Les compositions s'étirent, laissant une grande liberté d'expression, accompagnées et soutenues par des ovations et des youyous incessants. Ses admirateurs se sont réjouis dans un climat de bonheur et de plaisir qui dépasse toute description possible. Toujours égal à lui-même, Lounis Aït Menguellet n'a pas manqué, trois heures durant, d'égayer l'assistance en multipliant les bonnes mélodies instrumentales et vocales, ordonnées selon les lois d'un rythme et d'une modulation à l'expression inspirée. L'amour n'est pas seulement un sentiment, mais aussi une musique. Et la modestie et la sagesse exemplaires de Lounis n'ont fait qu'illuminer un spectacle qui s'annonce d'ores et déjà passionnant. Humble devant la réussite, modeste, réagissant aux émotions, chemise et pantalon jeans noir, cheveux crépus couronnant une taille imposante, Lounis se consacre tout d'abord à la chanson sentimentale imprégnée d'une émotion délibérément éprouvée, aux ambiances apaisées, revendiquant ses sources kabyles traditionnelles. De Idaq wul (coeur oppressé) à Ur di ttagga (ne me laisse pas) et Sevr ay uliw (patience) en passant par Telt yyam (trois jours) et Aylam (reconnais les tiers), c'est tout un itinéraire d'amour, orné de sentiments multicolores. La force du verbe et de la musique contrôlée parfaitement, y est servie par un orchestre familiarisé. Les compositions s'étirent, laissant une grande liberté d'expression, accompagnées et soutenues par des ovations et des youyous incessants. Cela vaut indiscutablement le détour. L'on perd immédiatement patience. Tout le monde à la danse au point où on arrive à peine à circuler dans la salle. Et, Lounis et son groupe interprètent et versent dans la chanson à dynamique instrumentale. D nnubak (c'est ton tour), JSK, Ammi (fils). Et, c'est un boom sans précédent; la force de cette musique tient aussi à sa saveur inédite, à la façon dont les musiciens s'enthousiasment et chantent à mi-voix derrière leur leader enchanteur, conscients du moment unique qu'ils sont en train de vivre et de produire. C'est décidément cette tension et cette convivialité avec un public formidable qui produira une représentation intéressante et fracassante. C'est d'ailleurs la devise du chanteur. Après l'interprétation de ses anciens tubes qui ont d'ailleurs fait sa renommée, Lounis Aït Menguellet décide de faire incursion dans sa nouvelle collection en interprétant Dda Idir, Tajmilt (hommage), Inid (dis nous sage), désormais une source inépuisable de sagesse, mais un succès avéré et une orientation extraordinaire pour la chanson kabyle. Poète hors pair et interprète infatigable, Lounis a su comment faire le mariage magique entre la force du verbe et la musique en combinant des sons et des mots suivant des règles propres à lui, tirées de son génie, à la fois spirituel et philosophique. Incontestablement, Lounis Aït Menguellat s'est imposé jeudi comme le maître de la chanson kabyle. Le poète nous a appelé encore une fois à réinventer le sens de la fraternité, l'amour, la liberté, la responsabilité, la justice.... En un mot c'est le retour aux valeurs humaines, source intarissable de la dignité et de la sagesse.