Le président sortant, Hassan Rohani, prêt à «rempiler» Les Iraniens votent demain pour accorder ou non un second mandat au président Hassan Rohani et à sa politique d'ouverture au monde, qui a suscité des espoirs aujourd'hui en partie déçus. Le bilan de M. Rohani, 68 ans, est contesté par son principal adversaire, le religieux conservateur Ebrahim Raissi, 56 ans, proche du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei. Cette élection se tient dans un climat de tension croissante avec les Etats-Unis depuis l'élection du président Donald Trump qui, le jour prévu de la proclamation des résultats, samedi, se trouvera en Arabie saoudite, grand rival régional de l'Iran. Elu dès le premier tour en 2013 avec 50,7% des voix, Hassan Rohani, allié des réformateurs, brigue un second mandat de quatre ans. Son premier vice-président, Es-hagh Jahanguiri, réformateur, s'est retiré de la course et a appelé à voter pour lui. L'ambition de Rohani, malgré l'hostilité américaine, est de poursuivre l'ouverture entamée grâce à la conclusion en juillet 2015 d'un accord nucléaire historique avec les grandes puissances, dont les Etats-Unis. En échange de l'engagement à mener une politique nucléaire à des fins strictement civiles, Téhéran a obtenu une levée partielle des sanctions internationales qui entravaient le développement de l'économie. «Lors de ces négociations nucléaires, nous avons pu retrouver nos droits, ce que personne n'aurait cru possible: c'est le pouvoir de la diplomatie iranienne», a récemment estimé Hassan Rohani. A son actif également, une baisse impressionnante de l'inflation, qui a reculé de près de 40% en 2013 à environ 9,5% aujourd'hui. Mais, en dehors d'une reprise de ses exportations de pétrole, l'accord nucléaire entré en vigueur en janvier 2016 n'a pour l'instant pas attiré les investissements étrangers espérés:seulement 1 à 2 milliards de dollars, alors que le gouvernement chiffre à 50 milliards par an la somme nécessaire à la relance de l'économie. Investisseurs et grandes banques internationales restent réticents en raison de l'attitude des Etats-Unis qui, depuis l'arrivée au pouvoir de Donald Trump en janvier, ont renforcé les sanctions non liées au programme nucléaire, ainsi que du système économique et financier opaque de l'Iran. Ebrahim Raissi, qui ne remet pas en cause un accord voulu par le guide suprême, a beau jeu de dénoncer le manque de résultats de ce compromis qui n'a pas profité aux plus défavorisés qu'il dit vouloir défendre. Il met en avant les mauvais chiffres du chômage qui frappe 12,5% de la population - 27% des jeunes - et accuse le gouvernement Rohani de n'avoir agi que pour «l'oligarchie» des «4% les plus riches» du pays. Pour lui comme pour Ali Khamenei, le salut passe avant tout par «l'économie de résistance» axée sur la production et les investissements nationaux. «Les gens pensaient qu'après l'accord nucléaire, tous les problèmes seraient réglés, ce qui n'était évidemment pas possible», note Amir Mohebian, politologue proche des conservateurs modérés, qui craint que «l'espoir ne se transforme en désespoir». La grande inconnue du scrutin est le taux de participation et la tenue d'un possible second tour le 26 mai si l'un des candidats n'obtient pas plus de 50% des voix. «Les responsables américains, européens, et ceux du régime sioniste surveillent nos élections pour voir quel sera le niveau de participation», a affirmé hier Ali Khamenei. Si cette participation «est importante, leur jugement sera différent» car face «aux ennemis, le peuple doit montrer un visage déterminé et calme», a-t-il ajouté. Afin de mobiliser les électeurs, les candidats ont durci le ton les un envers les autres, les conservateurs accusant notamment l'entourage de Rohani de corruption. En retour, ce dernier a accusé M. Raissi et Mohammad Bagher Ghalibaf, le maire conservateur de Téhéran qui s'est retiré de la course et le soutient, d'être des «partisans de la violence» et des «extrémistes» dont l'époque «est révolue». Le scrutin auquel sont appelés à voter 56,4 millions d'électeurs, est couplé à des élections municipales: l'enjeu dans les grandes villes de Téhéran, Machhad (Est) et Ispahan Centre), est un changement de la majorité conservatrice qui les dirige.