Le Conseil de Coopération du Golfe qui comprend aussi le Koweït et le sultanat d'Oman est né en mai 1981 La cassure est devenue inévitable lorsque le Qatar a non seulement poursuivi son soutien matériel et diplomatique aux Frères musulmans, un comble pour l'Egypte du maréchal Al Sissi, mais a amorcé un rapprochement spectaculaire avec l'Iran chiite. Cinq Etats du Golfe dont l'Arabie saoudite, l'Egypte, les Emirats arabes unis, Bahrein et le Yémen ont rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar, qu'ils ont décidé d'isoler totalement en verrouillant leur espace aérien et leurs frontières terrestres et maritimes. C'est une crise sans précédent, annonciatrice d'une situation pouvant déboucher sur un conflit armé, par-delà les conséquences prévisibles sur le marché pétrolier dont les monarchies du Golfe contrôlent le tiers des réserves mondiales de brut. Le Conseil de Coopération du Golfe qui comprend aussi le Koweït et le sultanat d'Oman est né en mai 1981, durant la guerre entre l'Irak et l'Iran, en guise de réplique à la révolution islamique à Téhéran qui menaçait de s'exporter dans la région. Il a vite été doté d'une force militaire commune, le «Bouclier de la péninsule», qui a eu bien du mal à s'opposer à l'invasion du Koweït par l'Irak en 1990. Mais une fois le Koweït libéré en 1991 par une coalition dirigée par les Etats-Unis, chaque Etat du CCG a signé des accords de défense, notamment avec Washington, de sorte que 35.000 militaires sont actuellement dans les bases US de cette région. Lors du déclenchement du printemps arabe, en 2011, le CCG a déployé des troupes à Bahreïn, menacé par des mouvements d'opposition chiites et le scénario s'est ensuite répété au Yémen où les Houthis combattent la coalition islamique menée par l'Arabie saoudite. Le bras de fer en Irak et en Syrie s'est aggravé au Yémen où l'Iran appuie les combattants houthis confrontés à la coalition islamique que mène l'Arabie saoudite. Jusque-là, la situation était envenimée mais non exaspérée. La cassure est devenue inévitable lorsque le Qatar a non seulement poursuivi son soutien matériel et diplomatique aux Frères musulmans, un comble pour l'Egypte du maréchal Al Sissi, mais a amorcé un rapprochement spectaculaire avec l'Iran chiite que le récent sommet Etats- Unis - pays musulmans tenu à Riyadh a désigné comme le «soutien de tous les groupes terroristes dans le monde». Le président américain Donald Trump avait alors appelé à l'hallali contre Téhéran et son ambition hégémonique dans la région. C'était pain bénit pour l'Arabie saoudite qui a trouvé en la circonstance le mot d'ordre pour lancer l'assaut contre son ennemi séculaire, soupçonné de saper l'unité du CCG. Une semaine avant cette crise, on a vu naître une vive polémique sur les propos supposés de l'émir du Qatar, le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani. Ce dernier aurait critiqué la volonté de Riyadh d'isoler diplomatiquement l'Iran, tout en prenant la défense du Hezbollah et des Frères musulmans. Il aurait également tenu des propos assez négatifs sur les relations entre l'administration de Donald Trump et le Qatar, pourtant un proche allié des Etats-Unis. Les autorités qataries ont accusé des «hackers» d'avoir manipulé ces propos, mais cela n'a pas empêché Riyadh et Abou Dhabi de bloquer les médias qataris, comme Al Jazeera. La brusque montée de la discorde qui secoue le sunnistan révèle aussi l'ampleur des rivalités, entre, d'une part, «les ambitions du vilain petit Qatar» et, d'autre part, la stratégie saoudienne de containment du rouleau compresseur iranien qui menace de déstabiliser l'ensemble des monarchies et hante surtout les dirigeants israéliens. Et elle illustre pleinement la volonté de leadership de Riyadh sur l'ensemble des pays arabes et musulmans, en témoigne le ralliement empressé des dirigeants de Tobrouk! Tout se passe comme si un pas est franchi en direction d'une nouvelle guerre du Golfe qui verra, cette fois, une coalition totale se dresser sur le chemin de l'Iran, (re)devenu la puissance régionale à abattre, emportant sur son passage le petit Emirat qui a joué avec le feu de l'extrémisme.