Il y a de quoi! Trump n'en revenait pas face à la déferlante de milliards de pétrodollars qui l'ont laissé ébaubi, mais pas sans voix, le faisant s'exclamer «des emplois, des emplois, des emplois» au grand étonnement des présents. On le serait à moins: 380 milliards de dollars de contrats, dont 110 milliards USD de contrats de vente d'armements. Même le président-milliardaire ne pouvait garder son calme face à cette pluie de milliards qui lui est tombée du ciel. Dans un précédent texte [L'Expression du 21 mai 2017], nous nous interrogions sur l'utilité du voyage du président Trump en Arabie saoudite. La réponse coulait donc de source: ce voyage a été superprofitable pour le président-milliardaire - et pour les Etats-Unis - qui a raflé le gros lot à Riyadh. Trump, bon businessman, ne s'y est pas trompé qui voyait dans cette offrande des milliers d'emplois pour les Etats-Uniens. On n'a aucune peine à comprendre la jouissance d'un homme qui a décroché en passant, c'est le cas de le dire, la timbale. Pour le président états-unien le voyage de Riyadh a été un succès positif et très profitable. En fait, il était sous le charme d'un accueil royal. Trump était grisé par les senteurs de l'Orient. C'est incontestable! Les Saoudiens savent s'y prendre pour faire oublier aux puissants leurs turpitudes. Mais en l'occurrence, comme le souligne notre confrère Chaabane (dans ces mêmes colonnes), le parapluie états-unien est vraiment «cher payé». En fait, ces contrats commerciaux ont noyauté le côté politique de la visite du président Trump lequel a caressé dans le sens du poil «de la barbe» ses hôtes saoudiens en disant ce qu'ils avaient hâte d'entendre: l'Iran, coupable de tous les maux de la planète. Pour la cagnotte obtenue à Riyadh, Donald Trump pouvait sans se forcer, en rajouter. Cela ne l'engageait à rien, même s'il n'en pensait pas moins. En effet, homme d'affaires avant tout, l'hôte de la Maison-Blanche a su faire montre de souplesse et glissé sur ce que les Saoudiens ne voulaient pas ouïr: la question des droits de l'homme bafoués dans le Royaume wahhabite, le sort des femmes, le financement des groupes jihadistes... Ce qui est cocasse, si l'on excipe du fait que Trump s'est réuni avec les souverains des six monarchies du Golfe pour discuter de la création d'un «centre international de lutte contre le financement du terrorisme», est que ses financiers étaient juste en face de lui. Il fallait le faire, surtout quand parmi ses interlocuteurs, les Saoudiens - à juste titre - et les Qataris, sont notoirement connus pour être les sponsors de la rébellion en Syrie et les financiers des groupes jihadistes qui opèrent dans ce pays. Renvoyant l'ascenseur en escamotant la question des droits de l'homme en Arabie, Donald Trump a été très fort sur l'Iran «exportateur» de terrorisme, sur Assad «qui a commis des crimes indescriptibles», sur le Hezbollah et le Hamas «organisations terroristes». Trump sert aux Saoudiens sur un plateau, tout ce qu'ils n'ont pu obtenir d'Obama qui n'a pas bombardé la Syrie en 2014 au grand dam de Riyadh, qui a été un acteur actif (avec cinq autres puissances) dans l'accord sur le nucléaire iranien conclu avec Téhéran et, last but not least, Obama a critiqué la situation des droits de l'homme en Arabie. Un crime de lèse-majesté! Trump qui, ces dernières années, a ravivé l'islamophobie et la haine des musulmans, se voulait à Riyadh porteur d'un message de paix. Or, son discours sur «l'islam» a été du réchauffé, Trump s'adaptant à la situation, reprenait à son compte, ou reproduisait, les mêmes poncifs que ses prédécesseurs sur des questions autrement complexes que l'on veut faire croire. Que retirer de la visite de Trump à Riyadh? Les Saoudiens étaient satisfaits, ils ont entendu ce qu'ils voulaient ouïr de la bouche de leur puissant protecteur; ce dernier est également ravi qui a engrangé pour son pays des milliards de pétrodollars bienvenus. Tout le monde était donc content. Peut-il en être de même pour les Yéménites qui continuent de mourir sous les bombes wahhabites, les Syriens, que les mêmes wahhabites ont fait détruire leur pays par mercenaires et jihadistes interposés? En fait, la paix reste introuvable dans un Moyen-Orient ravagé par les ingérences de ceux-là qui prônent la «bonne parole». Mais, pour le malheur de cette région, il y aura toujours des laudateurs comme le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, prompts à magnifier leur bourreau, qui lançait à Trump, lors de la réunion des chefs d'Etat musulmans avec le président états-unien «Vous êtes une personnalité unique, capable de faire l'impossible». Amen!