37% des votants est que le vote blanc ou nul - qui approche les 2 millions - relativise encore plus des législatives dont, en filigrane, se pose la question de la légitimité des député(e)s élu(e)s à l'APN. En effet, sur 23251503 millions d'inscrits dans le corps électoral, seuls 8225323 millions ont effectivement voté, dans lesquels 1757043 ont voté blanc. Ce qui fait, que sur plus de 23 millions d'électeurs seuls 6 468 180 millions ont effectivement choisi leurs représentant(e)s (Ndlr, les chiffres donnés sont ceux du Conseil constitutionnel rendus publics mardi). Ainsi, d'une élection à l'autre, le vote blanc prend de l'ampleur et s'établit dans la durée. Cela ne peut pas être sans raison et interpelle, de fait, les gouvernants. Une électrice de Constantine semble résumer le sentiment général, qui a dit préférer voter «blanc» que laisser d'autres déposer un bulletin dans l'urne en son nom. Dès lors, le vote blanc (ou nul) acquiert du sens: 1757043 de personnes- ce qui est énorme - ont voté «blanc», du fait que les candidats proposés ne les satisfaisaient pas. Peut-on le leur reprocher, si on excipe du fait que, globalement, les postulants à la députation outre de n'avoir pas convaincu, ont été la plupart du temps d'une affligeante médiocrité. Ils sont ainsi plus de 15 millions d'Algériens à ne pas s'être déplacés aux bureaux de vote. Il est évident que cela pose problème. Aussi, les autorités doivent en tirer les conclusions qui s'imposent. Elles disposent de toutes les données d'un vote qui confirme d'une année sur l'autre un désintéressement électoral qui ne peut pas être sans raison. Un autre phénomène des législatives de 2017 concerne l'entrée en masse des petits partis à l'APN. Selon les résultats rendus publics par le Conseil constitutionnel - qui confirment avec certains rectificatifs les résultats du ministère de l'Intérieur - 44 partis, avec 1 ou 2 députés font leur entrée à la Chambre basse du Parlement. Cet étirement, plutôt cette dispersion, de la présence partisane, n'est pas, en vérité, un signe de vigueur démocratique. Trois partis: le FLN, le RND et l'Alliance MSP-FC - cumulent à eux seuls plus de la moitié des sièges de députés. Avec seulement 34 députés, le FFS, le PT et le RCD ont nettement reculé et doivent sans doute se remettre en question et remettre en cause leur stratégie politique. Un autre fait à signaler, concomitant avec le faible taux de participation, le recul de la fraude. En effet, quoi qu'en disent les partis, si fraude massive il y avait, le bon sens incitait plutôt à veiller à crédibiliser les législatives en bourrant les urnes. Or, un 35,37% de participation pose la question de la légitimité des députés élus et, in fine, celle de l'APN. Autant un taux de 99,99% de participation n'est pas plausible, autant celui de 35,37% interpelle dès lors qu'il délégitime une APN mal élue.